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Cinq questions autour des travailleurs détachés Le Monde.fr | 02.12.2013 à 19h25 • Mis à jour le 03.12.2013 à 09h53 | Par Anna Villechenon Abonnez-vous à partir de 1 € Réagir ClasserPartager facebook twitter google + linkedin pinterest Le détachement des travailleurs dans les pays de lUnion européenne concernerait 1,5 million de personnes. LAssemblée nationale a commencé à débattre, lundi 2 décembre, du rapport dinformation sur la proposition de directive relative à lexécution de la directive sur le détachement des travailleurs, qui concernerait 1,5 million de personnes dans lUnion européenne. Retour sur une polémique qui ne cesse denfler. Quest-ce quun travailleur détaché ? Le statut de travailleur détaché est défini par la directive européenne du 16 décembre 1996, elle-même établie par le Conseil et le Parlement européens. « Un travailleur est considéré comme “détaché” sil travaille dans un Etat membre de lUE parce que son employeur lenvoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans cet Etat membre. Par exemple, un prestataire de services peut remporter un contrat dans un autre pays et décider denvoyer ses employés exécuter ce contrat sur place. (...) Cette catégorie ne comprend pas les travailleurs migrants qui se rendent dans un autre Etat membre pour y chercher un emploi et qui y travaillent. » Les charges sociales appliquées sont celles du pays dorigine. Ce qui, concrètement, permet à un employeur demployer des travailleurs à moindre coût dans des pays aux charges sociales bien plus élevées. En revanche, le salaire et les conditions de travail de lemployé détaché relèvent des règles du pays dans lequel il travaille. Un travailleur détaché en France doit donc toucher au moins le smic. Mais, dans les faits, « le contournement de ces règles saccroît en France », déplorait fin novembre le ministre du travail, Michel Sapin, via, notamment, « des montages frauduleux de plus en plus sophistiqués », ce qui conduit à une forme de « dumping social ». Un constat déjà dressé par les députés Gilles Savary (PS), Chantal Guittet (PS) et Michel Piron (UDI) dans un rapport parlementaire publié en mai. Ce dernier dénonçait une directive « insuffisante et largement inefficace », qui « consacre des pratiques de concurrence déloyales et le dumping social ». Lire : Travailleurs détachés : le gouvernement monte au créneau Combien sont-ils en France et, inversement, combien de Français sont détachés au sein de lUE ? Selon un rapport dinformation du Sénat publié en avril, la France a accueilli, en 2011, 144 411 travailleurs détachés officiellement déclarés. Cest 30 % de plus quen 2010 (111 320) – une hausse due à un « incontestable effet “élargissement de lUE” ». Un chiffre qui pourrait en réalité atteindre le triple : le ministère du travail estime que 220 000 à 300 000 travailleurs détachés ne sont pas déclarés. « La France est le deuxième pays daccueil, derrière lAllemagne (311 000 travailleurs détachés en 2011) et devant la Belgique (125 000). La durée moyenne du détachement par salarié sétablit à cinquante jours », indique le rapport du Sénat. Nombre de salariés détachés en France depuis 2000. Dans lautre sens, la tendance est inverse : 169 029 détachements de salariés français au sein de lUnion européenne ont été enregistrés en 2011, toujours selon le Sénat, qui précise que ce nombre a diminué de près de 38 % depuis 2007. « La France reste cependant le troisième pays exportateur derrière la Pologne (plus de 300 000 travailleurs détachés en 2011) et lAllemagne (plus de 250 000 travailleurs) », précise le rapport. De quels pays viennent-ils ? « De façon générale, 61 % des déclarations de détachement de travailleurs proviennent de pays ayant adhéré à lUnion européenne avant 2004. Il nen demeure pas moins que la dynamique est clairement du côté des “nouveaux Etats membres” qui ont adhéré après cette date : les demandes en provenance