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Agressions de pompiers, le fléau marginal PUBLIÉ LE 25/08/2013 Par THIBAULT PRÉVOST - PHOTOS ARCHIVES PASCAL BONNIÈRE ET JOHAN BEN AZZOUZ Réactions (10) Le journal du jour à partir de 0.79 € Frévent, Avion, Wattrelos, Armentières : ces derniers mois, les cas d’agressions de sapeurs-pompiers se multiplient dans la région. Face à la recrudescence de ces violences, différentes figures de la profession livrent leur analyse. Imprimer- A + 15 août 2013, Frévent. Au cours d’une intervention sur une rixe, un sapeur-pompier est agressé et son VSAV (véhicule de secours et d’assistance aux victimes) est pris pour cible. Un phénomène exceptionnel, ou presque. Car entre les tensions nocturnes d’Avion (13 août), le vol d’un véhicule de pompiers à Wattrelos (15 août) et le pompier blessé d’un coup de ciseaux à Armentières (18 mai), la région semble connaître une recrudescence des violences à l’égard des soldats du feu. Une situation à l’image du reste du pays : l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) déplore ainsi dans son rapport de 2012 une hausse de 35 % des agressions de sapeurs-pompiers entre 2007 et 2011. La région Nord - Pas-de-Calais comptabilise un total de 94 agressions en 2011… sur plus de 263 000 interventions. Soit 3,6 agressions toutes les 10 000 interventions. Un chiffre qui place la région au cinquième rang des régions françaises les plus touchées par le phénomène. « Des situations de guérilla urbaine » Pour le colonel Laurent Moreau, directeur du service d’incendie et de secours du Pas-de-Calais (SDIS 62), il faut néanmoins « relativiser ces chiffres : il faut replacer les choses dans un contexte national. Le département du Pas-de-Calais est loin d’être le plus touché. On n’est pas dans les Bouches-du-Rhône, dans la banlieue lyonnaise ou à Paris, et on ne peut pas être assimilés à ces zones-là, bien que ces violences soient intolérables ». Tout dépend effectivement des chiffres utilisés : avec 94 pompiers agressés en 2011, le Nord se situe en effet loin de l’Île-de-France (154 agressions), la région Rhône-Alpes (152) ou l’Alsace (149). Quid alors des récents événements à Avion ? « Ce n’était pas une situation d’insurrection, les pompiers n’ont pas été pris pour cible », tempère le colonel. « Généralement, les gens du Pas-de-Calais nous appellent avec discernement. » Le discours change chez Frédéric Monchy, président du Syndicat national des sapeurs-pompiers professionnels (SNSPP) du Pas-de-Calais. « Entre les agressions verbales et physiques, la violence est presque quotidienne. Aujourd’hui, il y a des situations dignes de guérillas urbaines. Il n’y a plus de respect de l’uniforme, mais une volonté de s’attaquer aux services de l’État. » Analyse confirmée par Jacques Bruchet, secrétaire CFDT au SDIS du Nord : « On a effectivement constaté des comportements nouveaux, les traquenards par exemple. Dans certains quartiers, à Maubeuge, en intervenant sur des feux de voitures ou de poubelles, on a déjà été caillassé ou pris à partie. » Pour le lieutenant Vandermeulen, de la caserne de Frévent, l’explication tient en une « métamorphose » du métier : « Aujourd’hui, il ne faut plus nous voir comme des soldats du feu ! Nous intervenons majoritairement sur des accidents de personnes, et on est donc confrontés à des gens alcoolisés ou désœuvrés. » « Sauver ou périr » Motifs d’agression : impatience, influences, désœuvrement… voire amalgame. « Certains collègues jugent que c’est parce que les gens peuvent nous confondre avec la police, car notre habit noir est ressemblant », avance Jacques Bruchet, tandis que Frédéric Monchy estime « payer les pots cassés des interventions policières ». Aujourd’hui, les pouvoirs publics commencent à proposer des solutions. Au-delà des stages de « gestion de l’agressivité » – « qui ont lieu dans des zones spécifiques dont le Pas-de-Calais ne fait pas partie », explique le colonel Moreau – des services psychologiques sont mis en place dans les casernes et des « plans de trouble urbain », sorte d’accords officieux entre les SDIS, le préfet et la police, visent à mieux protéger les pompiers, notamment en « prépositionnant » la police sur un lieu d’intervention, explique Frédéric Monchy. « Aujourd’hui, on envoie plus de gars sur la même intervention, pour créer un effet de groupe, et dans certains coins, on porte la tenue de feu pour se protéger. » Une protection au jour le jour mais pas de stratégie à long terme, déplore le lieutenant Vandermeulen : « On doit sensibiliser, communiquer