I. Qui est Amary Ndack ? 1. Recteur de Daara au Kayoor - TopicsExpress



          

I. Qui est Amary Ndack ? 1. Recteur de Daara au Kayoor (1860-1871). 2. Résistant contre la conquête coloniale (1871-1875) 3. Guide religieux à Thiénaba (1882-1899) II. La contribution du résistant à l’émergence de la nation 1. La stratégie coloniale de la division 2. La réaction par l’unification du Sénégal occidental 3. Le brassage des peuples III. Contribution du guide religieux à l’émergence du citoyen sénégalais. 1. ‘’Allouwa’’ ou éducation 2. ‘’Alle ba’’ ou travail et citoyenneté. 3. ‘’Allahou Akbar’’ en dévotion I. Qui est Ahmadou Ndack ? Comme les hommes de son temps, Amary Ndack est un personnage multidimensionnel. Nous avons fait le choix de mettre en exergue trois visages d’Amary Ndack : le recteur de Daara, le résistant et le guide religieux. 1. Recteur de Daara au Kayor (1860-1871) Amary Ndack né vers 1830 à Thiénaba Kajoor, à 3 km de Kébémer. Son père Ahmed Saïb, devenu Massaer par la phonétique Wolof est un Maure dont les ancêtres se sont installés au Kajoor depuis quatre générations. Sa mère Ndack Fall de la lignée de Fall Maasigui est une parente éloignée du Damel Birima Fatma Thioub. Pendant sa jeunesse, Amary Ndack a été éduqué par son père et son frère Abdourahmane Seck. En raison de son érudition, c’est lui le puîné qui héritera la fonction de maître d’école à la mort de son père en 1860. Outre l’enseignement, il cultivait la terre et se rendait de temps en temps à Saint Louis pour écouler ses produits agricoles. C’est à l’occasion de l’un de ses voyages à Saint-Louis qu‘il fait la rencontre de Dahirou Mahdiyou, frère du Marabout toucouleur Ahmadou Mahdiyou, plus connu sous le nom de Cheikhou Ahmadou. C’est lui qui l’a initié au Wird Tijaan (Il était auparavant d’obédience Khadre) et lui parla abondamment de leur maître à tous Ahmadou Mahdiyou. Ce dernier lui même a été initié par Mamadou Hammé dit Mahdiyou, son père. Il est fondateur du centre religieux de Wuro Mahdiyou, près de Podor. Mamadou Hammé quant à lui a été initié au Wird Tidiaan en même temps, le même jour que Cheikh Oumar Al Foutyou et Thierno Alya Diop par le maître Abdoul Karim, disciple de Mouloud Fall. C’est pourquoi, au même titre du Cheikhou Oumar, Mamdou Hammé et ses disciples appartiennent à la Haafiziya. C’est donc un Tijaan accompli qui désormais tenait le daara de Thiénaba Kajoor où il enseignait beaucoup de ‘’fanna’’ à de très nombreux taalibés. Il quittera son village natal en 1871 pour embrasser un nouveau destin, celui de combattant et de résistant. 2 - Le résistant contre la conquête coloniale (1871-1875). La raison de cet engagement combattant est un appel d’Ahmadou Madyu, son maître, victime d’une double provocation. Dès le départ, les colonisateurs ont identifiés l’Islam comme une religion du refus et donc comme obstacle à leur projet colonial de domination et d’aliénation. Dès lors, l’éradication de tous les foyers islamiques était l’objectif stratégique majeur de la colonie. C’est donc dans ce cadre qu’ils ont identifié Wuro Mahdiyou comme foyer musulman subversif dont le fondateur a déjà eu maille à pâtir avec les français. Ils envoyèrent une première mission pour détruire Wuru Madyu, le 28 juin 1869. Elle était conduite par le capitaine de frégate Vallon. Wuro Mahdiyou incendié fut reconstruit et demeura le même foyer musulman très actif. Les français décidèrent l’envoi d’une seconde mission de destruction en 1871. Cette fois elle était conduite par Lam Toro Samba Oumou Hané, chef de la province du Toro, fidèle allié dès français. Wuro Mahdiyou fut de nouveau saccagé et il y eut même tentation de profanation du tombeau de Mahdiyou. C’est dans la préparation de la riposte à la provocation de Lam Toro qu’Ahmadou Mahdiyou fit appel à Ahmadou NDack. Il vida Thiénaba Kajoor de tous ses habitants, élèves, parents et voisins et partit en exil auprès d’Ahmadou Mahdiyou. Sur la route du Toro, l’armée d’Ahmadou eut à combattre des éclaireurs de Lam Toro en embuscade dans la petite forêt de Njakiw. Cet incident est historiquement important car les embusqués ont tué neuf parmi les partisans d’Ahmadou