Mort de H’akam lOmeyyade Andalous et avènement de son fils - TopicsExpress



          

Mort de H’akam lOmeyyade Andalous et avènement de son fils Hichâm En 366 (29 août 976) mourut, à l’âge de soixante-trois ans et sept mois, après un règne de quinze ans et cinq mois, El-H’akam ben ‘Abd er-Rah’mân ben Mohammed ben ‘Abd Allah [P. 498] ben Mohammed ben ‘Abd er-Rah’mân el-Mostançir billâh, prince Omeyyade d’Espagne. C’était un homme corpulent, roux, à la voix forte, aux grands yeux noirs, au nez aquilin et aux mâchoires inégales. Ami des gens de science, il était lui-même savant, au courant des décisions juridiques des diverses écoles, versé dans la généalogie et dans l’histoire, collectionneur de livres ; il appelait auprès de lui les savants des pays éloignés, les comblant de bienfaits et d’honneurs pour profiter de leurs connaissances. À sa mort et conformément à ses décisions, il fut remplacé par son fils Hichâm, alors âgé de dix ans, et qui fut surnommé El-Mo’ayyed billâh. Au cours des troubles qui agitèrent le règne du nouveau prince, il fut emprisonné, mais recouvra ensuite son pouvoir dans les circonstances que voici. Ses premiers ministres (h’âdjib) furent El-Mançoûr Aboû ‘Amir Mohammed ben Aboû ‘Amir Ma’âfiri et les deux fils d’El-Mançoûr, El-Moz’affêr et En-Nâçir. Dès qu’il fut arrivé au ministère, El-Mançoûr séquestra son maître, ne le laissant ni voir ni approcher de personne, et ce fut lui qui gouverna tout, mais de manière à s’attirer l’approbation générale, car il pratiquait la justice et le succès couronnait ses entreprises. Il fit la guerre aux infidèles, sur qui il fit de nombreuses conquêtes, et remplit l’Espagne de butin et d’esclaves. C’est de ces derniers qu’il composa principalement les troupes du djond, tels par exemple Wûd’ih’ et autres héros connus, que l’on dénommait ‘Amirides. Pendant les vingt-six ans que Dieu lui permit d’occuper cette situation, il fit cinquante-deux expéditions, tant d’été que d’hiver, et mourut en 392 (19 nov. 1001). C’était un homme résolu, ferme dans ses propos, très juste, très généreux et bon administrateur. Voici un de ses exploits. Menant une expédition contre les Francs, il avait franchi le Passage (ed-derb), qui est un défilé entre deux montagnes, et s’était avancé dans le pays ennemi pour y semer la dévastation et y chercher du butin et des captifs ; mais à son retour il trouva le Passage barré par les chrétiens, qui le dominaient et en défendaient l’entrée. Il feignit alors de vouloir s’installer définitivement : ses soldats se mirent à construire des habitations, à semer, à chercher du bois, de la paille, des provisions de bouche et tout ce qui était nécessaire. La vue de ces préparatifs fit pencher les chrétiens à une transaction, et ils lui offrirent de le laisser passer moyennant abandon de son butin. Comme il déclara vouloir ne pas s’en aller, ils renoncèrent à réclamer le butin ; mais cela ne le satisfit pas encore, et alors ils lui offrirent une somme d’argent et des bêtes de charge [P. 499] pour emmener les dépouilles qu’il traînait avec lui. À ce prix, il consentit à traiter et à franchir le Passage pour rentrer en pays musulman. Originaire d’Algésiras, il se rendit dans sa jeunesse à. Cordoue pour y étudier et s’occuper de littérature et de l’étude des traditions (h’adit’), choses où il réussit très bien. Il entra ensuite au service de Çobh’,[61] mère d’El-Mo’ayyed, auprès de laquelle il avait beaucoup d’influence. Comme, à la mort d’El-H’akam Mostancer, Mo’ayyed était tout jeune, on pouvait craindre des difficultés ; mais El-Mançoûr rassura Çobh’ et garantit la tranquillité du pays. Son énergie fut favorisée par la fortune et aidée par les sommes d’argent qu’il reçut de