Billet d’humeur du 27 septembre : Livres, marinières et - TopicsExpress



          

Billet d’humeur du 27 septembre : Livres, marinières et chancelières. Otto von Bismarck, dont la légende fit un « chancelier de Fer », lequel, certes, ne manquait pas de poigne, retrouve avec une régularité classique et maîtrisée les rayons de nos librairies. Ces retours correspondent chez nous à une sorte de tradition historienne. Cela n’est pas absurde. Il est bon que les Français connaissent l’une des figures dominantes de l’Europe du dix-neuvième siècle. C’est toujours instructif. Ils peuvent d’ailleurs profiter actuellement d’un petit volume de poche, judicieusement réédité : c’est le Bismarck dû au grand métier net de Jean-Paul Bled, dans la collection « Tempus » de l’éditeur Perrin. Il reste dommage, à l’échelle de la Corse, que l’on connaisse moins bien la figure éminente d’une victime de Bismarck : l’ambassadeur de Napoléon III Vincent Benedetti, qui mérite mieux que d’avoir été piégé machiavéliquement via la fameuse dépêche truquée d’Ems, ce petit chiffon tragique qui entraîna la France dans la guerre fatale de 1870 d’où sortit l’unité définitive de l’Allemagne. De son action en Prusse, Benedetti tira un témoignage lucide et courageux: on devrait bien rééditer son volume : Ma Mission en Prusse, qui date de 1871. Et offrir une biographie complète à Benedetti ! Madame de Staël avait publié, à Londres en 1813, son célébrissime De l’Allemagne. Giraudoux, Barrès ou bien d’autres suivront la terrible dame. Comprend-on mieux l’Allemagne d’aujourd’hui que celle de 1813 ? Rien n’est moins sûr. En témoignent les retours, moins volontaires et plus surprenants, d’Otto de Bismarck sur la scène politique française. Depuis le 23 septembre 1862, date où il devint chancelier de Prusse avant d’être une décennie plus tard, celui de l’Empire d’Allemagne – poste qu’il conserva jusqu’en 1890, Bismarck est fréquemment utilisé par le personnel politique français. Qui s’érige en juge, sinon en historien. Non sans quelques mécomptes… Ainsi, parmi les dernières approximations en date, celles, acharnées, d’un de nos vigoureux ministres, allergiques aux chancelières mais amateur de marinières. Pour mal noter Mme Angela Merkel, le sémillant ministre qui appelle aussi à dissoudre les courants existants ou tourbillonnants au sein du parti socialiste, la qualifie de « bismarckienne ». Sans vouloir lui faire une flatterie, assurément, mais surtout sans s’apercevoir qu’il lui fait, sans le vouloir non plus, un compliment. Certes, Mme Merkel vient, le 22 septembre, de devenir, pour un troisième mandat, la chancelière d’Allemagne. Ce que seront ses choix politiques, sociaux et internationaux, voilà qui n’a plus grand-chose à voir avec la politique de 1870 ou de 1890. Le chancelier Bismarck, si belliqueux qu’il fut un temps, à l’extérieur avant d’opter pour une paix durable, fut aussi têtu à l’intérieur de l’Empire, voulant dominer les catholiques – contre lesquels il échoua à imposer ses diktats ! Pourtant, l’homme d’Etat prussien, délaissant un étroit conservatisme, restera aussi un grand organisateur social pour son pays. Ces réformes « bismarckiennes » majeures et positives étaient, en fait, directement inspirées par celles, faites en avance sur toute l’Europe, en France par Napoléon III. Pour permettre aux réformateurs du jour de penser plus un peu plus chaleureusement, conviendrait-il de leur recommander l’usage d’une chancelière : une boîte-coussin remplie de fourrure qui permet commodément de se réchauffer les pieds ? Or, c’est peut-être par les pieds que les idées prennent froid le plus dangereusement ! Aux amateurs de marinières, il faudrait aussi rappeler la chute de Bismarck : une caricature le montrait en « capitaine quittant le navire. » Il fut chassé du pouvoir par Guillaume II, qui aimait un peu trop les cuirassés. RL.
Posted on: Mon, 30 Sep 2013 08:02:20 +0000

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