Le père de famille n’a pas pour seule tâche dans la maison de - TopicsExpress



          

Le père de famille n’a pas pour seule tâche dans la maison de remplir, comme on dit, le grenier et le berceau, mais il doit bien davantage veiller et faire attention à tout, observer et contrôler toute compagnie, examiner tous les comportements, à la maison et au-dehors ; pour chaque membre de la famille, il doit corriger et amender tout usage qui ne serait pas bon par des paroles de raison plutôt que par des paroles de courroux ; il doit user de l’autorité plutôt que de l’empire, montrer que, quand cela est opportun, il conseille plus qu’il n’ordonne ; il doit aussi être sévère, inflexible et intraitable quand il le faut vraiment, et avoir toujours à l’esprit le bien, la quiétude et la tranquillité de sa famille tout entière, presque comme un astre vers lequel tourner tout son entendement et toute sa réflexion afin de bien guider toute sa famille avec vertu et louange ; il doit savoir naviguer avec la brise, avec cette vague de la faveur populaire et du crédit de ses concitoyens, jusqu’au port de l’honneur, de la considération et de l’autorité, et là savoir jeter l’ancre, carguer et retendre les voiles selon le temps, et dans les tempêtes – telles ces bourrasques et ces misérables naufrages que subit injustement notre famille depuis déjà vingt-deux ans –, se consacrer à gouverner l’esprit des jeunes, ne pas les laisser s’abandonner aux assauts de la fortune, ne pas souffrir qu’ils restent à terre s’ils sont tombés, et ne jamais leur permettre de tenter quelque entreprise téméraire et folle, soit pour se venger, soit pour suivre quelque opinion juvénile et légère ; et dans la tranquillité et la bonace de la fortune, et plus encore pendant les périodes de tempête, il ne doit jamais quitter le gouvernail de la raison et de la règle de vie, être en éveil, prévoir longtemps à l’avance toute brume d’envie, tout nuage de haine, tout éclair d’inimitié sur le front de ses concitoyens, et tout vent contraire, tout écueil et tout danger auxquels la famille pourrait se heurter d’une manière ou d’une autre ; il doit être en cela un nocher expert et parfaitement exercé, garder à l’esprit les vents avec lesquels les autres ont navigué, et avec quelles voiles, et de quelle façon ils ont aperçu et évité chaque danger ; et il ne doit pas oublier que, dans notre ville, jamais personne ne put déployer toutes ses voiles, même si elles n’étaient pas excessivement grandes, et les retirer entières, sans qu’elles fussent largement détériorées et déchirées. Et ainsi, le père saura qu’il y a plus de dommage à mal naviguer une seule fois qu’il n’y a d’utilité à se mettre mille fois à l’abri. Les envies se dissipent là où resplendit non la pompe, mais la mesure ; la haine s’atténue là où grandit non la hauteur mais l’affabilité ; l’inimitié faiblit et s’éteint là où l’on s’arme et se fortifie non de courroux et d’irritation, mais d’humanité et de bienveillance. Les aînés des familles doivent ouvrir leurs yeux et leur intelligence à tout cela, tendre leur pensée et leur esprit, être parés de tous côtés, et prompts à prévoir et à connaître l’ensemble des choses, à supporter la peine et l’inquiétude, à déployer un soin et une diligence très grands pour rendre de jour en jour la jeunesse plus honnête, plus vertueuse, et plus appréciée de nos concitoyens.
Posted on: Fri, 21 Jun 2013 13:43:27 +0000

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