Serigne Kéné, la cinquantaine proche, vient de s’illustrer - TopicsExpress



          

Serigne Kéné, la cinquantaine proche, vient de s’illustrer brillamment dans l’art islamique. Son exposition à la Galerie nationale des arts est le point de départ d’une carrière artistique qui s’annonce prometteuse. Un triptyque a participé à son succès de l’heure. Un triple sceau conforté par : le prétexte, le contexte et le texte. L’idée est d’aller cueillir plusieurs sourates du Coran et de les asseoir dans une œuvre d’un subtil doigté rehaussée de coquillages. Puis, Serigne Kéné a, opportunément placé son exposition dans la ferveur du Ramadan. Quel meilleur dérivatif pourrait-il offrir aux esprits baignés de dévotion ? Mais là où Serigne Kéné a touché son public en plein dans le mille, c’est le texte de son œuvre. Le message ne s’embarrasse pas de circonlocutions. Il est à la fois discret et disert. Tout comme Serigne Kéné : physique de Sahélien, chéchia rouge bien posée sur la tête, bouc taillé en pointe et Baye Lahat réglementaire, en fervent talibé mouride. Quand le masque de discrétion s’efface par la magie des mots, se dégage en lévitation, un esprit pointu qui se le joue modeste malgré son tout. Il déclare doctement : «Je m’appelle Serigne Kéné, je suis né à Mboro et je travaille à Thiès.» Sur son succès bluffant, il a le triomphe tout aussi modeste et déclare derrière ses lunettes fumées : «Si je suis un artiste ? Difficile à dire parce que je suis chauffeur de poids lourds de profession. Puis, j’ai abandonné ce métier pour être tailleur. D’ailleurs, c’est moi-même qui ai cousu ce que je porte. J’ai toujours mon atelier et je fais toujours de la couture. Je suis aussi dans le commerce. Actuellement je fais des tableaux d’art islamique.» C’est dit ! L’histoire est celle d’un éclectique, d’un touche-à-tout à qui tout sourit et dont le génie insolant subjugue encore. Tout est parti d’une banale décoration d’un Khabrou (une tombe) qui finit en franc succès. Il déclare : «Pour la première fois, je devais décorer un Kha­brou. Je devais travailler sur commande et je devais recouvrer la tombe d’un drap noir orné d’écritures coraniques. Générale­ment c’était la sourate Yasin ou une autre du choix de celui qui passe la commande.» Cette réussite l’enhardit à taquiner de plus en plus et de mieux en mieux le pinceau, avec un succès toujours au rendez-vous. Sourire discret, il confie : «A un moment donné, je me suis dit puisque le Coran avait déjà été écrit sur de la pierre, pourquoi ne pas utiliser des coquillages pour le faire ? C’est là que tout est réellement parti. Je raconte la vie du Prophète dans mes tableaux. Il m’arrivait aussi de faire des portraits ou la consignation de la sourate Khamar.» En cours d’initiation sur la toile d’un chevalet, Serigne Kéné se rend un beau matin au Lac Rose où il s’achète deux sacs de coquillages, les lave soigneusement et forme les mots Allahou et Khoulhouwa avec. Il rehausse le tout d’une montre réveil. Aujourd’hui encore, il en sourit : «Ceux qui l’ont vu m’ont encouragé. Voilà pourquoi au­jour­d’hui c’est ma principale activité.» Mais cette histoire a ceci de déroutant. «Comment cela m’est venu ? Je ne le sais pas. Je n’ai jamais fait de l’art, d’ailleurs je ne savais même pas ce que c’était. Il m’est juste arrivé, avant mes dix ans de faire la peinture sous-verre, mais ça n’est jamais allé plus loin que ça. C’est pourquoi quand on me pose la question, je ne sais au juste quoi répondre, ni expliquer comment cela m’est venu.» Dans ses œuvres, Serigne Kéné affiche une fraîcheur de bizut et une énergie à toute épreuve. En seulement quatorze mois d’activités, il a réalisé une foultitude d’œuvres artistiques. Il ajoute : «Ces six derniers mois je les ai consacrés à la préparation de ce vernissage. Je ne me reposais pas. Je travaillais tout le temps. Et j’ai réalisé mes œuvres sur mon lit. Je n’ai ni table, ni chevalet.» Celui qui fut fervent petit talibé au Daara de Serigne Modou Thiette à Darou Diouf, a cette particularité de n’avoir pas appris la couture, mais seulement passé avec succès son permis de conduire pour être chauffeur de camions poids-lourd. Il dit encore : «D’ail­leurs, je ne sais pas grand-chose du vernissage. Ça n’aurait pas réussi s’il n’y avait pas le concours de mes amis comme la directrice de la Galerie nationale des arts, le président de la Chambre des métiers et le directeur de la manufacture des arts.» Adoubé par Abdoul Aziz Mbaye, ministre de la Culture, il peut désormais s’autoriser un rêve douillet : «Je suis heureux que ce vernissage se soit bien passé. Cela a dépassé mes attentes. Ça me plairait bien d’exposer dans le monde entier, surtout dans les pays islamiques. Mais je n’ai pas les moyens pour cela. C’est pourquoi nous sollicitons l’aide de bonnes volontés parce nous avons l’ambition de parvenir à créer une école d’art islamique.»
Posted on: Tue, 06 Aug 2013 16:17:19 +0000

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