Le phénomène dans son ensemble est sans doute très difficile à - TopicsExpress



          

Le phénomène dans son ensemble est sans doute très difficile à expliquer,ce contexte cabalistique hétérodoxe apparaissant donc perméable à des influences dorigines extra-judaïque. Dans ce cas précis,on peut seulement dire que cette « Cabale hérétique » dont parle Scholem,avait incorporé,fût ce par des voies mystérieuses,des techniques et enseignements étrangers au judaïsme,et ce bien avant lapparition de Sabbataï Tsevi. La doctrine même de la dispersion et de la récupération des étincelles de lumière (thème qui ne peut prendre que trop facilement,pour certains esprits,des aspects déconcertants),si importante dans le système dIsaac Louria,nest autre quune énième version des enseignements du manichéisme classique.On peut en dire autant de la théorie du guilgoul,de la « révolution des âmes »,connue dans les groupes extrémistes islamiques sous le nom de tanasukh (282),qui est elle aussi dorigine nettement gnostico-manichéenne. Dans la Cabale en particulier,cette transmigration,sous les formes où elle fut conçue,présenta une extraordinaire ressemblance avec la même croyance professée par les druzes,et plus encore avec celle en vogue chez les Nusayrîs. Ces derniers se considèrent comme des étoiles tombées à cause de certains péchés,mais qui seront réintégrées au ciel en tant quétoiles au terme de leurs vicissitudes cycliques (283). On constate sans peine la présence dans cette dernière affirmation de curieux échos du mythe de la « chute des anges »,thème qui,développé à fond,pourrait conduire à de bien curieuses conclusions (284). La croyance à lincarnation de la divinité,telle quelle est apparue dans les enseignements du messianisme juif hétérodoxe,est sans doute beaucoup plus proche des convictions des ghulat (sectes extrémistes) chiites que du dogme chrétien. Lincarnation de Dieu,censée sêtre produite successivement en Sabbataï,Barouchia et Jakob Frank,ressemble beaucoup aux thèses soutenues par de nombreux partisans du calife Alî,comme les Alevi turcs par exemple,sur leur aimmat (pluriel dimâm ou guide spirituel). La justification par Nathan de Gaza des actions « étranges » de Sabbataï Tsevi rappelle en fait lexégèse en vigueur parmi les druzes pour expliquer le comportement déconcertant du troisième calife fâtimide al Hâkim bi-amril-lâhi (996- 1021),devenu pour eux lincarnation absolue de Dieu et,comme tel,identifié entre autres au « Messie » (285). La pratique systématique de la dissimulation – technique dinfiltration liée au marranisme volontaire que Jakob Frank,sous la dénomination de « faix du silence » (massaduma),portera à une perfection raffinée -,nest autre que la taqîyya commune à tous les « bâtinites » (sectaires qui se tiennent au prétendu sens « ésotérique » de lenseignement religieux) et à leurs héritiers. Cet art habile de linvisibilité,du « voir sans être vu (seeing without being seen) (286) » - qui avait chez les druzes principalement le sens de « protection » (hifz) et qui était donc conçu avant tout comme une défense – prendra dans le frankisme le caractère dune stratégie offensive,par laquelle ses « soldats » sapprêteront à accomplir leur dangereuse mission en territoire ennemi (287).
Posted on: Wed, 06 Nov 2013 13:12:26 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015