Mahdiyou. Hamdan Haafiz son frère et Imam du Jihad en faisait partie. Ahmadou l’enterra et le remplaça immédiatement par Ahmadou Ndack promu Imam de la Jihad. Il a été de tous les combats contre les français ou leurs alliés ceddo entre 1871 et 1875. Les plus célébres sont : la bataille d’Agnam en août 1871 contre Lam Toro ; celle de Belel, de Kokki et de Sakh en juillet 1874 contre Lat-Joor allié des français ; celle de Coowaan contre une coalition de princes déchus par Ahmadou Modyu ; AMARY Ndack, était donc un élément clé dans le dispositif du Jihaad, de par sa cohérence et son rôle stratégique d’Imam. C’est pourquoi à la mort d’Ahmadou Madyu après Samba Saajo, il fut son principal héritier et devint dès lors un guide religieux accompli. 3.Guide religieux à Thiénaba Après Samba Saajo Amary Ndack a fait un long périple qui l’a conduit à Tag Weri New au Saloum chez les descendants de Maba Diakhou, puis à Pire où il vécut un an avant de s’installer à Jaayaan dans le Baol oocidental pendant 7 ans. C’est là qu’il a fondé à nouveau un foyer. Mais à l’évidence il était à l’étroit, son ambition étant de dérouler son propre projet religieux et éducatif. Le Teigne du Baol, parent du côté de sa mère lui donna l’autorisation de s’installer où bon lui semblait dans le Baol occidental. Il choisit, guidé par son ‘’istixaar’’ l’emplacement actuel de Thiénaba, entre Thiès et Khombole. Il s’y installa en 1882 et fut rejoint progresivement par ses adeptes dispersés après Samba Saajo. Ceddos convertis et habitants de la contrée sont venus grossir les rangs de la confrérie naissante. Pendant 17 ans, de 1882 à 1899, année de sa mort, il partagea son temps entre l’enseignement, la tarbya et le travail de la terre. Amary Ndack est donc à la fois un intellectuel et un homme d’action, un guide religieux et un résistant. La question est donc de savoir dans quelle mesure le guide religieux et le résistant ont contribué à l’émergence de la nation sénégalaise et à la formation du citoyen sénégalais. II. La contribution du résistant à l’émergence de la nation sénégalaise 1. La stratégie coloniale de la division Convaincus qu’ils ne parviendront jamais à dominer des royaumes et des peuples unis, les colonisateurs ont précocement mis en place une stratégie de l’éparpillement. Par des alliances et des contre alliances, ils dressaient les royaumes les uns contre les autres et à l’intérieur des royaumes les prétendants entre eux. Le sachant, des précurseurs comme Maba avaient tenté en vain de mettre en place une fédération musulmane. Ahmadou Madyu et Amary NDack l’ont réussi dans le Sénégal occidental. 1. L’unification du Sénégal nord occidental sous la bannière de l’islam. En soumettant les uns après les autres, les alliés des français, Ahmadou Madyu et Amary NDack ont fini par contrôler le Sénégal occidental. Le Jolof fut conquis en 1871 après la capitulation de Yang Yang et du Buuba Bakantam Xari Jaloor ; Lam Toro défait et réfugié au fort de Ndiawarara, le Dimar et Tareji étaient sous contrôle Maadyankobé ; Après leurs déroutes à Coowaan en 1874, Lat Dior et Demba Waar se réfugièrent à Leybar laissant le Kajoor entre les mains des Mahdyankobé. En ce moment précis la presque totalité du Sénégal Nord-occidental était unifié sous la bannière de l’islam mahdiyankobé. Cette unification politique s’accompagnait d’un frémissement de conscience nationale du fait du brassage naissant des peuples. 2 Brassage des peuples libérés de l’arbitraire Ceddo L’histoire coloniale devra un jour montrer le degré d’adhésion des Baadoolos à la cause Maadyankoobe. La peur de la peste et la conviction d’y échapper en rejoignant l’armée Maadyankoobé est un argument trop léger. Sa redondance dans les archives coloniales relève tout simplement de l’absence d’argument pour expliquer le succès de celui qu’ils appelaient le faux prophète. La vérité, nous semble t-il, est que les paysans des territoires sous administration Maadynankoobé étaient tout heureux de se soustraire aux razzias des récoltes et des bêtes et à la captivité. Aussi, même, s’ils n’adhéraient pas par conviction à une religion sans doute trop rigoureuse pour eux, au