cette femme[62] et qu’il employa à se concilier les troupes, de sorte que tout marcha très bien. Sa mère était Temîmite et son père Ma’àferile, c’est-à-dire appartenait à une fraction des H’iinyar. Quand la mort le frappa, il eut pour successeur dans ses fonctions son fils ‘Abd el-Melik, surnommé Moz’affer, qui marcha sur les traces de son père et mourut au bout de sept ans, en 399 (4 sept. 1008). Il périt empoisonné par son frère ‘Abd er-Rah’mân, qui coupa en deux une pomme à l’aide d’un couteau empoisonné sur un des côtés de la lame, et mangea la moitié saine, tandis que Moz’affer, sans défiance, reçut la moitié empoisonnée.[63] ‘Abd er-Rah’mân, surnommé Nâçir, prit la place de sa victime, mais ne marcha ni sur ses traces ni sur celles de leur père ; il s’adonna au libertinage, au vin et aux plaisirs. Grâce à la crainte qu’il fit inspirer à Mo’ayyed s’il n’était pas déclaré héritier présomptif, il sut obtenir cette désignation, ce qui excita encore la haine du peuple et des Omeyyades contre lui ; on sema la désaffection, on s’agita contre lui si bien qu’il y périt. Il avait entrepris une campagne d’hiver et s’était avancé en Galice ; mais le roi de ce pays, sans lui faire face, se tint sur les sommets des montagnes, où ‘Abd er-Rah’mân ne pouvait le poursuivre par suite du débordement des rivières et de l’abondance de la neige. Il se contenta de ravager la partie qu’il occupait et en sortit sans dommage. Mais en revenant il apprit que Mohammed ben-Hichâm ben ’Abd el-Djebbâr ben Nâçir li-dîn Allah s’était révolté à Cordoue, dont il s’était rendu maître, et avait emprisonné Mo’ayyed. Alors, abandonné de ses troupes et ne gardant plus que ses intimes, il se dirigea vers Cordoue pour tâcher d’y arranger les choses. Mais des troupes de Mohammed ben Hichâm se portèrent au-devant de lui et le mirent à mort en 399 (4 sept. 1008) ; on emporta sa tête à Cordoue et on la promena dans les rues, puis le cadavre fut crucifié. [P. 500] Soulèvement de Mohammed ben Hichâm à Cordoue En 399, le dernier jour de djomâda II (28 févr. 1009), se révolta à Cordoue Mohammed ben Hichâm ben ‘Abd el-Djebbâr ben ‘Abd er-Rah’mân Nâçir li-dîn Allah l’Omeyyade accompagné de douze partisans. Il fut reconnu par le peuple et, sous le surnom de El-Mahdi billâh, gouverna la ville. Il se saisit de Mo’ayyed et le détint au palais près de lui ; puis il le fit sortir et cacher, en répandant le bruit qu’il était mort. En effet, en cha’bân de cette année (avril 1009), il exhiba au peuple le cadavre d’un chrétien qui avait de la ressemblance avec Mo’ayyed et qu’il donna comme étant ce dernier. Cette assertion ne souleva aucun doute, et le mort, après avoir reçu les dernières prières, fut enterré en cimetière musulman. Plus tard, Mahdi voulut faire croire autre chose, ce que nous raconterons, et se donna un démenti à lui-même. Cette première partie du règne de Mo’ayyed, jusqu’à son emprisonnement, dura trente-trois ans et quatre mois. On se mit alors à lancer diverses accusations contre Ibn ‘Abd el-Djebbâr, par exemple de fabriquer du vin (nebîdh) dans son palais, ce qui lui valut l’épithète de « marchand de vin », d’avoir fait périr Mo’ayyed, de se montrer menteur et hypocrite, d’exciter la haine des Berbères, et le résultat fut que le cœur du peuple se détourna de lui.