SOI ION TOUSSE MAIDIOCR ! Une mouvement semble se développer en - TopicsExpress



          

SOI ION TOUSSE MAIDIOCR ! Une mouvement semble se développer en France contre les élites intellectuelles : attaque contre l’agréation et plus généralement « réforme » de tous les concours d’enseignement pour les rendre plus « accessibles », contre les classes préparatoires élitistes et leurs « profs » qui seraient indument privilégiés, mise à l’écart des étudiants les plus diplômés qui auraient des connaissances trop théoriques ou tout simplement « trop diplômés », limitation des crédits de recherche et sous rémunération des chercheurs sur des budgets précaires, « simplification » des programmes scolaires, de l’orthographe et de la grammaire, …simplification, changement et réforme serait le maitre mot pour tous les maux. La justification d’une contestation des élites s’appuierait ensuite sur le fait qu’elles seraient, empiriquement et sans autre justification, constituées de « nantis » et de « privilégiés ». Avant de vouloir éliminer les élites ou du moins de les réduire sous la justification qu’elles « opprimeraient » et empêcheraient le développement de la « masse » en s’appropriant trop de ressources, il convient tout d’abord de s’interroger sur ce qu’est une élite ? Selon le Tlfi, l’élite (ou les élites) est constituée de « Ce quil y a de meilleur dans un ensemble composé dêtres ou de choses; produit dune élection qui, dun ensemble dêtres ou de choses, ne retient que les meilleurs sujets » ou « Minorité dindividus auxquels sattache, dans une société donnée, à un moment donné, un prestige dû à des qualités naturelles (race, sang) ou à des qualités acquises (culture, mérites) ». Selon la logique que nous venons d’évoquer faudrait-il lutter contre les élites, cest-à-dire contre ce qui est meilleurs dans la société, en ne gardant que le médiocre ? Si cela se comprend lorsqu’il s’agit d’un statut acquis immérité, il est surprenant de refuser de reconnaître et d’utiliser pour le bien commun les qualités personnelles de certains individus (intelligence, sens artistique, connaissances, savoir faire,…), qu’elles soient innées ou acquises par l’étude et la réflexion. Tous les titulaires d’un master ont après tout le droit de présenter les concours d’enseignement et même l’agrégation… La vraie question est de savoir comment permettre à tous ceux qui en ont la volonté et la capacité d’atteindre ce niveau. « Elite » ou « les élites ». Faut-il écrire le mot au singulier ou au pluriel ? Vilfredo Pareto est l’un des rares théoriciens à souligner limpossibilité de faire un choix car, pour lui, le concept délite implique une « estimation du succès avec lequel les acteurs sociaux déploient leur activités ». On pourrait alors envisager autant délites quil y a de branches dactivités. En se fondant sur cette pluralité des élites, il semble qu’aujourd’hui les élites dirigeantes (politiques), quelles que soit leurs tendances, soient tentées d’éliminer ou au moins de discréditer et d’affaiblir les élites non dirigeantes (intellectuelles, culturelles, …). Peut-être parce qu’elles constituent le seul contre pouvoir disposant d’une argumentation structurée contre les errements des premières et leurs approximations et qu’elles sont les seules à permettre à la fois la reproduction et le développement des élites intellectuelles. D’autres approches des élites sont instructives. Thorstein Veblen, auquel faisaient déjà référence Raymond Aron dans son analyse des élites, considère que léconomie peut expliquer le développement social. Ainsi, selon lui, les institutions de léconomie sont traversées par deux instincts de base, linstinct artisan et linstinct destructif. Par linstinct artisan, lhomme senrichit au travers de son travail, au travers de la domestication rationnelle de la nature, alors que par son instinct prédateur, il cherche à déposséder autrui de ses biens et du résultat de son travail. Cela conduit à opposer une classe laborieuse de techniciens et une classe oisive prédatrice, classe de loisir, dont les centres d’intérêt sont à la fois la vanité et le désir de se démarquer de son voisin par des consommations ostentatoires, facteur de gaspillage. Veblen qualifie bien cette classe oisive d’élite, mais trouve-t-on de tels comportements chez les élites intellectuelles actuelles ? Assurément non, ou du moins très marginalement, car elles n’en ont généralement pas les moyens financiers ou le pouvoir. Il est par exemple très rare que même des professeurs de classes préparatoires ou d’université disposent d’une voiture de fonction et de subsides pour financer leur secrétariat personnel ;-) ... Veblen aspirait d’ailleurs à l’avènement d’une nouvelle élite de la classe laborieuse qui imagine, invente, réfléchi, investi et crée les conditions du développement. Remontons aussi dans le temps en analysant les élites qui ont fait notre