- Chez les Beni-Hbibi: Le 12 juin 1871 , - TopicsExpress



          

- Chez les Beni-Hbibi: Le 12 juin 1871 , El-Koreïchi-ben-Sidi-Sadoun et Amor-ben-Amoqrane campaient chez les Beni-Habibi(1), non loin de l’embouchure de l’Ouedel- Kébir, et ils allèrent de leur personne à la zaouïa de Sidi-Ouaretz, zaouïa dirigée par Mohamed-ben-Fiala, moqaddem infl uent des Rahmanya. Autour de lui ils trouvèrent réunis tous les mécontents de la vallée de l’Oued-el-Kébir et plusieurs indigènes qui, compromis dans la première attaque du bordj d’El-Milia, s’étaient faits les auxiliaires du moqaddem pour soulever le pays. ____ (1). Les beni-Habibi forment deux sections ou douars-communes portant les noms de Hayène et de Oum-Agrioun. ____ Jusque-là ils n’avaient guère réussi ; la tribu dirigeante de la région, les Ouled-Aïdoun, qui s’étaient révoltés isolément le 14 février, avaient été désarmés et se tenaient tranquilles, ainsi que les autres tribus qui les avaient suivis dans cette échauffourée. L’arrivée d’Aziz dans le cercle de Djidjeli et la nouvelle de ses succès avaient bien produit une grosse émotion et entraîné de nombreuses individualités ; mais ces tribus de l’Oued-el-Kébir étaient, par tradition, trop imprégnées de l’esprit de particularisme pour accepter la direction d’un chef étranger au pays. Une petite saga bien organisée avait été postée, dès les premiers jours de juin, dans la vallée, au passage d’El-Aïnseur. Commandés par le caïd des Ouled-Aouat, Belgacem-ben-Rabab-Bouziane, les gens de cette saga étaient bien déterminés à ne pas laisser envahir leur territoire par Aziz ou par ses lieutenants. Ils avaient parmi eux la plupart des caïds et mokhaznya qui déjà avaient défendu le bordj d’El-Milia : Belgacem- Bouïa, caïd des Beni-Tlilène, le chaouch Saad-ben-Nini, petit homme roux, originaire des Oued-Aouat et d’une rare énergie, le khodja Ahmed-ben-Youcef, l’homme le plus intelligent et le plus dévoué de l’annexe, des vieux spahis et des khiela qui depuis 1860 étaient nos auxiliaires. - Lettre dEl-Koreïchi aux tribus du voisinage de Chekfa et Beni-Hbibi. El-Koreïchi fit honte aux moqaddems de leur tiédeur et de leur nullité, envoya des reqqabs, écrivit des lettres et donna rendez-vous aux notables des tribus du voisinage le jeudi 15 juin, du marché de Chekfa. Les Beni-Habibi, Beni-Amrane-Seflia(1), Ledjenah, Beni-Mammar, Beni-Salah(2), etc., de Djidjeli ; les Beni-Belaïd et les Beni-Meslem de l’Oued-Zour, y envoyèrent des délégués. Les moqaddems exaltèrent les esprits par le récit des succès d’Aziz à Selma et dans le cercle de Djidjeli, ainsi que par l’annonce de prétendues victoires de Boumezrag. _______ 1 Dénommés offi ciellement depuis 1869 Oued-Djendjène. 2. Dénommés offi ciellement depuis 1868 Oued bou-Youcef. ________ Quand le terrain parut suffi samment préparé, Abmed-ben-Saïoud, moqaddem des Taharia (Beni-Ideur), s’avança au milieu de la foule, un Coran à la main, et se mit à psalmodier d’une voix forte les versets les plus entraînants du livre saint ; il accompagnait chaque verset de commentaires, d’objurgations et de promesses. Quand l’émotion fut générale, il réclama de tous les assistants le serment de guerre, suivant la coutume locale, puis il annonça que, le lendemain, on attaquerait le caïd des Ouled-Aouat. Celui-ci fut aussitôt prévenu, car il avait dans son petit camp deux khouans Rahmanya qui avaient refusé, et qui refusèrent jusqu’à la fi n de s’associer aux rebelles : c’étaient Si-Belgacem-ben-Ali-Derouïch, de Taïlmam, et Si-Ali-ben-Fiala, ancien cadi, propre frère de Si-el-hadj- Mohammed-ben-Fiala, mais vivant séparé de son frère et ayant des idées toutes différentes. Sur l’avis transmis à El-Milia par Belgacem-Bouziane, le capitaine Melix, chef de l’annexe, envoya quelques renforts indigènes, et, dans la matinée du 16 juin, 500 fusils(1) étaient réunis à El-Aïnseur. Malgré le serment de la veille, l’attaque n’eut pas lieu ; le camp fut bien entouré par les rebelles, mais ils restèrent hors de portée des chassepots des deux ou trois spahis qui se trouvaient avec nos auxiliaires. (1). 