[64] Révolte de Hichâm ben Soleymân N’éprouvant plus que de la répulsion pour Ibn ‘Abd el-Djebbâr, les Espagnols tirèrent de sa demeure et proclamèrent Hichâm ben Soleymân ben ‘Abd erRah’mân en-Nâçir li-dîn Allah, le 26 chawwâl 399 (22 juin 1009). Ce prince prit le surnom de Réchîd. Les révoltés se rassemblèrent sous les murs de Cordoue et assiégèrent Ibn ‘Abd el-Djebbâr, avec qui furent engagées d’activés négociations pour l’amener à abdiquer sous la promesse que leur vie, à lui, à sa famille et à tous ses partisans, serait respectée. Mais ce prince fit avec les siens une sortie où il mit en fuite les assiégeants ; Hichâm lui-même fut fait prisonnier, et son oncle le fit mettre à mort avec plusieurs de ses officiers, de sorte que le pouvoir du vainqueur se trouva raffermi. Autre révolte tentée par Soleymân À la suite de l’exécution de Hichâm ben Soleymân et de la déroute de ses partisans, [P. 501] Soleymân ben el-H’akam ben Soleymân ben Nâçir, qui était neveu du défunt et figurait parmi les vaincus, fut reconnu, deux jours après la bataille, par ceux qui avaient soutenu son oncle et qui étaient en majorité Berbères. On lui donna le surnom d’El-Mosta’în billâh, mais ensuite il prit celui d’Ez-Z’âhir billâh. Les révoltés allèrent trouver les chrétiens et conclurent la paix avec eux, puis avec leur aide, qu’ils avaient sollicitée, ils marchèrent contre Cordoue et livrèrent à Ibn ‘Abd el-Djebbâr la célèbre bataille de K’anlîdj (Canlich), où le nombre des morts et la quantité de butin furent énormes.[65] Ibn ‘Abd el Djebbâr, vaincu, se renferma dans le palais de Cordoue, où Soleymân alla l’assiéger. Dans cette situation désespérée, Ibn ‘Abd el-Djebbâr tira Mo’ayyed de sa prison, dans l’espoir que son adversaire aussi bien que lui-même seraient déposés, et que ce prince recouvrerait le pouvoir ; mais on croyait Mo’ayyed mort, et l’on refusa d’ajouter foi à cette affirmation. Renonçant à tout espoir, il parvint à fuir secrètement et se tint caché. En chawwâl 400 (17 mai 1010), Soleymân pénétra dans le palais, où le peuple vint le reconnaître comme khalife. Il séjourna à Cordoue pendant quelques jours. Il y eut à K’antidj environ trente-cinq mille tués. Les Berbères et les chrétiens firent à Cordoue un nombre considérable de captifs et en tirèrent un grand butin. Restauration d’Ibn ‘Abd el-Djebbâr, qui est ensuite tué et remplacé par El-Mo’ayyed Ibn ‘Abd el-Djebbâr gagna secrètement Tolède, où il fut rejoint par Wâd’ih’ le chef ‘âmiride et ses soldats. Les chrétiens[66] s’étant aussi unis à eux, il marcha avec toutes ces troupes contre Cordoue. Près d’Ak’abat el-Bak’ar,[67] une sanglante bataille eut lieu entre lui et Soleymân, qui s’était porté à sa rencontre, le 15 chawwâl 400 (31 mai 1010). Soleymân, battu, se replia sur Xativa ; son adversaire entra à Cordoue, où il se fit de nouveau prêter serment de fidélité, nomma Wâd’ih’ premier ministre et gouverna à sa guise. Mais ensuite un certain nombre de soldats ‘âmirides, qui avaient suivi Soleymân et parmi lesquels figuraient ’Anbar et Kheyroûn,[68] firent demander à Ibn ‘Abd el-Djebbâr de recevoir leur soumission et de les reprendre à son service. Cette demande, qui fut accueillie, n’était qu’une feinte de leur part à l’effet de tuer ce prince. Dès qu’ils furent installés à Cordoue, ils gagnèrent Wâd’ih’ à leur projet et le 9 dhoû’l-hiddja [P. 502] 400 (23 juillet 1010) ils se réunirent dans le palais, dont ils s’emparèrent, ainsi que de la personne du prince. Mo’ayyed délivré fut installé sur le trône et reçut leur serment de fidélité. Ibn ‘Abd el-Djebbâr lui fut ensuite amené, et après qu’on lui eut reproché tous ses torts, il fut mis à mort ; sa tête fut promenée dans les rues de Cordoue. Il était né d’une concubine et avait alors 33 ans. Le récit de ces événements devait venir plus loin ; nous l’avons donné ici à cause de leur connexité et parce que ces divers incidents se sont passés trop rapidement pour qu’on puisse les reprendre plus tard et isolément. [P. 510] En 367 (18 août 977) on vit en Ifrîkiyya, dans la région nord-est du ciel, une rougeur semblable à une langue de feu ; le peuple se précipita au dehors en priant Dieu avec ferveur. À Mehdiyya se produisirent des tremblements de terre et d’autres phénomènes qui durèrent quarante jours, si bien que la population abandonna ses demeures et leur contenu.