de ces pays ont ainsi augmenté de 44 % en cinq ans. » Selon le rapport dinformation du Sénat publié en avril 2013, le Luxembourg est le premier pays dorigine des déclarations de détachement des entreprises en France (le quart dun total de 11 200 déclarations). Il est suivi par la Pologne (7 700) et lAllemagne (5 500). Les salariés détachés en France dorigine européenne sont en majorité polonais (27 700, soit 19 %), portugais (16 500, soit 11 %) et roumains (13 200, soit 9 %). Par ailleurs, quelque 18 500 Français sont détachés en France (13 %) par une entreprise européenne. Dans quels secteurs sont-ils le plus employés ? Les trois principaux secteurs concernés sont la construction (33 % des travailleurs détachés), lindustrie (25 %) et le travail temporaire (20 %), note le rapport du Sénat. « Il convient de relever lexplosion du nombre de recours aux travailleurs détachés au sein du bâtiment et des travaux publics : 63 659 en 2011 contre 5 865 en 2008. Le secteur de lagriculture attire également de plus en plus de travailleurs détachés : une augmentation du nombre des déclarations de 58 % a été enregistrée entre 2010 et 2011. » Nombre de salariés détachés par secteur dactivité en 2011. Quest-ce qui fait débat en France ? Et à léchelle européenne ? En mars 2012, la Commission européenne a présenté un projet de directive pour clarifier le texte de 1996 sur les conditions demploi des salariés détachés. Celui-ci prévoit notamment que les travailleurs détachés dans un autre pays européen soient traités sur un pied dégalité. La majorité des pays, dont la France et lAllemagne, veulent renforcer les contrôles et lutter contre les dérives générées par le recours à la main-dœuvre détachée, notamment en matières de cotisations sociales. Mais dautres pays font valoir quun renforcement des moyens de contrôle va à lencontre de la libre circulation des travailleurs dans lUnion. Si, à ce jour, aucun accord na été trouvé entre les ministres européens du travail, ces derniers espèrent parvenir à un accord lors dun sommet le 9 décembre et avant le Conseil européen des 19 et 20 décembre. En France, Michel Sapin a tenté, le 20 novembre, daccélérer le débat en présentant en Conseil des ministres un « plan de lutte » – demandé par le président, François Hollande — contre les abus liés au détachement de travailleurs dans lUnion. M. Sapin souhaite renforcer les contrôles, notamment via linspection du travail, mais aussi « larsenal législatif national » pour mieux « responsabiliser les maîtres douvrage et les donneurs dordre quand ils recourent à des sous-traitants multiples ». De leur côté, les députés Gilles Savary (PS), Chantal Guittet (PS) et Michel Piron (UDI) ont annoncé quils déposeront une proposition de loi après la réunion des ministres européens des 9 et 10 décembre, qui prévoit la création « dune liste noire des entreprises frauduleuses, qui seraient écartées des appels doffres » ou encore lintroduction « dune double notification de détachement de travailleurs étrangers, non seulement par lentreprise qui détache mais également par le maître douvrage ». Lire aussi : Après le « plombier polonais », voilà la polémique du « travailleur détaché » Anna Villechenon Journaliste au Monde Suivre Aller sur la page de ce journaliste Sapin ne fléchira pas sur un compromis à Bruxelles « La France tient une position extrêmement ferme et travaille avec acharnement à une solution. Je ne fléchirai pas », a assuré le ministre du travail, Michel Sapin, lors dun débat à lAssemblée, le 2 décembre. « La responsabilité solidaire doit être obligatoire en particulier dans le BTP » et les Etats membres qui veulent létendre à dautres secteurs doivent pourvoir le faire, a estimé M. Sapin. « Nous ne voulons pas laisser la concurrence déloyale sinstaller et précariser les systèmes sociaux des pays avancés », a-t-il conclu.
Posted on: Tue, 03 Dec 2013 18:46:54 +0000

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