moins le faisaient-ils par intérêt. Si éphémère fut-il, le sentiment d’appartenance à un ordre nouveau plus juste a habité les peuples du Sénégal Nord-occidental sous administration Maadyankoobé. En réagissant contre la stratégie de la division Amary Ndack et Ahmadou Madyu, par le biais de l’unification politique et du sentiment balbutiant d’une appartenance commune, ont joué le rôle de précurseurs dans l’édification de la nation sénégalaise. III. La contribution du guide religieux à l’émergence du citoyen Il existe un lien consubstantiel entre le musulman et le citoyen. Il est défini de façon imagée par Amary Ndack comme le contenu d’une marmite à trois pieds. Chaque pied est indispensable à l’équilibre de la marmite. Les trois pieds sont la dévotion, la connaissance et le travail ou Alluwa, Alleba, Allahou Akbar. 1. Allouwa ou éducation L’acquisition du savoir est le fondement de tout le reste, dévotion comme travail. Sans connaissances, les actes de dévotion relèvent ou risquent de relever de l’obscurantisme. D’où cette injonction divine, ‘’ connaissez-moi avant de m’adorer, si vous ne me connaissez, comment m’adorer’’. Sans connaissance, sans expertise, le travail relève de l’amateurisme. Il devient une agitation dévoreuse d’énergie mais ni efficace, ni efficiente. Même les maîtres de la finance mondiale ont fini par se rendre compte de cette évidence. Après l’avoir reléguée au second plan pendant les premières années d’ajustement structurel, ils ont inversé la hiérarchie pour ériger l’éducation un secteur prioritaire. 2. Alleba ou travail et citoyennete Amary Ndack enseigne que le travail a ceci de capital qu’il est le soutien sine qua non pour réaliser en toute pureté les autres obligations, dévotions comme éducation. L’érudit qui ne travaille pas, dit-il « confie son ventre à autrui ». Il poursuit, enseignant que même si on est né dans l’or, cela ne dispense pas du travail, car le travail est une contrepartie pour ne pas vivre en parasite de Dieu. C’est pourquoi, la vraie justification du mot wolof « tool » champ, par extension lieu de travail et travail, est celle-ci : instrument pour mesurer son rapport à Dieu. Tool = « fumatollu Yalla ». Amary Ndack enseigne aussi que le travail est un garant d’autonomie par rapport au pouvoir, par rapport à tout pouvoir.Tout musulman, tout citoyen donc qui ne vit pas de son travail mais en parasite du pouvoir, met sa foi en péril. Car dit-il « buur du maye, day keptel », « le pouvoir ne donne pas des cadeaux, il tend des pièges ». 3. Allahou Akbar ou dévotions Amary Ndack enseigne que la permanence dans ses dévotions est un facteur de renforcement de la crainte de Dieu. Par ailleurs certaines dévotions comme la zakaat, l’assistance aux faibles, sont en même temps des actes citoyens de haute portée. Cet enseignement séculaire d’Amary Ndack est la susbtance d’une thèse de Doctorat soutenue en 1986 à Umal Khura par Saffar al Hawali sous la direction de Mouhamed Khoutb. Le titre de la thèse est « le phénomène de l’Irja dans la pensée islamique ». Voici sa principale conclusion : tout Uléma, tout musulman qui soutient un pouvoir en se fondant sur des critères autres que la conformité de ce pouvoir avec les principes islamiques, entre dans le cadre de l’Irja et devient murjia. Murjia peut se traduire par marabout courtisan. Ainsi donc, l’autonomie par le travail est le seul moyen de garder une distance grâce à laquelle le pouvoir est soumis en permanence à la critique selon les principes islamiques. Conclusion Précurseur de l’édification de la nation sénégalaise, Ahmadou Ndack a fondé un centre religieux, Thiénaba, qui est depuis plus d’un siécle, un centre de formation d’un citoyen formaté par les valeurs clé que sont l’adoration, le travail et la dévotion. Thiénaba partage ce rôle avec les autres foyers religieux mais il faut revenir à l’objectif initial des fondateurs qui était l’unification de la nation sous la bannière de l’Islam, objectif malheureusement de plus en plus dévoyé par l’absence de dialogue et de concertation entre confréries.
Posted on: Sun, 18 Aug 2013 18:15:04 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015