APPIEN LA GUERRE DHANNIBAL [11] Quand Hannibal vit le lac de - TopicsExpress



          

APPIEN LA GUERRE DHANNIBAL [11] Quand Hannibal vit le lac de Plestine, la montagne le surplombant, et Centenius au milieu gardant le passage, il senquit des guides sil y avait moyen de contourner. Comme on lui disait quil ny avait aucun chemin mais que la région entière était escarpée et abrupte, il envoya néanmoins un corps des troupes légères, sous le commandement de Maharbal, pour explorer la zone et contourner la montagne de nuit. Quand il jugea quils avaient atteint leur destination il attaqua Centenius de front. Alors que le combat battait son plein, on vit de loin Maharbal descendre énergiquement du sommet en poussant des cris. Les Romains encerclés senfuirent et il y eut un grand carnage, 3000 furent tués et 800 faits prisonniers. Le reste séchappa péniblement. Quand ces nouvelles furent connues en ville, on craignit quHannibal ne marche sur elle immédiatement. Ils entassèrent des pierres sur les murs et on donna des armes aux vieillards. Manquant darmes, ils prirent celles qui se trouvaient dans les temples, qui y avaient été accrochées comme trophées danciennes guerres, et, comme cétait lusage en temps de grand danger, ils élirent un dictateur, Fabius Maximus. CHAPITRE III La politique de Fabius Maximus - Imprudence de Minucius Rufus - Hannibal pris au piège - Il échappe à Fabius - Carthage refuse denvoyer des renforts à Hannibal - Les nouveaux consuls - Leur désaccord [12] Mais Hannibal détourné par providence divine partit vers lAdriatique, où il ravagea le littoral et recueillit un vaste butin. Le consul Servilius, marchant parallèlement à lui, arriva à Ariminum : il nétait quà une journée de marche dHannibal. Il restait là afin dencourager les Gaulois qui étaient encore alliés de Rome. Quand le dictateur Fabius Maximus arriva, il envoya à Rome Servilius, qui ne pouvait plus être ni consul ni général après la nomination dun dictateur. Fabius suivit Hannibal de près, mais nengagea pas le combat avec lui, bien que souvent provoqué Il surveillait soigneusement les mouvements de son ennemi et maintenait la pression sur lui pour lempêcher dassiéger des villes. Comme le pays était entièrement ruiné Hannibal commença à manquer de vivres. Alors il le traversa de nouveau, rangeant son armée en ordre de bataille chaque jour et provoquant Fabius. Fabius refusait le combat, bien que son maître de cavalerie Minucius Rufus, désapprouvât sa politique. il écrivit à ses amis à Rome que Fabius refusait de se battre par poltronnerie. Comme Fabius devait rentrer à Rome pour faire des sacrifices, le commandement de larmée revint à Minucius et il engagea le combat contre Hannibal. Pensant quil allait lemporter, il se montra plus audacieux et écrivit au sénat en accusant Fabius de ne pas vouloir la victoire ; et le sénat, quand Fabius était revint au camp, vota un décret disant que son maître de cavalerie partagerait le commandement avec lui. [13] En conséquence on divisa larmée et ils campèrent lun près de lautre ; chacun gardait son propre avis : Fabius cherchant à épuiser Hannibal en temporisant et en essayant de ne recevoir aucun dommage de lui, alors que Minucius voulait absolument un combat décisif. Peu après Minucius engagea le combat, et Fabius surveillant pour voir ce qui se produirait, tenait sa propre armée disponible en ordre de bataille. De cette façon il put recevoir Minucius quand il fut battu, et repousser les hommes dHannibal dans leur poursuite. Ainsi Fabius empêcha Minucius de subir un grand désastre, sans éprouver aucune colère pour sa calomnie. Alors Minucius, reconnaissant son manque dexpérience, abandonna le commandement et livra sa partie darmée à Fabius, qui avait comme principe quun capitaine habile ne combat quune fois quand cest nécessaire. Cette maxime, plus tard, fut souvent celle dAuguste, qui nétait jamais pressé de combattre et préférait gagner par stratégie plutôt que par bravoure. Fabius