Relation des voyages à la côte occidentale dAfrique dAlvise de - TopicsExpress



          

Relation des voyages à la côte occidentale dAfrique dAlvise de Ca da Mosto, 1455-1457 Du royaume de Senega et de ses confins. \E païs de ces Noirs sur le fleuve de Senega est le premier royaume des Noirs de la basse Ethiopie, et les peuples qui habitent aux rivages diceluy, sappellent Giloses . Toute la côte et cette région dont nous avons cy dessus fait mention, consiste tout en plat païs jusques à ce fleuve, et par delà encore ; tant quon parvient à cap Verd, qui est païs relevé et le plus hault qui soit en toute la côte, I . Il faut lire Gilofes, au lieu de Giloses, leçon fautive que Ton trouve dans les éditions italiennes, latine et française de Ca da Mosto. Les Gilofes, Yolofs ou Accolofs, habitent la basse Sénégambie. La contrée dans laquelle ils sont fixés sétend au nord jusquau fleuve du Sénégal, qui les sépare des Arabes du Sahara ; au sud elle a pour limite le pays occupé par les peuples établis sur les rives de la Gambie. Locéan Atlantique baigne à louest leur pays, qui est limi- trophe à lest du Toro et du Fouta Sénégalais. cest à savoyr quatre cens milles plus outre quiceluy cap. Et selon ce que jay peu entendre, ce royaume de Senega confine du coté de Levant avec un pais i nommé Tuchusor , devers Midy, avec le royaume de Gambra, de la partie de Ponant, avec la mer Oceane, et du coté de Tramontane, se joint avec le fleuve sus- nommé, qui sépare les Bazanés davec ces premiers Noirs. I. Le mot de Tuchusor, quon lit dans toutes les éditions, doit être corrigé en Tuchulor, mot que nous avons changé en celui de Toucou- leurs ou Toucoulor. Les Toucoulors, dont le nom ne dérive pas, comme on Ta prétendu, des deux mots anglais two colours, sont fixés sur la bande de terrain qui sétend sur la rive gauche du Sé- négal, du Oualo au Galam. En quelle manière Von procède à la création des roys de Senega, et comment ils se maintiennent en leur état. u temps que jarrivay en ces parties là, le roy de Senega se nommoyt Zucholin, qui pou- vo}^ avoir ataint la vingt et deuxième année de son aage ; et ne peut on parvenir à la succession de ce royaume comme par droit héréditaire. Mais en ice- luy se trouvent plusieurs seigneurs, lesquels quelque- foys eguillonnés par jalousie de leurs domaines, se rangent troys ou quatre ensemble, et créent un roy selon leur fantaisie, lelisans de noble race, entre les mains duquel le gouvernement demeure tant quil plait à iceux seigneurs ly maintenir, et selon le bon traite- ment quil use à leur endroit; mais, le plus souvent, ils lexpulsent et chassent par force. Combien quil sen trouve daucuns, qui, après avoyr été constitués roys, augmentent tellement leurs forces et se rendent si puissans, quils ont le moyen deux défendre contre tous ceux qui se declairent autres que leurs amis. Tant y a, que le domaine nest pas stable, ny asseuré comme est celuy du Soudan du Caire. Mais celuy qui en est jouyssant, demeure tousjours en suspens dêtre meurtry ou expulsé de son royaume. Le semblable nest aux nôtres de Chrétienté, pour ce quil est habité de pau- vres personnes et sauvages, sans quil y ayt aucune cité fermée, sinon vilages garnis de maisons de paille, pour autant quils nont pas lart de les fabriquer en maçonnerie, à cause que la chaulx leur default et ne sauroyent faire la brique. Il est semblablement de pe- tite étendue. Car, selon la côte, il ne savance pas plus hault de deux cens milles, et peut contenir en largeur autant despace, comme jen ay été informé. Le roy na pas certain revenu des daces et gabelles ; mais les seigneurs pour se maintenir en grâce, luy font présent, par chacun an, de quelques chevaux qui sont fort de requête, pour autant que le nombre en est petit ; et sy trouve quelque bétail comme vaches, chèvres, avec des legumages, millets et autres choses semblables. Ce roy se maintient encore de pillages quil fait de plusieurs esclaves sur le pais, comme sur ses voisins, desquels il se sert de plusieurs manières, et sur tout à faire cultiver ses possessions ; avec ce quil en vend un grand nombre aux Azanaghes et marchans Arabes, qui arrivent sur ses marchés avec chevaux et autres choses. Il en délivre encore aux Chrétiens depuis quils ont commencé à contracter marchandise en ces païs. Et luy est permis de tenir tant de femmes que bon luy semble, comme aussi le peuvent faire les seigneurs, et gens ignobles, ayant sufisamment le moyen de les nourrir. Par ainsi, ce roy en a tousjours de trente en sus, combien quil tient plus de compte des unes que des autres, selon la noblesse de leur race et tyge du- quel elles sont provenues et la grandeur des seigneurs, leurs pères. Telle est la manière de faire de laquelle il use à len- droit de ses femmes, desquelles il tient dix ou douze en certains lieux et vilages siens, et semblable nombre en quelque autre lieu, là où chacune est logée dans une maison à part et séquestrée des autres, ayant certain nombre de chambrières, qui sont ordonnées pour leur service, et quelque quantité desclaves pour cultiver les terres et possessions qui leur sont par ce seigneur asseurées, à fin que par lusufruit dicelles, elles puis- sent honnorablement maintenir leur état. Elles ont, outre ce, certaine quantité de bétail comme vaches et chèvres pour leur usage, qui sont gouvernées par les esclaves, et ainsi, sèment, recueillent et vivent. Et lors que le roy se veult transporter en aucun de ses vilages, il ne luy fault nuls vivandiers, car il ne fait point porter de vivres après soy ny chose aucune, pour autant que ces femmes qui demeurent aux lieux où il sachemine, le défrayent, avec toute sa suite. Donq chacune dicelles, tous les matins, à soleil levant, drece troys ou quatre mets ou services, les uns de chair et les autres de poisson, avec quelques autres aprets de viandes mo- resques, selon leur mode, quelles envoyent par leurs esclaves à la depence du roy ; tellement quil sy trouve en moins dune heure, plus de quarante ou cinquante services. Et lorsquil vient au seigneur apetit de manger, il trouve ses viandes toutes apareillées, sans en avoyr autre pensement ; puis, il retient ce qui revient à son goût, délaissant le reste à ceux qui luy ont fait compagnie. Mais, il ne leur compartit les viandes en si grande abondance quils ne emportent tous jours lapetit se levant du repas. En cette manière va le roy dun lieu à lautre, couchant tantôt avec lune, maintenant avec lautre de ses femmes, telle- ment quelles luy conçoivent un grand nombre den- fans. Car incontinent quil cognoît lune dicelles être enceinte, il la laisse sans plus la toucher, ny avoir sa compagnie, coutume qui est semblablement observée par tous les autres seigneurs du païs.
Posted on: Sun, 17 Nov 2013 23:29:14 +0000

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