[69] En cette même année, El-’Aziz, le prince alide d’Egypte et d’Ifrîkiyya, donna pour chef aux pèlerins qui se rendaient à la Mekke, où la khotba se faisait en son nom, Bûdîs ben Zîri, frère de Yoûsof Bologgîn, lequel était lieutenant du prince en Ifrîkiyya. À son arrivée à la Mekke, Bâdîs reçut la visite des voleurs de cette ville, qui lui offrirent un versement de 50.000 dirhems, moyen nant quoi il les laisserait librement opérer pendant la durée des fêtes. « J’y consens, dit l’émir, mais amenez-moi tous vos compagnons pour que le traité soit conclu avec toute la bande ». La chose fut ainsi entendue, et plus de trente individus se trouvèrent ainsi réunis. Sur la demande de Bâdîs s’il ne manquait personne, ils jurèrent que tout le monde avait répondu à l’appel, et il leur fit alors couper les mains à tous. Émigration de Çanhâdjites en Espagne ; ce qu’ils y firent En 373 (14 juin 983), les enfants de Zîri ben Mennâd, savoir Zâwi, Djelûla et Mâksen, frères de Bologgîn, passèrent en Espagne. Ces princes avaient fait la guerre contre leur frère H’ammâd à propos de territoires contestés, mais comme ils avaient eu le dessous, ils s’étaient retirés à Tanger, puis de là à Cordoue. Mohammed ben Aboû ‘Amir, enchanté, les accueillit avec honneur et leur attribua des pensions ; ils répondirent à sa demande touchant le motif de leur émigration par le récit des faits, ajoutant qu’ils étaient venus à lui de préférence, afin de se livrer en sa compagnie à la guerre sainte. Il approuva fort cette réponse et leur fit des promesses et des cadeaux. Au bout de peu de temps, les nouveau-venus réclamèrent de lui l’exécution de sa promesse de campagne, et comme il leur permettait de choisir ceux qu’ils voudraient dans les troupes du djond, ils répondirent qu’ils ne voulaient pénétrer en pays ennemi qu’avec leurs cousins, les Çanhâdja et leurs clients. Le prince leur fournit des chevaux, des armes et les ressources nécessaires, ainsi qu’un guide, et ils pénétrèrent en Galice par une route étroite. À la nuit ils dressèrent une embuscade dans un jardin proche de la ville, tuèrent les habitants de ce lieu et en coupèrent les arbres. Puis, au matin, une troupe qui sortit de la ville fut attaquée par eux et mise tout entière à mort. Comme après cela ils se retiraient, les ennemis, qui s’étaient redit la chose, montèrent à cheval pour les poursuivre ; mais les musulmans, s’en étant aperçus, se cachèrent à l’abri d’une colline, et sitôt qu’ils se virent dépassés ils tombèrent par derrière sur ceux qui les poursuivaient, tout en poussant le cri Allah Akbar. Ces clameurs les firent croire plus nombreux qu’ils n’étaient, et les chrétiens s’enfuirent poursuivis par les Çanhâdja, qui en tuèrent beaucoup et rentrèrent à Cordoue après s’être emparés de leurs montures et de leurs armes. Cet exploit fit impression sur Ibn Aboû ‘Amir, qui n’avait jamais vu dans l’armée espagnole pareil trait de bravoure ; aussi les traita-t-il bien et fit-il d’eux ses amis. Expédition d’Ibn Aboû ‘Amir contre les Chrétiens d’Espagne Cet exploit des Çanhâdja excita la jalousie des Espagnols, qui déclarèrent à Mançoûrben Aboû ‘Amir qu’ils voulaient, eux aussi, faire la guerre sainte, et ce prince réunit à cet effet [P. 24] des troupes nombreuses et tirées de partout. Or, il eut à cette époque un rêve où il se vit recevant et mangeant une asperge que lui tendait un homme. ‘Ali ben Aboû Djom’a[71] le lui interpréta en ces termes : « Dirige-foi contre le royaume de Léon (Elyoûn) que lu conquerras. — Et où vois-tu cela ? — Parce que l’asperge se nomme en Orient Hâlyoûn et que l’homme de ton rêve t’a dit Hâlyoûn ». Ce fut donc de ce côté qu’il se dirigea, et il alla assiéger la capitale, qui compte parmi les plus grandes villes des chrétiens. Les Francs répondirent à la demande de secours que leur adressèrent les habitants par l’envoi de nombreuses troupes ; on se battait nuit et jour et les assiégés subirent de nombreuses pertes, tandis que les Çanhâdja opposaient une endurance remarquable.