continua à observer Hannibal comme avant et lempêcha de ravager le pays, nengageant jamais le combat contre son armée entière mais harcelant uniquement les traînards, sachant parfaitement quHannibal serait bientôt à court de vivres. [14] Ils approchaient alors dun étroit défilé quHannibal ne connaissait pas. Fabius envoya en avant 4000 hommes pour loccuper, gardant le reste de ses forces à lautre extrémité où il installa son camp une colline fortifié. Quand Hannibal découvrit quil était pris entre Fabius et le défilé gardé, il fut plus alarmé quil le lavait jamais été auparavant, parce que il ny avait aucun moyen de sortir, car tout la zone avoisinante était escarpée et abrupte. Il ne pouvait espérer surmonter Fabius ou ceux qui défendaient le passage, à cause des difficultés du terrain. Dans cette situation désespérée il fit mettre à mort ses 5000 prisonniers pour ne pas devoir ajouter un nouveau tumulte dans cette situation périlleuse. Alors il attacha des torches aux cornes de tout le bétail qui se trouvait dans le camp (et il y en avait beaucoup), et quand la nuit fut venue, il alluma les torches, éteignit tous les autres feux du camp et recommanda le silence le plus strict. Alors il commanda aux plus courageux de ses jeunes soldats de conduire le bétail vers les hauteurs en direction des endroits rocailleux situés entre Fabius et le défilé. Les vaches poussée par leurs conducteurs et brûlées par les torches, foncèrent furieusement vers le haut de la montagne, et si lune dentre elles tombait elle se relevait et repartait de nouveau. [15] les Romains de chaque côté remarquèrent le silence et lobscurité dans le camp de Hannibal ainsi les nombreuses lumières mouvantes du côté de la montagne. Ils ne savaient pas exactement ce quils se passait dehors, parce que cétait la nuit. Fabius soupçonna que cétait un stratagème dHannibal, mais nen étant pas sûr il demeura avec son armée dans ses positions à cause de lobscurité. Mais ceux qui tenaient les défilés imaginèrent, comme Hannibal le souhaitait, que dans sa situation désespérée il essayait de séchapper en escaladant les falaises. Aussi ils sempressèrent de se rendre vers lendroit où ils voyaient des lumières, afin de surprendre Hannibal en difficultés. Ce dernier, quand il vit les défilés abandonnés, savança avec un détachement rapide, dans un silence absolu et sans lumières, afin de cacher son mouvement. Après sêtre emparé des défilés et renforcé sa position il fi sonner la trompette, et larmée dans le camp lui répondit par des cris et aussitôt ralluma les feux. Alors les Romains virent quils avaient été trompés. Le reste de larmée et de ceux qui conduisaient le bétail savança dans le défilé sans crainte, et quand il furent tous rassemblés il savança. Cest ainsi quHannibal réussit au delà de tous espoir et sauva son armée du danger. De là il avança vers Geronia, une ville dApulie, qui regorgeait de vivres. Il prit la ville et y installa ses quartiers dhiver dans labondance. [16] Fabius, poursuivant la même tectique quauparavant, le suivit et installa son camp à dix stades de Geronia, le fleuve Aufide les séparant. Les six mois qui limitaient la charge des dictateurs chez les Romains se terminaient alors, et les consuls Servilius et Atilius reprirent leurs fonctions, vinrent au camp et Fabius revint à Rome. Pendant lhiver des escarmouches fréquentes se produisirent entre Hannibal et les Romains : lors ce celles-ci ce sont ces derniers qui généralement avaient le dessus et étaient les meilleurs. Hannibal jusque là écrivait toujours aux Carthaginois en exagérant la situation, mais à ce moment, ayant perdu beaucoup dhommes et voulant des renforts, il leur demanda de lui envoyer des soldats et de largent. Mais ses ennemis, qui raillaient tous ce quil faisait, répondirent quils ne parvenaient pas à comprendre comment Hannibal pouvait demander laide alors quil disait quil remportait des victoires, puisque les généraux victorieux ne demandaient pas dargent