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Je vous conseille, amis français ou francophones, cet article signé Radu Magdin. Constantza, là où se heurtent les intérêts internationaux Au fil du temps, la Roumanie s’est trouvée au carrefour de plusieurs empires – ottoman, russe, austro-hongrois. L’histoire a tendance à se répéter, si bien que le pays est de nouveau attirant aux yeux de plusieurs Etats. La plupart s’intéressent à l’avenir du port de Constantza, dont la situation suscite la convoitise – détenu par l’Etat, il aurait bien besoin d’un coup de neuf ! L’intérêt national, centralisé, est de garder la main sur cet acquis qui date du temps des communistes, celui des autorités locales est d’en tirer le plus de profit en en prenant le contrôle. Et il y a les Etats-Unis, la Russie, la Chine, les Pays-Bas, qui voudraient aussi leur part. Il faut admettre que nous parlons là de millions d’euros : le bénéfice annuel du port est de 10 millions d’euros, mais cette somme pourrait doubler si le volume des marchandises qui y transitent augmentait. Sans oublier que la gestion du port ouvre aussi de formidables possibilités en termes de rentabilité une fois la Roumanie acceptée dans l’espace Schengen. L’équation entre les trois plans, national, local et international, est plus simple qu’on ne le croyait : “les étrangers” essaieront, dans leurs négociations avec les autorités nationales – président, Premier ministre, ministre des Transports – de maintenir le contrôle du port au niveau national, ou bien de le récupérer, s’ils sentent qu’il n’y a pas moyen de s’entendre sur le plan local (le maire et/ou le président de la région) en ce qui concerne la gestion du site. Radu Mazare, le maire de Constantza, grande ville du sud-est roumain, qui souhaite récupérer le port afin de gagner plus d’argent, à la fois auprès des Chinois que des Néerlandais dans le cas d’une privatisation (crise oblige !), s’est montré fort mécontent quand le ministre des Transports, Relu Fenechiu, a exprimé fin mars dernier son désir de voir le port rester sous la “coordination du ministère, puisqu’il est un atout stratégique”. Le maire soutient que c’est en réalité le président du pays, Traian Basescu, qui ne serait pas d’accord avec le transfert du port sous la houlette des autorités locales, car il perdrait ainsi de facto le contrôle du port. Et il rappelle la promesse du Premier ministre, Victor Ponta (centre-gauche), de soumettre sous peu un projet de loi permettant à tous les ports de passer sous l’autorité des mairies. “Comme partout en Europe,” renchérit le maire Mazare. Mais comment faire quand dans le jeu entrent aussi des intérêts internationaux multiples ? La Roumanie est signataire d’un partenariat stratégique avec les Etats-Unis, qui détiennent des bases militaires dans la région de la Dobrogea (autour de Constantza), sans parler des sièges de grandes compagnies actives sur le bassin de la mer Noire : Exxon, Chevron, etc. Les Américains ont tout intérêt à ce que le port soit administré par des autorités favorables aux enjeux politico-militaires et économiques des Etats-Unis. Ce qui ne correspond guère à la stature d’un maire qui “passe son temps avec des demoiselles à demi nues et n’a pas la tête aux questions liés au transit de munition,” selon le président Basescu, en mars 2013. A l’autre bout du spectre, on trouve, logiquement, les intérêts russes. Pourquoi Moscou, qui déploie une partie de sa flotte en Crimée, sur la mer Noire, verrait-il d’un bon œil ce port accéder au rang des infrastructures les plus compétitives de la région ? La distance qui sépare la Crimée des bases américaines est très réduite. Il reste une autre variante, celle des intérêts néerlandais : il semblerait normal qu’un Etat qui abrite un très grand port, Rotterdam, soit enclin à empêcher à tout prix le développement de la concurrence. Mais finalement le plus important devrait être le respect des intérêts stratégiques roumains, le développement du port, et ceci quel qu’en soit le gestionnaire — néerlandais, mixte, roumain. Dans un environnement commercial international particulièrement éprouvé par la crise, il n’y aura pas de place pour tout le monde. Avouons-le, certains pensent que Rotterdam n’a pas besoin de grands concurrents aux portes de l’UE, et que le développement du port de Constantza pourrait signifier, par exemple, l’acheminement des marchandises sur le Danube jusqu’en Allemagne, etc., compromettant ainsi la suprématie de Rotterdam dans le nord de l’UE. Pourtant, les signes d’amitié se multiplient entre la Compagnie nationale, “l’Administration des ports maritimes” et le port international de Rotterdam : entre les deux entités ont lieu, depuis 2010, des échanges réguliers d’expérience. Quant à la Chine, ses intérêts sont évidents : le port de Constantza a un potentiel fantastique, il peut devenir, comme on l’a souligné, le principal point d’accès vers l’Europe pour les marchandises venues de l’Asie de l’Est et du Moyen-Orient. Et la Chine investit déjà sur place. En avril dernier, fêtant les cinq ans du lancement du transport des conteneurs sur la ligne Chine-Constantza, les investisseurs chinois ont augmenté de 30 % la capacité de leurs navires. “En 2012, nos entrepreneurs ont investi 400 millions de dollars dans l’économie roumaine, dont une grande partie dans le port,” déclarait à l’époque l’ambassadrice de Pékin à Bucarest, Huo Yuzhen. Les intérêts chinois coïncident par conséquent avec les nôtres, dans le secteur du développement : plus le port est grand, mieux c’est. La Chine pourrait très bien vivre sans Constantza, mais il est évident qu’elle aimerait pouvoir disposer d’une deuxième plaquée tournante, à côté de la moitié du port du Pirée, acheté à Athènes en 2010 pour 500 millions d’euros, et qui connait déjà un développement exponentiel. En ce qui concerne la gestion des activités portuaires, les Pays-Bas et la Chine entretiennent d’excellentes relations de collaboration. Rappelons seulement que l’autorité portuaire de Rotterdam s’est engagée dans des discussions avec les responsables chinois sur une gestion commune du le port de Nangang. Le port de Hambourg se trouve sous l’autorité de la compagnie qui administre le port de Rotterdam, et qui a fait du port allemand le plus grand opérateur de marchandises en conteneurs de l’Asie vers l’Europe. Les compagnies chinoises, quant à elles, participent à la construction du terminal pétrolier du port de Rotterdam, terminal grâce auquel la Chine et d’autre pays asiatiques obtiendront l’accès au pétrole russe. Dans l’éventualité d’une acquisition, il s’agirait, en réalité, d’un partenariat sino-néerlandais. Les autorités roumaines sont confrontées à un choix stratégique délicat, et elles devraient parvenir rapidement à une décision. Si elles tiennent à ce que Bucarest joue un rôle stratégique dans cette région de l’Europe, elles devraient faire fructifier au maximum les avantages offerts par les facteurs géographiques, les capacités énergétiques, la possibilité de devenir un nœud du transport maritime et fluvial (sur le Danube, les marchandises peuvent également remonter, pas seulement descendre). Avec un seul souhait : c’est l’intérêt national qui doit primer. Auteur : Radu Magdin est journaliste et analyste économique
Posted on: Sun, 21 Jul 2013 20:33:25 +0000

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