Frères humains, qui après nous vivez, Nayez les coeurs contre - TopicsExpress



          

Frères humains, qui après nous vivez, Nayez les coeurs contre nous endurcis, Car, si pitié de nous pauvres avez, Dieu en aura plus tôt de vous mercis. Vous nous voyez ci attachés, cinq, six : Quant à la chair, que trop avons nourrie, Elle est piéça dévorée et pourrie, Et nous, les os, devenons cendre et poudre. De notre mal personne ne sen rie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! Se frères vous clamons, pas nen devez Avoir dédain, quoique fûmes occis Par justice. Toutefois, vous savez Que tous hommes nont pas bon sens rassis. Excusez-nous, puisque sommes transis, Envers le fils de la Vierge Marie, Que sa grâce ne soit pour nous tarie, Nous préservant de linfernale foudre. Nous sommes morts, âme ne nous harie, Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! La pluie nous a débués et lavés, Et le soleil desséchés et noircis. Pies, corbeaux nous ont les yeux cavés, Et arraché la barbe et les sourcils. Jamais nul temps nous ne sommes assis Puis çà, puis là, comme le vent varie, A son plaisir sans cesser nous charrie, Plus becquetés doiseaux que dés à coudre. Ne soyez donc de notre confrérie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! Prince Jésus, qui sur tous a maistrie, Garde quEnfer nait de nous seigneurie : A lui nayons que faire ne que soudre. Hommes, ici na point de moquerie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! Villon, Epitaphe Villon ou ballade des pendus
Posted on: Wed, 23 Oct 2013 20:08:25 +0000

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