mais en envoyaient chez eux à leurs propres concitoyens. Les Carthaginois ne donnèrent pas suite à ses demandes et nenvoyèrent ni soldats ni argent. Hannibal, déplorant cette politique à court terme, écrivit à son frère Hasdrubal en Espagne, lui demandant de faire une incursion en Italie au début de lété avec tous les hommes et largent quil pourrait trouver, et de ravager lautre extrémité pour que tout le pays soit entièrement dévasté et que les Romains sépuisent pris en tenaille. Telle était la situation dHannibal. [17] Les Romains, affligés par limportance des défaites de Flaminius et de Centenius, considéraient quune une telle succession de désastres étonnants était indigne de leur dignité, et ne pouvant tolérer une guerre dans leur propre territoire. Aussi, furieux contre Hannibal, ils levèrent quatre nouvelles légions dans la ville pour sopposer à lui, et demandèrent aux forces alliées de tous réunir en Apulie. Comme consuls ils élirent Lucius Æmilius, qui avait acquis une gloire militaire dans la guerre contre les Illyriens, et Terentius Varro, un démagogue qui avait gagné la faveur populaire par les promesses fallacieuses habituelles. Au moment denvoyer les consuls à lextérieur, ils leur demandèrent de décider de la guerre par un seul combat et de ne pas épuiser la ville par des alternoiements, par des conscriptions, par des impôts, par la faim et labandon des terres dus à la dévastation des champs. Les consuls en prenant le commandement de larmée en Apulie possédaient en tout 70.000 fantassins et 6000 cavaliers Ils posèrent leur camp près dun village appelé Cannes. Le camp dHannibal était en face. Hannibal, qui était toujours prêt au combat et qui ne supportait pas loisiveté, alors moins que jamais parce quil était préoccupé de manquer de vivres, raison pour laquelle il recherchait sans arrêt le combat. Il craignait également que ses mercenaires ne labandonnassent, car ils navaient pas reçu leur salaire, ou de se disperser à travers le pays à la recherche de nourriture. Cest pourquoi il provoquait lennemi au combat. [18] Les avis des consuls étaient divergents : Æmilius pensait quil valait mieux tarder pour épuiser Hannibal (il ne pourrait pas résister longtemps à cause du manque de vivres,) plutôt que dengager le combat avec un général si habile dans la guerre et une armée tellement accoutumée à la victoire. Mais Varron, en démagogue quil était, rappela à son collègue ce que le peuple leur avait demandé à leur départ et quils devraient trouver une solution rapide par une bataille décisive. Servilius, le consul de lannée précédente, qui était encore présent, fut le seul à soutenir lavis dÆmilius. Tous les sénateurs et ceux quon appelle chevaliers qui avaient un commandement dans larmée étaient daccord avec Varro. Tandis quils se disputaient toujours, Hannibal attaqua quelques détachements de ceux qui rassemblaient du bois et du fourrage, et il feignit dêtre battu, et vers la dernière veille il mit en mouvement une partie de son armée comme sil levait le camp. Varro, voyant cela, fit sortir larmée avec lidée de poursuivre Hannibal dans sa fuite. Æmilius alors lui interdit de bouger, et comme Varro ne lui, obéissait pas il consulta seul les présages, selon la coutume romaine, et envoya un mot à Varro, qui commençait à marcher, disant que le jour était néfaste. Ce dernier fit demi-tour, ne voulant pas négliger le présage, mais il sarracha les cheveux devant larmée entière, et il sindigna que la victoire lui avait été enlevée par la jalousie de son collègue ; et la foule entière partagea sa colère. CHAPITRE IV Préparatifs de la bataille - Bataille de Cannes - Défaite totale des Romains - Pertes romaines - La stratégie dHannibal [19] Comme son projet avait échoué, Hannibal rentra immédiatement dans son camp, prouvant par là que sa retraite était une feinte. Mais cela ne fut pas suffisant pour que Varron comprenne quil devait suspecter chaque mouvement dHannibal. Il se hâta en armes vers le praetorium