Lintégration des étrangers - Mon discours à la 4ème journée - TopicsExpress



          

Lintégration des étrangers - Mon discours à la 4ème journée des commissions communales et cantonales - Sierre HES-SO, 16.11.2013 Mesdames et Messieurs les responsables de lintégration, Nous sommes réunis dans cette belle institution sierroise pour une grande concertation sur notre politique d’intégration des étrangers. Permettez-moi, d’emblée, une mise au point élémentaire : l’intégration des étrangers est une affaire…bilatérale qui requiert la volonté conjointe de deux parties, mais avant tout celle des étrangers. Notre affaire primordiale, à nous qui les accueillons, c’est de faciliter et de favoriser cette démarche et cette attitude. Le verbe qui actualise l’intégration est moins, en l’occurrence, un verbe transitif qu’un verbe réflexif. On n’intègre pas les gens. Les gens ne sont pas des choses ni des pions : ils s’intègrent eux-mêmes. Ou ne s’intègrent pas. C’est leur libre choix, qu’on peut entraver ou favoriser, mais qu’on ne peut ni forcer ni contrefaire. Vous trouvez ce langage abstrait ? Il ne l’est pas. J’ai vu l’intégration de près, elle a même marqué toute ma vie, puisque je suis, moi qui vous parle, le fils d’un intégré ! Mon artisan de père a traversé les Alpes depuis l’Autriche au lendemain de la guerre en quête de pain et de travail. À l’époque, ces deux notions allaient de pair dans sa classe sociale. Elles étaient indissociables. C’est moins évident aujourd’hui : qu’on regarde le haut ou le bas du panier, on y trouve bien du monde pour qui le pain quotidien n’est nullement associé au labeur. Mais passons. Mon artisan de père, donc, a bien dû s’intégrer dans la société suisse et plus précisément valaisanne. Il n’avait pas le choix. Personne ne l’a intégré ! Ou plutôt, en ce temps-là on intégrait les gens sans s’en gargariser, sans même en être conscient, tout comme le Bourgeois gentilhomme de Molière faisait de la prose sans le savoir. On les intégrait en leur permettant d’accéder au travail, puis à la propriété et aux avantages sociaux et économiques qu’offrait et qu’offre encore notre société. Pour qui respectait nos valeurs, partageait notre éthique de la vie en société, apprenait notre langue et n’insultait pas nos mœurs, l’intégration était acquise. Mon père, bien que trahi par son accent inimitable, est aujourd’hui un membre digne et sans histoires de la communauté helvétique. Il a trouvé ici une épouse, un abri, un foyer. Et il a donné à ce pays son énergie inépuisable, son honnêteté sans failles, ses impôts et cotisations ainsi que, ne l’oublions pas, trois nouveaux citoyens. On me dira que c’était en un autre siècle, un siècle où l’on avait grand besoin de bras et où, par ailleurs, les flux humains étaient infiniment plus congrus. Pour ce qui est des flux humains, il est clair que nous avons franchi un seuil, et même plusieurs. L’émigration qui était jadis une exception, un pis-aller, est devenue aujourd’hui un destin, voire un destin inéluctable pour bien des gens. C’est un phénomène politique, sociologique et historique de première grandeur, qui dépasse de loin les rapports humains spontanés qui étaient de règle du temps de mon père. C’est, notamment, un sujet central de la politique fédérale. Je n’en reste pas moins convaincu que les règles en vigueur en ce temps-là demeurent valables, car elles sont universelles. A l’échelle où l’immigration et l’intégration sont vécues, échelle des individus et des familles, et non des masses statistiques, le problème se réduit au bout du compte à des questions de décence, de confiance et de bon voisinage. Le travail est certes, traditionnellement, à la fois le moteur de l’immigration et le facteur numéro un de l’intégration. Mais il n’y a pas que le travail. Il y a, collatéralement, un ensemble de valeurs — honnêteté, respect, responsabilité, solidarité, équité — sur lesquelles ceux qui vivent et travaillent côte à côte doivent pouvoir s’entendre. Faute de quoi l’on va droit vers le ghetto et du ghetto à la confrontation. Je l’ai dit tout à l’heure et je le répète ici : la démarche de l’intégration est réflexive. C’est le nouvel arrivé qui s’intègre, activement, et