Chère famille, Chers amis et parrains, Me revoici à la maison, dans mon beau quartier d’Arafat, à Grand-Yoff. J’ai été accueilli au Points-Cœur par beaucoup d’enfants, heureux de me revoir. Ah ! Combien ils m’ont manqués…leurs visages sont désormais inscrits dans mon cœur et en les revoyant s’est allumée en moi une petite lumière. Dans les jours qui ont suivi, mon cœur était même trop illuminé et rendait grâce à Dieu pour leurs vies et l’amitié qui nous lie. En communauté maintenant nous sommes nombreux, mais jamais trop. Il y a des nouveaux membres : Benjamin, 27 ans, un garçon chilien. Il sera avec nous 16 mois. Jessica, 21 ans, des Etats-Unis, qui sera avec nous 12 mois. Enfin, Charlotte, française, qui sera avec nous 10 mois. Puis il y a Alejandra, Père Thibault et Sathish. Après 14 beaux mois de mission, Irina, roumaine, nous a quittés le 6 octobre. Félicienne, une fille sénégalaise de 18 ans, qui a passé 3 mois avec nous, est aussi rentrée chez elle. Donc après les différents changements, cette année nous seront 7 personnes de 6 nationalités. Pas mal, n’est-ce pas ? Le mois de septembre a été vraiment riche d’événements, de grâce et de beauté. Avant tout je veux vous parler de l’aventure de Kirikou. OUI ! L’AMOURPEUT NOUS POUSSER TRES LOIN! (Père Kolbe) Comme vous le savez, nous, membres de Points-Cœur, il nous plait d’offrir à nos amis des soirées culturelles, qui lient notre charisme de compassion à l’art, la musique, la danse, théâtre etc…Ici au Sénégal, en mars dernier, nous avons organisé une soirée théâtrale, « Kirikou et la sorcière » pour les 20 ans de notre présence ici. Puisque nos enfants ont été vraiment formidables, beaucoup de nos amis nous ont poussés à refaire cette soirée au théâtre national, à côté du palais présidentiel. Ayant réfléchi en amont et en consultant l’avis de nos enfants et adolescents, les « acteurs », nous avons fixé la date du 22 septembre. Et alors notre grande aventure a recommencé. Alejandra s’est aperçue que nos acteurs avaient un peu grandi (entre mars et septembre), alors elle a dû réajuster certains vêtements des scènes, la chorégraphie a dû être revue et enrichie, la scénographie modifiée, et surtout les répétitions ont repris. Oh ! Vous auriez dû voir les visages de nos acteurs, quand pour la première fois ils ont mis leurs pieds au théâtre ! Et je parle du théâtre national, l’unique au Sénégal jusqu’à l’année passée, construit par le premier président sénégalais, L.S. Senghor, et où les Jackson 5 ont donné des concerts. L’émerveillement illuminait leurs visages, en faisant les premiers pas sur la scène, en touchant avec délicatesse le rideau épais rouge velouté, les sièges fixes et bien disposés, les portes de cuir noir. Quelle merveille ! Tout cela a duré une dizaine de minutes, après lesquelles ils se sont tout de suite imprégnés de l’ambiance, ayant commencé à courir partout, ils se sont mis à jouer à cache-cache, un jeu bien adapté pour un théâtre énorme de 1000 places. Tout le mois de septembre donc a été consacré à cette aventure, en alternant bien sûr le tout avec les visites à nos amis du quartier, en les invitant à venir. Puis, il y avait tout le travail de publicité auquel je me suis en partie occupé. Partout nous avons essayé de coller les affiches : dans les églises, les centres éducatifs, à l’université, dans les écoles, les restaurants, les magasins, les magasins pour les enfants, dans les rues, au port, etc… Père Thibault et Irina ont été les metteurs en scène, donc nous les aidions en maintenant le silence. Chacun de nous s’est donné corps et âme afin que, non seulement cette soirée théâtrale soit bien présentée, mais avant tout et surtout afin que l’amitié entre les jeunes et eux avec nous, grandisse, se renforce, devienne vraie ! Et pendant chaque répétition, chaque moment où il fut opportun de le rappeler, nous l’avons répété : « Ce spectacle que nous sommes en train de répéter, n’a pas d’autre but que celui de faire grandir l’amitié. » L’AMITIE EST EXPERIENCE DE PATERNITE Les jeunes chrétiens et musulmans ont vraiment bien joué, et je ne peux pas mettre seulement en évidence l’exceptionnel succès de la soirée, à laquelle plus de 1300 personnes sont venues applaudir nos « stars », (il y avait tant d’enfants que nous avons été obligés de les faire asseoir deux par