et se plaignit en présence des sénateurs, des centurions et des tribuns quÆmilius avait pris prétexte du présage pour enlever une victoire certaine à la ville, soit quil hésitât par poltronnerie soit quil fût jaloux de lui. Comme il sénervait de colère, les soldats qui étaient autour de la tente lécoutèrent et sassocièrent à la condamnation dÆmilius. Ce dernier néanmoins continua à leur donner de bons conseils, mais en vain. Comme tous autres, à part Servilius, étaient daccord avec Varron, il donna son accord, et le jour suivant il fit mettre lui-même larmée en ordre de bataille sous son propre commandant, parce que Varron lui avait cédé le sien. Hannibal vit le mouvement mais il ne sortit pas de son camp parce quil nétait pas tout à fait prêt pour la combat. Le jour suivant les deux armées descendirent dans la plaine. Les Romains étaient rangés en trois lignes avec un petit intervalle entre elles; chaque ligne avait son infanterie au centre, les troupes légères et la cavalerie sur les ailes. Æmilius commandait le centre, Servilius la gauche et Varron la droite. Chacun avait mille cavaliers délites pour porter secours partout où la nécessité se ferait sentir. Telle était la formation de larmée romaine. [20] Hannibal avait observé précédemment quun vent dest dorage commençait à souffler dans cette région habituellement vers midi. Aussi il occupa le terrain où il aurait le vent dans le dos. Ensuite sur colline boisée creusée par des ravins il plaça sa cavalerie et ses troupes légères pour dresser une embuscade : il leur donna lordre, lorsque la bataille serait entamée et que le vent se serait levé, de tomber sur les arrières de lennemi. En plus il plaça 500 Celtibères, qui en plus de leurs longues épées à leurs ceintures avaient de courts poignards sous leurs vêtements. Ceux-ci ne devaient pas bouger tant quil ne leur aurait pas donné lui-même le signal. Il divisa lensemble de son armée en trois lignes de bataille et plaça sa cavalerie sur les ailes à de longues distances afin de déborder si possible lennemi. Il donna le commandement de laile droite à son frère Magon et celle de laile gauche à son neveu Hannon, gardant pour lui le centre à cause de la réputation de militaire expérimenté dÆmilius. Il avait 2000 cavaliers délite et Maharbal en avait 1000, à qui il avait commandé de rester dans les environs et de venir en aide là où une partie de larmée serait en difficultés. Tout en faisant ces préparatifs, il fit traîner le temps jusquenviron la deuxième heure afin que le vent lui vienne en aide plus tôt. [21] Quand tout fut prêt de chaque côté, les commandants passèrent à travers les rangs pour encourager leurs soldats. On recommanda instamment aux Romains de se rappeler leurs parents, leurs épouses et leurs enfants, et de faire oublier le déshonneur danciennes défaites. On leur dit que cette bataille était lultime espoir de sécurité. Hannibal rappela à ses hommes leurs anciens exploits et leur précédentes victoires sur ces mêmes ennemis, et il dit quil serait honteux dêtre vaincus maintenant par des vaincus. Quand les trompettes retentirent, les fantassins poussèrent un cri. Alors les archers, les frondeurs et les troupes légères savancèrent et engagèrent le combat. Ensuite ce fut le tour des légions. Ce fut alors un grand carnage et une grande mêlée, chaque côté combattant avec vaillance. A ce moment Hannibal donna le signal à sa cavalerie denvelopper les ailes de lennemi. La cavalerie romaine, bien quinférieure en nombre, savança contre eux, et prolongeant leur ligne de bataille jusquà quelle devienne dangereusement mince, ils combattirent néanmoins vaillamment, particulièrement ceux qui se trouvaient sur laile gauche du côté de la mer. Hannibal et Maharbal les attaquèrent simultanément avec la cavalerie quils avaient gardée comme escorte, au milieu de cris sauvages, dans lidée de terrifier leurs ennemis. Pourtant les Romains reçurent le choc sans reculer et sans crainte. [22] Comme Hannibal voyait