[72] Ensuite un Comte franc, qui n’avait pas son pareil parmi eux, vint parader devant nos lignes et provoquer à un combat singulier. Djelâla ben Zîri le Çanhâdjite accepta le défi, et les deux adversaires se chargèrent : le Franc lança un coup de pointe que Djelâla évita et auquel il répondit par un coup de sabre qui trancha l’épaule du Franc et le jeta par terre. L’armée chrétienne fut alors attaquée par les nôtres et s’enfuit en désordre, subissant des pertes innombrables, entre autres celle du prince de cette ville.[73] Ibn Aboû ‘Amir fit un butin plus considérable qu’on n’avait jamais vu et emmena trente mille captifs. Par son ordre les cadavres furent amoncelés et l’appel à la prière du soir fut proclamé (du haut de ce minaret improvisé). La ville de K’âmoûna[74] fut détruite, et il rentra sain et sauf avec ses troupes. Curieux événement arrivé en Espagne [P. 791 En 385 (4 février 995), El-Mançoûr Mohammed ben Aboû ‘Amir, qui gouvernait l’Espagne [P. 80] au nom de Hichâm el-Mo’ayyed, dirigea contre le pays franc une expédition qui fut poussée fort loin et qui procura un butin considérable. Parmi les prisonniers figura le roi Garcia, qui complaît parmi les plus grands et les plus forts, et était lui-même fils de Sancho. Or, le sort voulut qu’un poète, Aboû’l-’Alà Çâ’id ben H’asan Rab’i, venu de Mawçel auprès de Mançoûr et qui chantait ses louanges depuis quelque temps déjà, envoyât à ce prince un cerf en même temps que des vers parmi lesquels ceux-ci : [Kâmil] O sauvegarde des gens effrayés, sécurité des fuyards, redresseur des abaissés ! Tes dons vont à ceux qui en sont dignes, tes bienfaits s’adressent à quiconque espère en toi. Et plus loin on lit encore : Seigneur, toi qui réjouis mon exil, qui m’as retiré des griffes de l’adversité et sauvé de la prison, l’esclave que tu as arraché à la misère et comblé de bienfaits l’amène ce cerf ! Je l’ai nommé Garcia et je l’amène, la corde, au cou, dans l’espoir que mon pronostic se vérifiera. Daigne l’accepter, et ce sera pour moi le plus beau cadeau que je puisse recevoir de mon bienfaiteur ! Or le poète avait donné au cerf le nom de Garcia, dans l’intention de pronostiquer la prise du prince de ce nom, laquelle eut lieu le jour même de l’envoi, ce qui constitue une concordance des plus curieuses.[87] Mort d’El-Mançoûr ben Aboû ‘Amir En 393 (9 nov. 1002) mourut Aboû ‘Amir Mohammed ben Aboû ‘Amir Ma’âfiri, surnommé el-Mançoûr (Almanzor), qui gouverna l’Espagne du temps d’El-Mo’ayyed Hichâm ben H’akam et dont il a été parlé à propos de ce dernier prince. Originaire d’une famille bien connue d’Algésiras, [P. 125] il se rendit à Cordoue pour y étudier. Il avait de l’ambition et s’attacha à la mère d’El-Mo’ayyed du vivant même d’El-Mostançir, père de ce dernier. Quand Hichâm encore mineur monta sur le trône, El-Mançoûr s’engagea vis-à-vis de la princesse à administrer au nom du jeune homme, à réprimer les troubles qui s’élevaient et à lui assurer le pouvoir, et elle lui abandonna les affaires de son fils. C’était un homme habile, brave, énergique, bon politique, qui se concilia les troupes par les bienfaits qu’il répandit sur elles. Sous le surnom d’El-Mançoûr, il ne cessa de lancer des expéditions soit