La Bretagne pour plus de démocratie Tribune parue dans - TopicsExpress



          

La Bretagne pour plus de démocratie Tribune parue dans Ouest-France, page Bretagne, ce vendredi 29 novembre 2013. Le mouvement breton, et celui des Bonnets rouges en particulier, suscitent des analyses simplistes, contradictoires et parfois fantasmées. Ici, il serait animé par l’extrême- droite où l’extrême-gauche, là manipulé par les « régionalistes » voire les « indépendantistes », ailleurs dicté par le « grand » patronat (alors que 90 % des entreprises bretonnes sont des PME-PMI). Nombre de médias s’acharnent à trouver « un » chef et un seul. C’est qui « le » meneur ? En réalité, il s’agit d’un élan bariolé teinté de ses contradictions. La fronde des Bonnets rouges ne peut être analysée en scandant de vieilles antiennes marxistes focalisées sur la lutte des classes. Le message est précisément inverse avec des personnes confrontées à des situations économiques difficiles et qui cherchent d’autres manières d’agir pour transcender les clivages. À Quimper, toutes les classes et l’ensemble des âges (avec beaucoup de jeunes) étaient représentés, des salariés et patrons défilant coude à coude. L’attachement au « pays » était le mot d’ordre principal, avec des femmes et des hommes très inquiets pour l’avenir de leur territoire. Ce souffle est nouveau et breton. Il a d’énormes carences (Que veulentils ? Où sont les argumentaires ?). Il n’empêche qu’il met sur les planches l’immense fracture oubliée de la société française, un tabou dont on ne parle jamais et que l’on simplifie souvent par l’opposition « jacobin – girondin». « La valorisation de la diversité » D’un côté, en effet, une conception pyramidale et obsolète. Un État descendant, hypertrophié, largement déconnecté d’un univers de souplesse, de réactivité, vivifié désormais par les sèves collaboratives et les « pouvoirs latéraux » (J. Rifkin). Un système ayant fait la preuve de son incurie (aujourd’hui 2 000 milliards d’euros de dette soit… 30 000 € d’ardoise pour chaque habitant !). Une technocratie qui prône «l’indivisibilité » et « l’égalité » pour masquer les inégalités invraisemblables entre « Paris et le désert français ». Rappelons que 63 % des Français les plus riches vivent à Paris… De l’autre, Carhaix et le désert idéologique parisien ? Mobilisée comme toujours dans son histoire par l’économie, la nébuleuse bretonne demande de réelles réformes. Les Bretons sont dans l’ensemble girondins, très républicains et pragmatiques. Ils savent qu’une société qui ne produit pas de richesses tangibles n’a aucun avenir économique. Face aux pouvoirs en place souhaitant surtout que rien ne change, ronronnant dans des oppositions droite gauche obsolètes, ils en appellent à l’économie par les territoires, à l’expérimentation. Face à la pensée unique, ils demandent la valorisation de la diversité. Ils ne veulent pas « un » chef et se méfient des vieux silos dans lesquels on tente précisément de les emmurer (la droite contre la gauche, les patrons contre les salariés…). Le mouvement est intéressant. Le fondateur du Celib (Comité d’études et de liaison des intérêts bretons) Joseph Martray disait que la Bretagne, en raison de sa masse démographique et de son identité, était la seule à pouvoir faire avancer la France vers plus de démocratie. Avait-il raison ? Pour lors, le mouvement agglomère plus les inquiétudes et ne propose pas encore les solutions… La mentalité girondine peine à ouvrir les verrous d’une machine cadenassée. Toutefois, la France ne s’en sortira que par l’affirmation de plusieurs points forts et non d’un seul. Le mouvement breton doit désormais construire. Par des actions très concrètes créatrices de valeurs collectives, il peut initier l’élan d’un autre mode d’avancement. Jean OLLIVRO. Jean Ollivro est géographe à l’université de Rennes 2, auteur de plusieurs ouvrages sur la Bretagne et l’aménagement des territoires.
Posted on: Fri, 29 Nov 2013 12:41:08 +0000

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