histoire. Les élites intellectuelles se retrouvaient au moyen-âge en particulier dans les monastères dont les moines défichèrent à la fois la nature mais aussi la culture en maintenant, même partiellement, la connaissance. Ce sont les élites de la renaissance et du siècle des lumières, artistes, princes éclairés, savants qui permirent la redécouverte des textes antiques, l’émergence de la recherche scientifique et des techniques et l’avènement de la démocratie moderne. Citons en vrac, sans ostracisme et de manière non exhaustive Paracelse, Kepler, Gutenberg, Buridan, Vésale, Paré, Copernic, Bruno, Da Vinci, Galilée, Lavoisier, Bacon, Newton, la Compagnie de Jésus, Volta, Papin, Voltaire, Montesquieu, Rousseau, Lafayette, Mirabeau, Danton, Robespierre, les frères Montgolfier, Portalis … Nous n’imposerons pas au lecteur l’énumération, même très partielle, des personnalités les plus marquantes des élites des XIXème et XXème siècles et de leurs apports à la société, ce qui demanderait plusieurs pages. Ces élites ont permis à la fois le progrès scientifique, technique et social et l’émergence de la démocratie, dont le plus grand nombre a en fin de compte bénéficié. L’élitisme, c’est donner les possibilités intellectuelles et matérielles a tous ceux qui en ont le désir, la capacité et la volonté de s’élever par leur mérite. C’est la véritable démocratisation. Même Rome permettait aux esclaves les plus méritants et le plus doués d’être affranchis et même d’accéder aux plus hautes fonctions. L’enseignement de masse qui vise à un nivellement par le bas est un leurre démagogique. L’abaissement régulier des exigences afin d’augmenter le nombre de bacheliers ou la multiplication pour des diplômes de dispenses ne correspondant pas à des compétences réellement acquises, conduit en fait à pénaliser les élèves et étudiants les plus méritants et à favoriser ceux qui peuvent s’instruire par ailleurs ou bénéficier de réseaux familiaux. Même si l’idée de permettre au plus grand nombre de faire des études supérieures est en soit louable, la démarche conduit à une course absurde à la médiocrité si elle ne s’accompagne pas d’une exigence de niveau et des moyens pour l’atteindre. Le refus de toute sélection sur le mérite conduit d’une part à encombrer des classes d’étudiants qui n’ont aucun intérêt pour les études et qui les considèrent parfois juste comme un moyen d’obtenir un revenu sans effort. Est-ce pour obtenir une certaine paix sociale ? La seule solution pour lutter contre l’absentéisme chronique de certains étudiants est souvent de les menacer de « leur faire perdre la bourse ». A l’inverse d’autres étudiants sérieux, dont les parents sont trop « riches » pour pouvoir obtenir une bourse, en sont réduits à rechercher un « job étudiant » pour financer leurs études, souvent au détriment de leurs résultats. La seule volonté de supprimer les bourses au mérite au profit de bourses sur seuls critères sociaux est en cela symbolique. Pour terminer, je ne résiste pas à citer un passage d’un livre qui a bercé mon enfance. Il évoquait une époque ou les inégalités sociales étaient très importantes mais ou le mérite permettait (encore) une véritable ascension sociale alors qu’aujourd’hui, malgré la « démocratisation de l’enseignement », l’ascenseur social serait « en panne » : « - Tu es nouveau ? - Oui, et toi ? - Moi aussi. Il était petit, presque minuscule. Ses cheveux frisés, dun noir luisant, faisaient ressortir sa pâleur mate. Ses yeux brillaient comme de lanthracite, et sur sa tempe, on voyait de fines veines bleues. - Doù viens-tu ? - De lécole communale de la rue de Lodi. - Moi, je viens du chemin des Chartreux. Nous fûmes amis tout de suite. - En quelle classe es-tu ? - Moi en sixième A2. - Alors, nous ne serons pas dans la même classe, mais on est tous les deux en septième étude. - Comment tappelles-tu ? - Oliva. Je tressaillis. - Cest toi qui as été reçu premier aux Bourses ? Il rougit à peine. - Oui. Qui te la dit ? - Jai été reçu second ! Il sourit, émerveillé. - Ça, alors, cest extraordinaire ! Moi aussi, je trouvais que notre rencontre était due à un prodigieux hasard, à une fantaisie du destin. Il était pourtant évident que deux élèves, reçus la même année aux Bourses de sixième, devaient obligatoirement se trouver ensemble à la rentrée ». Le petit nouveau du chemin des Chartreux, vous l’avez probablement reconnu, s’appelait Marcel Pagnol, fils de Joseph, instituteur et d’André, tailleur de pierre. Bachelier en philosophie, étudiant en khâgne, licencié es lettres, littérature et anglais, professeur dans plusieurs collèges de Provence avant de devenir professeur au lycée Saint-Charles de Marseille puis au lycée Condorcet à Paris, il est considéré comme l’un des auteurs majeurs de la littérature française du XXème siècle…
Posted on: Sat, 30 Nov 2013 18:40:26 +0000

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