avec les gens, ouvrir nos portes. Il faut qu’on martèle à la population qu’on est là pour la secourir, et qu’on secourrait notre pire ennemi de la meilleure des façons. » Pour que « sauver ou périr » ne devienne pas la seule alternative. «Une rage des institutions» La violence envers les sapeurs-pompiers est-elle un phénomène nouveau, et ce phénomène doit-il inquiéter ? « Permettez-moi de reprendre un adage qui avait déjà été, en son temps, repris par Bourdieu : « Il faut bien que jeunesse se passe ». Ces agressions sont médiatisées mais il ne s’agit que de jeunes, qui sont dans cette période où l’on fait des bêtises. Ils sont jugés dangereux mais il ne faut pas oublier que la génération de leurs grands-parents était celle des blousons noirs… C’est aussi une question de période. Ça paraît trivial mais, en été, les gens vont dans la rue, sortent le soir et surtout s’ennuient. On n’est pas en face d’une population délinquante structurée, car les délinquants, les vrais, ne font pas parler d’eux et préfèrent rester discrets. » – Quelles sont les motivations qui peuvent pousser certaines populations à s’en prendre à ces professionnels ? « Ces jeunes tiennent la cité, c’est leur territoire, ils se définissent grâce à cela. Pour eux, ces gens ne sont pas de leur monde, ils sont simplement garants de l’ordre. Le problème avec les forces de l’ordre, représentées indifféremment par les pompiers, les médecins ou les policiers, est lié à une rage envers les institutions. Tout ça n’a rien de nouveau : l’uniforme renvoie à des forces institutionnelles. Tout ce qui représente une institution est un ennemi, un intrus qu’il faut donc combattre ». – Quelles sont, selon vous, les solutions à envisager pour mettre fin à ce climat ? « Ce qui manque aujourd’hui aux institutions, c’est la capacité de s’adapter aux milieux dans lesquels ils interviennent. Aujourd’hui, on ne peut arriver partout en pays conquis. L’autorité, c’est la qualité d’une interaction, et ça s’acquiert au quotidien. Ce qu’il faut, c’est plus de prévention, de communication et de proximité, pour montrer aux jeunes une image un peu plus positive de la profession. » Propos recueillis par T. P. Aux urgences, la violence diagnostiquée Aussi exposés aux risques d’agressions que leurs collègues pompiers, les professions médicales (ambulanciers, médecins urgentistes, infirmières) ne subissent pourtant pas le même type de violence que les soldats du feu. Deux aspects d’une même violence, qui prend ses racines dans les mêmes maux. « On connaît quelques problèmes, mais ce n’est rien par rapport aux pompiers. » Le message est unanime chez les professionnels du secteur médical. Patron du service des urgences du CHRU de Lille, le Dr Goldstein ne constate « aucune recrudescence d’attaques », car « les SMUR (Services mobiles d’urgence et de réanimation), qui sont parfois la dernière solution médicale, sont respectés et ne sont pas trop confrontés à la violence ». La blouse blanche, un uniforme plus sympathique que la tenue de feu ? « En blouse blanche, on est tout de suite perçu comme du personnel médical et il y a une aura de respect », confirme Bernard Boccard, président de la Chambre nationale des services ambulanciers (CNSA) à Paris. Malgré tout, la violence existe bel et bien au sein des professions médicales, sous une forme particulière. Le cas le plus classique : le refus d’hospitalisation. « La majorité des problèmes est d’ordre psychiatrique », décrit M. Fosseux, responsable d’ABC Ambulances, qui intervient dans l’agglomération lilloise. « On ne peut pas forcer, mais... » « Il y a les agressifs, les éméchés, qui ont peur d’aller à l’hôpital. Parfois, on prend nos précautions avant d’entrer dans un appartement. On ne peut pas forcer quelqu’un à nous suivre mais, dans certains cas, on peut utiliser des liens. » Pour l’ambulancier, les problèmes surviennent également dans un espace-temps très précis : « Dans les quartiers défavorisés, lorsque le RMI et le RSA tombent. » Pour le Dr Goldstein, enfin, la violence en milieu médical est tout simplement le reflet d’une tension. « Il y aura toujours, de temps à autre, des situations de violence. Il nous importe de les prévenir et de les désamorcer. Les urgences, c’est le moment où la crise se cristallise. Pour répondre à ces situations, nos personnels suivent des cours avec des psychiatres. Et des psychologues sont là pour s’interposer. Parfois, la violence fait partie du diagnostic. » T. P
Posted on: Mon, 26 Aug 2013 15:52:55 +0000

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