que sa manoeuvre avait échoué, il donna le signal à ses 500 Celtibères. Ceux-ci surgissant de leur propre ligne de bataille bondirent vers les Romains, en leur donnant leurs boucliers, leurs lances et leurs épées comme sils désertaient. Servilius les applaudit et immédiatement sempara de leurs armes et les ramena à larrière, avec leurs seules tuniques (cest ce quil croyait !), parce que il ne pensait quil valait mieux ne pas mettre des chaînes à des déserteurs à la vue de lennemi, et quil navait aucun soupçon sur des hommes quil voyait revêtus uniquement de leurs tuniques, et que ce nétait pas le moment de prendre des décisions au milieu dune si grande bataille. Alors certaines cohortes africaines firent semblant de senfuir vers les montagnes, en poussant des cris. Cétait le signal pour ceux qui étaient cachés dans les ravins de tomber sur les poursuivants. Immédiatement les troupes légères et la cavalerie qui se trouvaient là en embuscade surgirent, et simultanément un fort vent aveuglant se leva soulevant de la poussière dans les yeux de Romains, qui ne virent plus leurs ennemis. La vitesse des traits romains fut amoindrie par le vent contraire, alors que celle des traits de lennemi augmentait et assurait leur trajectoire. Les Romains ne pouvaient ni voir ni éviter les traits de lennemi et ils ne pouvaient bien viser avec leurs propres traits : ils trébuchaient les uns sur les autres et bientôt de fut le désordre total. [23] A ce moment là les 500 Celtibères, voyant que loccasion se présentait, tirèrent les poignards de leurs tuniques et tuèrent dabord ceux qui étaient justes devant eux, puis, saisissant les épées, les boucliers et les lances des morts, surgirent sur la ligne entière des Romains, frappant partout et ils firent un énorme carnage puisquils étaient derrière tout le monde. Les Romains furent alors en grandes difficultés : attaqués par lennemi devant, par des embuscades sur le flanc, et massacrés par des ennemis au milieu de leurs propres rangs. Ils ne pouvaient pas retourner sur ces derniers à cause de la pression de lennemi devant eux et parce quil nétait pas facile de distinguer les assaillants, car ceux-ci possédaient des boucliers romains. Et surtout ils étaient gênés par la poussière, qui les empêchaient même de deviner ce qui se passait lieu. Mais (comme il se produit habituellement en cas de désordre et de panique) ils considéraient leur état plus critique quil ne létait, les embuscades plus redoutables et les 500 plus nombreux que les 500 effectifs. Bref, ils imaginèrent que leur armée entière était encerclée par la cavalerie et par des déserteurs hostiles. Ainsi ils tournèrent le dos et se mirent en fuite en plein désordre, dabord laile droite où Varro lui-même donna le signal de la retraite, et après elle, laile gauche, dont le commandant, Servilius, cependant, alla porter secours à Æmilius. Autour de ces derniers se rassemblèrent les plus courageux cavaliers et fantassins, au nombre environ de 10.000. [24] Les généraux et tous ceux qui étaient à cheval, bien quencerclés par la cavalerie dHannibal, mirent pieds à terre et combattirent ainsi. Ils chargèrent lennemi avec fureur et accomplirent de brillants exploits : le fruit de leur expérience militaire était accru par lénergie du désespoir. Mais ils tombaient de tous côtés, et Hannibal, allait de ci de là, encourageait ses soldats, leur recommandant tantôt dachever leur victoire, tantôt les tançant et leur reprochant, après quils aient dispersé le front principal de lennemi, de ne pouvoir battre les quelques forces qui restaient. Tant quÆmilius et Servilius survécurent, les Romains tinrent bon, bien que donnant et recevant beaucoup de blessures, mais quand leurs généraux tombèrent, il forcèrent une chemin au milieu de leurs ennemis avec courage, et séchappèrent dans toutes les directions. Certains se réfugièrent dans les deux camps où dautres sétaient déjà réfugiés. Ils étaient au nombre de 15.000 environ, quHannibal assiégea