contre les Francs, soit contre d’autres, et le royaume lui-même resta dans un calme que ne troublait aucune sédition. Savant lui-même, il aimait les savants, les fréquentait et discutait avec eux ; aussi ont-ils maintes fois mentionné ses mérites et écrit bien des livres à ce sujet. Il dirigeait une incursion contre les chrétiens quand il tomba malade, mais il continua sa route, pénétra chez l’ennemi et y remporta des avantages ; alors seulement il songea à revenir, mais son état était grave, et il mourut à Medina-Celi. Il avait fait recueillir la poussière dont sa cuirasse se couvrait quand il faisait la guerre sainte, et par ses ordres, elle fut placée dans son linceul pour s’attirer ainsi la bénédiction divine. Sa foi et ses mœurs étaient pures ; il pratiquait la justice, de sorte que son règne parut être une période de fête, grâce à l’éclat qu’il jeta et au calme dont jouit le peuple. Il est aussi auteur de très bons vers. Sa mère était Temîmite. Il eut pour successeur son fils Moz’affer Aboû Merwân ‘Abd el-Melik, qui marcha sur les traces de son père. El-Mo’ayyed ressaisit le gouvernement de l’Espagne [P. 152] Nous avons raconté la déposition et l’emprisonnement de ce prince, qui s’appelait Hichâm ben El-H’akam ben ‘Abd er-Rah’mân en-Nâçir. Le 9 dhoû‘l-hiddja 400 (23 juill. 1010), il fut replacé sur le trône pour une nouvelle période pendant laquelle Wâd’ih’ l’Amiride exerça le pouvoir. Ce chef présenta les Cordouans à El-Mo’ayyed, qui leur fit des promesses et écrivit aux Berbères partisans de Soleymân ben H’akam ben Soleymân ben ‘Abd er-Rah’mân en-Nâcir pour leur demander de le reconnaître. Mais comme il n’obtint même pas de réponse, il ordonna à ses troupes et aux Cordouans de se tenir sur leurs gardes. Le peuple d’ailleurs le prit en affection.[96] Une dénonciation lui ayant appris que quelques Omeyyades de Cordoue s’étaient mis d’accord avec Soleymân pour livrer la ville à celui-ci le 27 dhoû‘l-hiddja, il fit saisir et emprisonner les conjurés. Au jour convenu, les Berbères se présentèrent devant Cordoue ; mais les soldats et la population conduits par Mo’ayyed marchèrent contre eux, ce qui fit faire volte-face aux Berbères. Les troupes se mirent à leur poursuite, mais sans pouvoir les joindre. Divers messages furent échangés entre les deux parties, mais rien ne fut conclu. Alors Soleymân et les Berbères demandèrent du secours au roi des Francs en s’engageant à lui livrer des forteresses conquises sur les chrétiens par Mançoûr ben Aboû ’Amir Ce roi informa Mo’ayyed des offres qui lui étaient faites, et promit de refuser tout secours à Soleymân si ces places-fortes lui étaient rendues. D’après l’avis favorable des Cordouans, qui furent consultés à ce sujet et qui redoutaient l’alliance des chrétiens avec Soleymân, la paix fut conclue sur ces bases en moharrem 401 (août-sept. 1010). Quand les Berbères virent qu’il ne fallait plus compter sur l’aide des Francs, ils vinrent camper proche de Cordoue en çafar 401 (sept.-oct. 1010), et leur cavalerie fit çà et là des incursions qui ruinaient ce territoire. Mo’ayyed et Wâdih’ installèrent un rempart et un fossé en avant de la grande enceinte de Cordoue, et Soleymân entreprit le siège de la ville ; mais au bout de quarante cinq jours il n’avait pas obtenu de résultat, et il alla assiéger Zahrâ, contre les habitants de qui il combattit trois jours. Alors un officier livra la porte qu’il était chargé de garder, ce qui permit aux Berbères d’arriver aux remparts et d’enchâsser les défenseurs ; une fois la ville prise, la plupart des soldats qui s’y trouvaient, furent tués. Les habitants se réfugièrent sur la montagne, et des hommes s’enfermèrent dans la mosquée, où les Berbères les égorgèrent, femmes