Difficile de dire aujourd’hui quel sera le dénouement de la - TopicsExpress



          

Difficile de dire aujourd’hui quel sera le dénouement de la terrible crise syrienne et quand il interviendra, mais à la veille de frappes annoncées contre les forces et les équipements du régime, il peut être utile de revenir sur le dernier... livre de Jean-Pierre Filiu, qui replace la Révolution syrienne dans le contexte du printemps arabe et surtout dans l’histoire bientôt centenaire du Moyen-Orient. Pour tous ceux qui souhaitent s’informer sur le déroulement de cette révolution, le livre le décrit dans le détail, en rappelant notamment, comme l’avait déjà montré Thomas Pierret dans son enquête sur les relations entre le parti Baas et le clergé sunnite, que – je cite « le soulèvement démocratique de mars 2011 s’est nourri du retournement contre le système Assad de cette périphérie rurale qui a si longtemps constitué l’assise sociale du régime baasiste ». Jean-Pierre Filiu connaît bien et depuis longtemps la Syrie pour y avoir séjourné notamment en 1980 au moment de l’insurrection des Frères musulmans, puis comme premier conseiller à l’ambassade de France de 1996 à 1999, où il était l’adjoint direct de l’ambassadeur et le chargé d’affaires en son absence, ce qui l’a amené à rencontrer Hafez et Bachar al-Assad ainsi que les cadres de leur régime. Mais l’intérêt principal de son livre réside dans deux thèses qu’il soutient : la Syrie actuelle, née sur les ruines de l’Empire ottoman à la fin de la Première guerre mondiale est le fruit du déni de la puissance mandataire française opposé à l’autodétermination et ce jusque dans les conditions de l’indépendance en 1943, et c’est cette exigence d’autodétermination, à la fois civile et militaire, sans cesse reportée, qui alimente aujourd’hui le soulèvement populaire, même s’il s’est moulé dans les formes de contestation que lui offrait l’institution religieuse, avec notamment ces grandes manifestations à la sortie des mosquées après la prière du vendredi. L’autre thèse est tournée vers l’avenir. Jean-Pierre Filiu considère que la révolution syrienne, davantage que ses devancières tunisienne, libyenne ou égyptienne, est d’une portée majeure car elle vient clore un siècle d’histoire du Moyen-Orient. Le concept géopolitique de Middle East est apparu pour la première fois en 1902 sous la plume d’un amiral américain visionnaire. Avant ce brillant stratège issu de l’Académie militaire de West Point on parlait d’Orient, ni Proche ni Moyen, et éventuellement de Levant. L’amiral Alfred Mahan déduisait de sa connaissance des routes maritimes et des enjeux autour de leur contrôle qu’un Etat voulant s’affirmer sur la scène internationale devait exister au Moyen-Orient, du fait de sa position de carrefour dans l’économie-monde. Aujourd’hui, cette région forgée – je cite « dans le fracas des armes et le mépris des peuples » est en train de s’effondrer sous nos yeux. Le rêve de l’administration Bush de remodeler le Moyen-Orient par l’invasion de l’Irak a viré au cauchemar. La révolution syrienne engagée dans les profondeurs de la société renverse la perspective et offre des opportunités nouvelles qu’il serait stupide et criminel d’ignorer. « Ce nouveau Moyen-Orient que les néo-conservateurs croyaient enfanter en Irak en 2003 – conclut l’auteur – commence aujourd’hui d’émerger en Syrie ».
Posted on: Wed, 11 Sep 2013 03:50:45 +0000

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