Lettre de Frida Kahlo à Nickolas Muray le 16 février 1939 à - TopicsExpress



          

Lettre de Frida Kahlo à Nickolas Muray le 16 février 1939 à Paris « Quand je suis arrivée, les tableaux étaient encore à la douane, parce que ce fils de pute de Breton n’avait pas pris la peine de les en sortir. Il n’a jamais reçu les photos que tu lui as envoyées il y a des lustres, ou du moins c’est ce qu’il prétend ; la galerie n’était pas du tout prête pour l’exposition, d’ailleurs ça fait belle lurette que Breton n’a plus de galerie à lui. Bref, j’ai dû attendre des jours et des jours comme une idiote, jusqu’à ce que je fasse connaissance de Marcel Duchamp (un peintre merveilleux), le seul qui ait les pieds sur terre parmi ce tas de fils de pute lunatiques et tarés que sont les surréalistes. Lui, il a tout de suite récupéré mes tableaux et essayé de trouver une galerie. Finalement, une galerie qui s’appelle Pierre Colle a accepté cette maudite exposition. Et voilà que maintenant Breton veut exposer, à côté de mes tableaux, 14 portraits du XIXe siècle (mexicains), ainsi que 32 photos d’Alvarez Bravo et plein d’objets populaires qu’il a achetés sur les marchés du Mexique, un bric-à-brac de vieilleries, qu’est-ce que tu dis de ça ? La galerie est censée être prête pour le 15 mars. Sauf qu’il faut restaurer les quatorze huiles du XIXe et cette maudite restauration va prendre tout un mois. J’ai dû prêter à Breton 200 biffetons (dollars) pour la restauration parce qu’il n’a pas un sou. » Et la suite : « Bon, il y quelques jours, une fois que tout était plus ou moins réglé, comme je te l’ai expliqué, j’ai appris par Breton que l’associé de Pierre Colle, un vieux bâtard et fils de pute, avait vu mes tableaux et considéré qu’il ne pourrait en exposer que deux, parce que les autres sont trop choquants pour le public !! J’aurais voulu tuer ce gars et le bouffer ensuite, mais je suis tellement malade et fatiguée de toute cette affaire que j’ai décidé de tout envoyer au diable et de me tirer de ce foutu Paris avant de perdre la boule. Tu n’as pas idée du genre de salauds que sont ces gens. Ils me donnent envie de vomir. Je ne peux plus supporter ces maudits intellectuels de mes deux. C’est vraiment au-dessus de mes forces. Je préférerais m’asseoir par terre pour vendre des tortillas au marché de Toluca que de devoir m’associer à ces putains d’artistes parisiens. Ils passent des heures à réchauffer leurs précieuses fesses aux tables des cafés, parlent sans discontinuer de la culture, de l’art, de la révolution et ainsi de suite, en se prenant pour les dieux du monde, en rêvant de choses plus absurdes les unes que les autres et en infectant l’atmosphère avec des théories et encore des théories qui ne deviennent jamais réalité. Le lendemain matin, ils n’ont rien à manger, vu que pas un seul d’entre eux ne travaille. Ils vivent comme des parasites, aux crochets d’un tas de vieilles peaux pleines aux as qui admirent le génie de ces artistes. De la merde, rien que la merde, voilà ce qu’ils sont. Je ne vous ai jamais vus, ni Diego ni toi, gaspiller votre temps en commérages idiots et discussions intellectuelles ; voilà pourquoi vous êtes des hommes, des vrais, et pas des artistes minables. Bordel, ça valait la peine de venir, rien que pour voir pourquoi l’Europe est en train de pourrir sur pied et pourquoi ces gens – ces bons à rien – sont la cause de tous les Hitler et les Mussolini. »
Posted on: Sun, 01 Dec 2013 20:00:26 +0000

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