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lEconomiste Edition N° 1442 du 22/01/2003 Forêts en périlPar Larbi CHOUKRALLAH* Composées despèces reliques comme larganier ou le chêne-liège, ou despèces nobles à port majestueux et plusieurs fois séculaires comme le cèdre de lAtlas, nos forêts sont en déperdition sous notre oeil indifférent ou complice! Si le désert a depuis bien longtemps envahi la zone de larganier et entamé celle du chêne-liège, il est sur le point de semparer de laire du cèdre: dès que lon quitte Azrou ou Ifrane, en allant vers Midelt, le désert est aux aguets, menaçant! Quand il se sera emparé du peu de forêt qui reste, adieu alors au cèdre de lAtlas, adieu aussi à ce qui reste des lacs de cette belle région et adieu aux sources deau douce et pure qui jaillissent çà et là des rochers et qui, il ny a pas si longtemps, étaient encore intarissables.. Exploitation irrationnelle et pillageEn effet, lexploitation irresponsable de ces forêts et leur pillage illimité dans le temps comme dans lespace travaillent à la désertification du pays. Dautres facteurs dexploitation insensée des ressources, dont notamment le surpâturage, contribuent largement à lavancée du désert.La récente affaire dexploitation éhontée de la cédraie dans la province dIfrane nest que la partie visible dun pillage systématique de la forêt, qui sévit depuis des décennies au vu et au su de certains responsables malhonnêtes à labri de toute impunité. Feu Hassan II avait veillé personnellement à conserver à Ifrane son cachet, qui lui a valu le surnom de «petite Suisse« du Moyen Atlas, reconnaissant implicitement le mérite de la France davoir marqué aussi favorablement cette région. La grandeur des grands ne pâlit pas de leur humilité! Or, aujourdhui, Ifrane est en train de régresser à la fois sur le plan de son patrimoine forestier et de son cachet urbanistique par lémergence de bâtisses en dissonance avec lancienne architecture. . Que faire?Devant cette situation alarmante qui va au-delà du Moyen Atlas et les avertissements par lesquels elle nous interpelle, la réaction se fait rare, quand elle nest pas complètement absente. Le reboisement est en deçà de ce quil devrait être, tant quantitativement que qualitativement et les mesures qui simposent ne sont pas toutes prises, ou ne sont pas toujours respectées.La coupe de cèdre, de chêne-liège ou darganier devrait être proscrite, sauf dans de rares cas se justifiant par lentretien de ces espèces et devant requérir lautorisation des responsables au plus haut niveau de la hiérarchie des Eaux et Forêts. En outre, toutes ces forêts devraient être mises en défens et classées patrimoine de lhumanité. Lespace sylvo-pastoral gagnerait à être repensé et réorganisé, de manière à préserver la forêt de son exploitation sournoise, des feux dont les pasteurs sont parfois à lorigine et de loccupation de fait et lappropriation illégale de lespace forestier. Ces quelques actions bien que sommaires aideraient probablement à la mise en place dune véritable politique forestière qui, en tout état de cause, ne produirait son effet quà long terme et qui nécessitera sans doute la mise en place de projets denvergure émanant dun plan national de développement forestier et de nature, non seulement, à préserver le patrimoine forestier du Moyen Atlas et à redonner à cette région sa vocation de château deau du Maroc, mais à développer ce patrimoine et à le porter à un niveau optimal tant qualitativement que quantitativement.La mise en défens de la forêt aurait toute sa légitimité avec la création, par les communes, en particulier celles des régions froides, de parcs à bois, pour la production de bois de chauffe et de cuisson. Ces parcs à bois, composés dessences à croissance rapide, permettraient aux montagnards de sapprovisionner en bois dans des points fixes à des prix raisonnables, pour éviter quils le fassent dans la forêt avoisinante.. Le salut par le reboisementEtant donné limportance davoir un espace forestier en rapport avec la superficie du pays -et nous en sommes bien loin, les forêts couvrant à peine 8% de cette superficie; étant donné aussi le rôle éducatif du reboisement, il devient urgent, aujourdhui plus quhier, de faire appel à la mobilisation de toutes les énergies potentielles et mobilisables pour reboiser les surfaces qui peuvent lêtre, en tenant compte -quand cest possible- de la répartition des surfaces reboisées dans lespace et du choix des espèces végétales avec laide de nos chercheurs. Lintensification dune telle action permettrait dempêcher la progression du désert, de corriger favorablement le climat, de renflouer les réserves deau souterraine, de faire renaître les lacs et sources taris et dempêcher lenvasement des barrages. Ainsi privilégié et intégré dans le quotidien de la population, le reboisement aura un impact social et économique incommensurable et une amélioration certaine de la qualité de vie.Feu Hassan II, que Dieu lait en sa sainte miséricorde, a construit des barrages, il serait opportun de compléter son oeuvre par le reboisement; cest le maillon manquant de cette chaîne. . Les espaces vertsIl nous faudrait également intégrer dans nos moeurs lamour de lespace vert, par linstitution de quotas obligatoires dans toute agglomération, car lenvahissement du béton sest toujours fait au détriment des espaces verts, sans discernement et en labsence dune politique en matière de préservation de léquilibre entre lespace réservé à lhabitat et celui devant être affecté aux jardins, parcs, etc. Il ne sévapore point deau du béton! Le roi défunt a également donné lexemple dans ce domaine: à Ifrane et Rabat (la ceinture verte), pour ne citer que ces deux villes, non seulement, ces espaces verts sont de véritables sources doxygène, mais ils coupent, là où ils existent, la monotonie et la laideur des constructions fondées sur le raisonnement uniquement marchand, ne tenant compte que de ce que rapporte le mètre carré couvert! Coopération régionale Le défi en matière de besoins de reboisement est tel que cela nécessiterait toute une politique de coopération internationale et, en tout cas, régionale. LAlgérie, la Tunisie, la Libye et la Mauritanie sont autant concernées, sinon bien plus que le Maroc, pour collaborer à un projet de reboisement et de lutte contre la sécheresse. Peut-être serions-nous plus unis par ce biais que par celui de lUMA. La sécheresse nest pas une fatalité, mais la combattre est le prix que la nature nous impose dans lunion des hommes et non dans la désunion. Encore une de ces formidables leçons de la nature que nous devons méditer. --------------------------------* Ancien fonctionnaire à la BAD et ex-secrétaire général du Fonds déquipement communal.
Posted on: Wed, 20 Nov 2013 20:42:54 +0000

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