immédiatement. Dautres, au nombre denviron 2000, se réfugièrent à Cannes et ils se rendirent à Hannibal. Certains se réfugièrent à Canusium. Le reste se dispersa par groupes dans les bois. [25] Tel fut le résultat de la bataille entre Hannibal et les Romains à Cannes : elle commença à la deuxième heure du jour et se termina deux heures avant la tombée de la nuit. Elle est encore célèbre chez les Romains comme exemple de désastre, parce que en lespace de quelques heures 50.000 de leurs soldats furent massacrés et beaucoup furent fait prisonniers. Beaucoup de sénateurs qui étaient présents perdirent la vie et avec eux tous les tribuns militaires et les centurions ainsi que leurs deux meilleurs généraux. Le plus mauvais, qui était cause du désastre, sétait enfui au début de la déroute. Les Romains, après deux ans de guerre contre Hannibal en Italie, avait alors perdu, de leurs propres forces et de celles de leurs alliés, environ 100.000 hommes. [26] Hannibal gagna cette grande victoire telle quon en voit rarement en utilisant quatre stratagèmes en une seule journée : la force du vent, la désertion simulée des Celtibères, la fuite feinte et les embuscades dans les ravins. Juste après la bataille il alla regarder les morts. Quand il vit que les plus braves de ses amis se trouvaient parmi les morts il hurla et pleura, disant quil ne voudrait pas une autre victoire de ce genre. On dit que Pyrrhus, roi dÉpire, fit le même genre de déclaration, quand il remporta aussi une victoire sur les Romains en Italie, avec autant de pertes quHannibal. Certains de ceux qui se sétaient échappés du combat et qui sétaient réfugiés dans le plus grands camp et qui dans la soirée avait choisi Publius Sempronius comme général, se forcèrent un passage à travers les gardes dHannibal, qui étaient épuisés de sommeil et de fatigue. Ces hommes, au nombre denviron 10.000, arrivèrent à Canusium vers minuit. Mais les 5000 qui se trouvait dans le petit camp furent pris par Hannibal le jour suivant. Varro, rassemblant les restes de larmée cherchait à leur remonter le moral et après les avoir mis sous le commandement de Scipion, une des tribuns militaires, lui-même courut à Rome. CHAPITRE V Consternation à Rome - Le sénat refuse de donner une rançon pour les prisonniers - Siège et capture de Petilia - Dasius dArpi [27] Quand le désastre fut connu à Rome, la foule remplit les rues en poussant des cris de lamentation sur leurs parents, les appelant par leur nom et pleurant leur propre destin pensant que bientôt ils tomberaient aux mains de lennemi. Les femmes se précipitèrent dans les temples avec leurs enfants et suppliaient les dieux de mettre fin un jour aux calamités qui sabattaient sur la ville. Les magistrats sollicitaient le secours des dieux par des sacrifices et des prières leur disant que sils étaient la cause de leur colère, les dieux devaient déjà se satisfaire de la punition déjà encourue. Le sénat envoya à Quintus Fabius (le même qui écrivit une histoire de ces événements) au temple de Delphes pour consulter loracle au sujet de situation actuelle. Il fit libérer 8000 esclaves avec le consentement de leurs maîtres et il ordonna que tout le monde dans la ville se mette à fabriquer des armes et des projectiles. Il décida également dun recrutement, même dans cette situation, dun certain nombre dalliés. On fit aussi changer de destination à Claudius Marcellus, qui devait gagner la Sicile et on lenvoya combattre Hannibal. Marcellus partagea sa la flotte avec son collègue Furius et en envoya une partie en Sicile, alors quil prenait lui-même les esclaves affranchis et tous les citoyens quil put rassembler ainsi que les alliés, le tout sélevant à 10.000 fantassins et à 2000 cavaliers, et il marcha vers Teanum afin de voir ce quHannibal allait faire. [28] Hannibal permit à ses prisonniers denvoyer des messagers à Rome en leur propre nom, pour voir si les citoyens consentaient à les libérer contre une rançon. Trois dentre eux furent choisis : Gn. Sempronius était leur chef. Hannibal exigea deux le serment de revenir. Les parents des prisonniers, se rassemblant autour du Sénat, montraient leur hâte à racheter leurs proches de leur propre poche et priaient le sénat de leur permettre de le faire. Le peuple les rejoignit dans leurs prières et dans leurs larmes. Certains sénateurs pensaient quil nétait pas sage, après de telles calamités, dexposer la ville à perdre tant dhommes, ni de dédaigner des hommes libres en donnant la liberté aux esclaves. Dautres pensaient quil nétait pas convenable par compassion daccepter la fuite de soldats, mais quil fallait plutôt leur enseigner de vaincre ou de mourir, en pensant quil ne fallait absolument pas que des parents plaignent des fuyards. Beaucoup dexemples furent cités de chaque côté. Le sénat décida finalement que les prisonniers ne pouvaient pas être rachetés par leurs parents, dans lidée que, alors que tant de dangers attendaient encore la ville, la clémence actuelle serait une erreur pour le futur, alors que la sévérité, bien que douloureuse, serait un avantage pour lavenir, et que cette sévérité même effrayerait dans limmédiat Hannibal par sa hardiesse. Cest pourquoi Sempronius et les deux prisonniers qui laccompagnaient retournèrent chez Hannibal. Ce dernier dans sa colère vendit certains de ses prisonniers, en mit dautres à mort, et fit un pont de leurs corps sur lesquels il passa pour traverser un fleuve. Les sénateurs et les autres nobles qui étaient ses prisonniers, il les contraignit à combattre les uns contre les autres, en spectacle pour les Africains : des pères contre des fils, et des frères contre des frères. Il ne négligea aucun acte de cruauté humiliante. [29] Ensuite Hannibal tourné ses armes contre le territoire des alliés romains et, layant dévasté, fit le siège étendu de Petilia. Les habitants, bien que peu nombreux, combattirent courageusement contre lui en compagnie de leurs femmes et accomplirent beaucoup de dexploits audacieux. Ils brûlèrent fréquemment ses machines de siège, et dans leurs entreprises les femmes étaient aussi courageuses que les hommes. Mais leur nombre se réduisait à chaque assaut, et ils commencèrent à souffrir de la faim. Quand Hannibal sen aperçut il fit construire une ligne de retranchement autour de la ville et laissa à Hannon le soin de terminer le siège. Comme la famine augmentait ils firent sortir des murs tous ceux qui étaient incapables de se battre et regardèrent du haut des murs sans saffliger Hannon qui les tuait, considérant que leur mort valait mieux que la vie. Cest pourquoi tout le reste, une fois réduit à la dernière extrémité, attaqua lennemi, et après avoir accompli beaucoup dexploits splendides avec courage, presque affamés et complètement épuisés, ils ne purent regagner la ville et furent massacrés par les Africains. Hannon sempara de la ville. Mais pourtant quelques-uns, qui avaient encore la force de courir, parvinrent à séchapper. Les Romains rassemblèrent soigneusement ces fuyards, au nombre environ de 800, et les ramenèrent dans leur propre pays après la guerre, poussés par un sentiment de respect envers eux et ladmiration pour leur fidélité exceptionnelle. [30] Comme les cavaliers celtibères, qui servaient Hannibal comme mercenaires, étaient considérés comme des combattants exceptionnels, les généraux romains en Espagne en firent venir un nombre égal des villes qui étaient sous leur domination et les envoyèrent en Italie pour se battre contre leurs concitoyens. Ceux-ci, une fois installés près dHannibal, se mélangèrent avec leurs compatriotes et en gagnèrent à leur cause. Aussi un bon nombre dentre eux passèrent chez les Romains et dautres abandonnèrent ou senfuirent, et le reste navait plus la confiance dHannibal, car il les soupçonnait et eux le soupçonnaient. Les affaires de Hannibal commencèrent à décliner à partir de ce moment.
Posted on: Thu, 31 Oct 2013 14:20:34 +0000

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