250 du caïdat des Ouled-Aouat ; 200 du caïdat des Beni-Khettab avec le caïd Ben-Meradji ; 40 avec le caïd Belgacem-Bouya des Beni-Tlilène. A la tombée de la nuit, le caïd Belgacem-Bouziane reçut la lettre suivante qui, deux heures après, était aux mains du chef d’annexe : « Louange à Dieu, il est un. Que Dieu répande ses grâces sur notre seigneur et notre maître Mohammed ! A la seigneurie de l’honorable, du vénérable, du très gracieux, très pur, très parfait… etc., le caïd Belgacemaben- Bouziane… (nombreux souhaits et salutations…). II y aura du bien, s’il plaît à Dieu, dans ce qui va vous être dit. Notre intention est de nous diriger sur El-Milia dans le but dattaquer cette localité. Mais avant, nous désirons savoir si vous êtes un auxiliaire du protecteur de l’islam. Nous espérons que vous ne vous opposerez pas à notre volonté. Nous voulons le combat de la guerre sainte : c’est un chemin connu, c’est la voie de l’orthodoxie et de la gloire. Que Dieu nous aplanisse les obstacles ! « Si vous ne vous ralliez pas à nous, certes vous méconnaîtrez ce qui vous est profi table. Alors préparez-vous à la défense ! Nous ne craignons ni vous ni le gouvernement français auquel vous êtes inféodé, car l’autorité française n’est rien devant Dieu ni devant ses élus. « Salut sur vous, de la part de tous les gens des tribus du Babor aux Beni-Habibi, de la part du khalifat (d’Aziz), le seigneur El-Koreïchi- ben-Sidi-Sadoun, et du saint de Dieu(1) El-hadj-Mohammed-ben- Fiala. Que Dieu prolonge leurs existences ! Amen, amen, amen. « Répondez-nous vite, salut. » Belgacem-Bouziane, après s’être fait donner lecture de cette lettre, avait répondu verbalement au messager qu’il ne quitterait pas son poste et qu’il était prêt à repousser toute attaque. La nuit fut tranquille, et, le lendemain 17, les contingents rebelles commencèrent à se disperser. L’émotion n’était pas calmée ; mais les paysans de l’Oued-el-Kébir, longtemps indépendants, ont horreur de l’ingérence des étrangers dans leurs affaires ils avaient aussi de vieilles haines contre la famille de Si-el-Koreïchi-ben-Sidi-Sadoun, qui, appartenant à la noblesse religieuse du Ferdjioua, avait été de tous temps l’alliée des Bouakkaz-ben- Achour, ennemis traditionnels des populations de l’annexe d’El-Milia. D’ailleurs, plus superstitieux que dévots, et trop peu intelligents pour apprécier la force qu’ils pouvaient tirer de l’association congréganique, les gens de l’Oued-el-Kébir ne comptaient guère plus de 1,200 à 1,500 khouans disséminés partout et fort peu dans la main de leur moqaddem. El-hadj-Mohammed-ben-Fiala n’avait pas caché cette situation à El-Koreïchi, et c’était sur ses conseils que ce dernier avait, le 12 juin, fait faire son appel au djehad par Ahmed-ben-Saïoud, c’est-à-dire par un homme du pays. Reconnaissant enfin que leur présence sur ce point était plutôt nuisible qu’utile à la cause, qu’ils servaient, El-Koreïchi et Amor-ben- Amoqrane partirent bientôt pour retrouver Aziz du côté de Takitount, Mohammed-ben-Fiala, qui ne se sentait pas de force à entraîner le pays où son frère Ali avait au moins autant d’influence et plus de sympathie que lui, écrivit à Si-el-Haoussine-ben-Chérif-Moulaï-Chekfa(1), interné politique alors en résidence à Mila. (1). Au XVIIe siècle, un taleb, Marocain et chérif, Sidi-Mohammed-el-Abid, arriva sur une barque, chekfa, s’échouer à l’embouchure de l’Oued-el-Kébir, chez les Ouled- Chebel des Beni-Habibi. — (La tradition dit aussi