non la communauté qui, de son propre chef, intègre un individu inerte et passif. Pour que le nouvel arrivé ait l’envie de faire cette démarche, et qu’elle soit valorisante pour lui, il doit respecter, et même aimer la société qui s’ouvre à lui. Le meilleur exemple, historiquement, de ce respect et de cet amour, est la passion avec laquelle des foules d’immigrés se sont fondues dans le rêve américain. A contrario, une société qui ne s’aime pas elle-même, qui se dénigre et s’en veut, ne suscitera le respect ni l’amour de personne. Si conciliante, si tolérante, si arrangeante qu’elle soit, elle n’aura aucune autorité, aucun ascendant sur les nouveaux arrivants. Et en pareil cas, les problèmes de cohabitation se dissolvent dans le chaos ou dans la répression. Ou plutôt, dans les deux. Aussi je le dis avec force : nous sommes l’un des pays de plus forte immigration en Europe. Nous avons une tradition humanitaire et humaniste vivante, une tradition de bons offices reconnue, une capacité d’ouverture rare parmi les nations. Mais nous devons aussi nous respecter nous-mêmes et infuser ce respect à tous ceux que nous accueillons. Nous devons être exigeants envers les étrangers comme nous le sommes envers nous-mêmes. Cette égalité de traitement est la première marche vers une intégration délibérée et respectueuse. Mais cette exigence, je le dis tout aussi fort, doit s’accompagner d’une dose égale de compréhension, d’intelligence et de mansuétude. Celui qui arrive doit percevoir la société d’accueil comme une alliée, et non comme un monde hostile ou indifférent. Notre mission est donc une mission de vertu dont l’équité est le maître mot ! * La Confédération a décidé de mettre sur pied, pour toute la Suisse, un programme-cadre qui implique fortement les cantons et les communes. Notre canton a réalisé son programme en tenant compte à la fois du modèle préconisé au plan fédéral et des réalités des régions et communes valaisannes. Les communes valaisannes ont été très étroitement associées aux travaux préparatoires car c’est dans les communes, au lieu de vie, que l’intégration doit se réaliser. Le Conseil d’État souhaite que la mise en œuvre de ce programme permette d’améliorer l’intégration des étrangers dans notre canton. Le nouveau programme fédéral est une chance que le canton avec les communes doivent saisir. Il donne l’opportunité de développer à la fois les mesures existantes (cours de langue, cours d’intégration, interprétariat) que des nouvelles mesures (primo-information, conseil, lutte contre les discriminations, intégration préscolaire). Les exigences de la Confédération visent à renforcer la qualité des prestations et à augmenter les offres. L’intégration nécessite un double effort, tant des étrangers que de la société d’accueil. La société d’accueil doit faire en sorte que des mesures adéquates soient disponibles. Les étrangers doivent dès leur arrivée utiliser au mieux les offres existantes. La compréhension de l’intégration ne va pas encore de soi. Il est important que des journées d’information et d’échanges comme aujourd’hui soient organisés pour que les différents acteurs de ce domaine puissent se rencontrer, échanger et comprendre l’évolution voulue conjointement par les 3 niveaux de l’autorité. Une politique d’intégration efficace est une mesure d’accompagnement indispensable à l’Accord sur la libre circulation conclu avec l’Union européenne. Une politique d’intégration efficace participe également au renforcement de la compétitivité de la place économique suisse. Il est juste que le nouveau programme cantonal vise à une meilleure collaboration interinstitutionnelle. Les structures ordinaires doivent aussi être responsabilisées sur les tâches en matière d’intégration et travailler sur ces questions. Il est nécessaire de régionaliser les prestations, l’échelon communal ne peut et ne doit plus tout faire. Je souhaite que ce travail difficile et délicat soit conduit en bonne harmonie avec les communes et que de bonnes solutions soient trouvées qui répondent aux attentes de notre population suisse et étrangère.
Posted on: Sun, 17 Nov 2013 12:36:41 +0000

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