et enfants compris ; puis ils mirent le feu à cet édifice, aussi bien qu’au palais et aux maisons, dont la plupart furent brûlées, en même temps que tout était mis au pillage. Wâdih informa alors Soleymân de son intention de quitter Cordoue en secret, lui conseillant de reprendre à ce moment le siège de la ville ; mais Mo’ayyed, qui eut vent de la chose, fit mettre le traître à mort. Cordoue était réduite à la plus triste situation : les vivres manquaient et la mort faisait de cruels ravages. Au dehors, les Berbères avaient moins de vivres encore, tant ils avaient ravagé les campagnes. Les Cordouans émigraient et Mo’ayyed punissait de mort quiconque penchait pour Soleymân. Celui-ci et ses Berbères poussaient le siège vigoureusement et serraient les habitants de très près. Au cours de cette période, ‘Obeyd Allah ben Mohammed ben ‘Abd el-Djebbâr se révolta à Tolède et fut reconnu par les habitants de cette ville. Mais une armée que Mo’ayyed envoya contre eux les ramena à l’obéissance, et le rebelle fut fait prisonnier et mis à mort en cha’bân 401 (9 mars 1011). Dans un certain combat, les Cordouans infligèrent aux Berbères des pertes sérieuses, tant en tués qu’en individus noyés dans le fleuve. Les assaillants s’éloignèrent alors de Cordoue et allèrent assiéger Séville ; mais une armée envoyée par Mo’ayyed protégea celle-ci et les força à se retirer. [P. 154] Soleymân sollicita et obtint l’adhésion du lieutenant de Mo’ayyed à Saragosse et autres lieux. Quand il fut repoussé de Séville, il alla attaquer et piller Calatrava, où il s’installa avec les siens. Il recommença ensuite le siège de Cordoue, d’où la faim et la peur avaient fait sortir nombre d’habitants et de soldats ; il poussa vigoureusement la lutte et finit par se rendre maître de vive force de la ville. On tua tous ceux qu’on trouva dans les rues, on pilla les habitations et on y mit le feu. Le nombre des victimes fut innombrable. Les Berbères s’installèrent dans les maisons qui avaient échappé à l’incendie, et les Cordouans virent des choses inouïes. L’entrée de Soleymân à Cordoue eut lieu à la michawwâl 403 (29 avril 1013), et on lui prêta serment de fidélité. Mo’ayyed tiré du palais lui fut amené. On raconte bien des choses sur ce qui se passa entre eux, puis les partisans de Mo’ayyed se retirèrent (?) dans l’Espagne orientale.[97] Parmi les victimes innocentes de ce siège, figure Aboû‘l-Welîd [‘Abd Allah ben Mohammed] ben el-Farad’i.[98] [P. 170] Soleymân remonte une seconde fois sur le trône en Espagne En 403, à la mi-chawwâl (14 mai 1012), Soleymân ben El-H’akam ben Soleymân ben ‘Abd er-Rah’mân Nâçir l’Omeyyade, surnommé Mosta’în, remonta pour la seconde fois sur le trône, comme il a été dit sous l’an 400, et on lui prêta serment de fidélité. Les Cordouans se portèrent à sa rencontre pour le saluer, et alors il répéta ces vers proverbiaux : [Tâwîl] « En me voyant apparaître pour la seconde fois et bien qu’ils me connaissent, ils demandent qui je suis ; ils m’accablent de souhaits de bienvenue et de prospérité, mais ils m’auraient tué s’ils m’avaient eu un moment en leur pouvoir[99] ». Sous le règne de Soleymân, qui était lettré, poète et éloquent, des flots de sang furent versés, ainsi qu’il a été dit sous l’an 400. Les Berbères étaient alors les véritables maîtres, et comme ils constituaient la majorité de son armée, il ne pouvait rien contre eux ; il a été dit d’ailleurs que ce sont eux qui le soutinrent et qui le mirent ensuite sur le trône. En 403 (22 juill. 1012), Aboû’l-Welîd ‘Abd Allah ben Mohammed, dit Ibn el-Farad’i Andalosi, fut tué à Cordoue par des vils Berbères.
Posted on: Thu, 28 Nov 2013 03:34:27 +0000

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