qu’il arriva sur une natte lui servant de barque.) Sur ce point, il fonda une mosquée où est encore son tombeau. Ce chérif, seigneur de la barque, Moulai chekfa, fut l’ancêtre d’une famille, qui, plus tard, se fi xa aux O. Amor des Beni-Ideur. Un de ses descendants, Sidi-Abdallah, remit la barque à fl ot pour aller à Alger combattre les infi dèles lors de l’expédition d’O’Reilly (1775) ; son intervention miraculeuse entraîna, — selon la légende, — l’échec des Espagnols. A son retour, il fut comblé d’honneurs par les Turcs, et sa zaouïa devint un lieu d’asile célèbre, où se réfugièrent des beys et de hauts personnages en disgrâce. Quand nous fûmes maîtres du pays, nous eûmes d’abord des relations assez bonnes avec Ahmed-ben-chérif-Moulaï-Chekfa, parce qu’il possédait une grande propriété que les Turcs avaient donnée à sa famille près de Constantine, et aussi parce que c’était un homme intelligent et politique. Mais, en 1843, Lakhdar, son frère aîné, ayant fomenté des intrigues dans la banlieue de Constantine, fut enlevé et déporté en France. En 1845, le chef de famille était venu à Djidjeli offrir de nouveau son concours, et peu après, en 1851, un de ses fi ls, Si-el-Haoussine, avait été nommé caïd des Beni-ldeur. Son incapacité lui fi t retirer des tribus, entre autres celle des Taharya, qui fut donnée à Khalfa-ben-Amirouch (père du caïd actuel). Compromis en 1813 dans un complot, tendant à assassiner le chef de bataillon Robert, commandant du cercle de Djidjeli, Si-el-Haoussine-benMoulaï-Chekfa fut interné à Mila. Voir sur Moulaï-Chekfa l’Histoire de Djidjeli, par C. Féraud, Constantine, 1870. - Le retour de Moulaï-Chekfa. Arrière-petit-fils de deux grands saints inhumés dans le pays et ayant autour d’eux une légende miraculeuse, propriétaire d’une zaouïa qui avait servi d’asile inviolable aux beys et aux plus grands personnages, ancien prisonnier des chrétiens, qu’il avait eu la faiblesse de servir un instant, Moulaï-Chekfa était, aux yeux des indigènes de la région, le seul homme en situation de commander dans l’Oued-el-Kébir. II avait résisté aux sollicitations d’Aziz, par qui il aurait pu être rejeté au second plan ; il ne résista pas aux instances de son ancien ami et voisin Mohammed-ben-Fiala, et, le 20 juin, trompant la surveillance nominale du caïd de Mila, il quitta cette ville et vint aux Beni-ideur. Son arrivée fut marquée par de grandes fêtes, et il fut acclamé comme chef d’abord par la fraction des Ouled-Taleb, composée de ses parents éloignés, puis par la presque totalité des Beni-Ideur. Le caïd Amor-Khalfa-ben-Amirouch, chef du soff hostile à la zaouïa et demeuré fidèle à la France, abandonné de tous ses partisans, fut forcé de se réfugier dans son bordj avec les gens de sa famille, ses deïra et cinq de ses chioukh. Mohamed-ben-Fiala envoya de suite des émissaires annoncer à toutes les tribus de la vallée le retour de Moulaï-Chekfa et convia les indigènes à une grande réunion à la zaouïa du chérif. Cette réunion eut lieu le 25 juin ; toutes les tribus de l’Oued-el- Kébir et de Djidjeli y furent représentées par des moqaddems ou des délégués. Les Ouled-Askeur, dont le caïd Aïech-ben-Zaïd était encore fi dèle, y envoyèrent le moqaddem Labassi-ben-Amoqrane. La discussion fut longue, et, en fi n de compte, après avoir reconnu qu’on pouvait compter sur 6,000 fusils, on convint d’opérer en deux colonnes, ayant chacune un objectif distinct. La première devait marcher par les crêtes vers El-Aroussa(1) et détruire sur sa route le bordj du caïd Ben-Amirouch ; la seconde devait remonter la vallée de l’Ouedel- Kébir, en fi nir avec les contingents des Français aux Ouled-Aouat et marcher sur El-Milia.
Posted on: Sun, 03 Nov 2013 11:38:18 +0000

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