« Javais décidé de mourir. Je ne supportais plus ce qui se - TopicsExpress



          

« Javais décidé de mourir. Je ne supportais plus ce qui se passait. » Au milieu du salon de ses parents, à Marquette-lez-Lille, la voix de Jonathan Destin, 18 ans, sonne mécanique, distante. Mais ses propos heurtent encore de plein fouet sa mère, Marie-Pierre, et son père, Frédéric, qui, à son côté, essuie discrètement une larme. « Aujourdhui, je veux témoigner pour inciter les jeunes dans mon cas à parler. À lépoque, pour moi, cétait la seule échappatoire, poursuit Jonathan, dont les bras se contractent chaque seconde un peu plus. Je ne pouvais pas parler à ma famille de ce que je vivais depuis la cinquième. Les gros mots, tous les jours, les insultes à cause de mon poids ou de mes notes. Des collégiens me frappaient. Ça a continué au lycée. Des personnes, venant de lextérieur, mont racketté et menacé de mort. Javais trop honte. Je gardais ça pour moi. » On comprend au son de sa respiration devenue difficile toute langoisse quil éprouve encore au souvenir de cette enfance martyrisée. Cela fait deux ans que ladolescent a tenté de mettre fin à ses jours par le feu. Le 8 février 2011, en sortant de cours à midi, Jonathan, alors scolarisé au lycée des Vertes-Feuilles, à Saint-André, ne se rend pas au rendez-vous donné par ses racketteurs : « Cette fois, je ne pouvais pas. » Il enfourche son vélo, achète une bouteille dalcool à brûler. Puis il se dirige vers la Deûle, à la recherche dun endroit isolé. Il sasperge du liquide inflammable et y met le feu avec un briquet. « La douleur a été insupportable. Je voyais des morceaux de ma peau se détacher. Des flammes de deux mètres me dépassaient. Jai essayé de les éteindre en me roulant par terre, comme javais vu dans les films. Mais cela ne sarrêtait pas. Alors, jai parcouru cent mètres et jai sauté dans leau. » Par chance, une femme laperçoit. À laide dune rallonge électrique, elle le ramène sur la berge. Jonathan y attendra les secours. Héliporté à lhôpital militaire de Percy, près de Paris, il sera placé en coma artificiel pendant deux mois et demi. « Les médecins mont réveillé au bout dun mois et demi et mont demandé si je voulais vivre. Jai dit oui. Je me suis dit que si javais survécu, cest quil y avait une raison. » Jonathan a déjà subi dix-sept opérations de greffes de peau et de chirurgie réparatrice. Brûlé au 3e degré, sur 72 % du corps, il garde de nombreuses séquelles, et développe encore des infections. Hier, il a dû réintégrer le service de dermatologie du CHR de Lille, pour une infection à la jambe. « Il reste fragile. Les cures thermales quil commencera bientôt devraient aider à soigner ses plaies », explique sa mère. Aujourdhui, cest toute la vie de Jonathan et de ses proches qui est bouleversée. Les semaines sont rythmées par les soins infirmiers, le suivi par un psychiatre et la kinésithérapie de rééducation. « Cest comme pour un bébé, il a fallu tout lui réapprendre : marcher, boire, manger, parler. Pour lui, ça a été très dur moralement », raconte Marie-Pierre Destin, qui soccupe désormais de Jonathan à temps complet. Elle essaie de ne pas laisser paraître la fatigue, nerveuse et physique. « Je suis encore sous antidépresseurs », souffle-t-elle. Avec un regard déterminé, son fils ajoute : « Je me rends compte quil y avait des solutions avant den arriver à ce geste désespéré, que je pouvais être soutenu. Je veux prouver quon peut se reconstruire. » Il garde dans un coin de sa tête son rêve depuis tout petit : devenir pâtissier.
Posted on: Mon, 11 Nov 2013 12:18:09 +0000

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