siège), mais vraiment je loue toute l’organisation qu’il y a eu, le travail fait, les énergies offertes, les prières exaucées et surtout la certitude que tout est offert à Dieu en hymne à la vie. En communauté nous nous sommes occupés de tout. Et même s’il y avait du stress, il n’y a pas eu une seule fois de crise de nerf de la part d’un membre. Cela est dû je crois au fait que nous nous sentions vraiment des pères et des mères pour nos enfants, et aussi que nous étions conscients qu’à travers la fatigue ressentie et nos limites, nous vivions l’expérience d’abandon à la Providence qui nous a beaucoup aidés. J’ai donc compris que notre vie est vraiment un don, est totalement « propriété du peuple auquel nous sommes envoyés ». POURQUOI KARABA LA SORCIERE EST-ELLE MECHANTE ? Petit à petit, nous nous sommes rendus compte que cette aventure de Kirikou est vraiment une belle leçon de vie, et sur le plan philosophique est très objective. Kirikou pose à sa maman la question par excellence, la question la plus importante : Pourquoi ? Il ne demande pas seulement comment je dois vivre ? Mais pourquoi je vis, quel est le sens de mon existence et de celle des autres ? Alors Kirikou vagabonde ici et là pour savoir. Donc il consulte avant tout sa maman, puis le vieux du village, puis son oncle, puis le sage de la montagne. Ces questions sont pertinentes : pourquoi Karaba la sorcière est-elle méchante ? Pourquoi le mal existe-t-il ? Pourquoi il nous semble qu’il y a des personnes consacrées au mal ? Des personnes qui font la guerre ? Des personnes qui se ruinent et qui ruinent les autres ? Et finalement le petit Kirikou obtient la réponse qu’il désire, après une recherche qui lui a coûté beaucoup de fatigue. Il découvre que dans le dos de la sorcière est plantée une épine qui lui fait mal, tellement mal qu’elle n’arrive pas à voir le bien qui est autour d’elle, et la pureté de Kirikou la dérange. « Microbe ! » lui dit-elle, « Je ne veux pas discuter avec toi, car tu n’as pas beaucoup de substance ! ». Kirikou est petit et pur ! Alors d’une façon mystérieuse il arrive à la libérer. Autrement dit, Kirikou n’a pas peur d’affronter le mal. Il n’a pas peur d’affronter la sorcière. Et cette dernière, une fois libérée, découvre la beauté de la vie. Ce n’est pas seulement sa vie qui se transforme, mais tout lui semble plus beau, plus réel : les fleurs reprennent vie, les oiseaux reprennent leur pépiement, le soleil revient, enfin la vie revit. Et les gens du village ont besoin de temps pour comprendre ce phénomène… Tout cela me fait penser à beaucoup de personnes qui souffrent de la solitude. Parfois pendant nos visites nous nous rendons compte qu’il existe beaucoup de Karaba, beaucoup de gens qui souffrent pour un mal ou pour un autre, beaucoup de gens qui souffrent au point qu’ils en perdent l’espérance, le goût de vivre. Et voici que nous, dans notre petitesse, alimentée de l’adoration quotidienne, de la Messe, de la récitation des chapelets, aidés par vous chers parrains, nous réussissons à être des petits Kirikou. Grâce à la foi nous réussissons à être une présence. A ce propos, je laisse la parole au Saint Père le Pape François, qui dans l’encyclique « Lumen Fidei » nous dit : 57. la lumière de la foi ne nous fait pas oublier les souffrances du monde. Pour combien d’homme et de femmes de foi, les personnes qui souffrent ont été des médiatrices de lumière ! Ainsi les lépreux pour saint François d’Assise, ou pour la bienheureuse MéréThérèse de Calcutta, ses pauvres. Ils ont compris le mystère qui est en eux. En s’approchant d’eux, ils n’ont certes pas effacé toutes leur souffrances, ni n’ont pu leur expliquer tout le mal. La foi n’est pas une lumière qui dissiperait toutes nos ténèbres, ma la lampe qui guide nos pas dans la nuit, et cela suffit pour le chemin. A l’homme qui souffre, Dieu ne donne pas un raisonnement qui explique tout, mais il offre sa réponse sous la forme d’une présence qui accompagne, d’une histoire de souffrance pour ouvrir en elle une trouée de lumière. Dans le Christ, Dieu a voulu partager avec nous cette route et nous offrir son regard pour y voir la lumière. Le Christ est celui qui, en ayant supporté la souffrance, « est le chef de notre foi et la porte à la perfection » (He 12, 2). Certes, nous ne sautons pas au dos de nos amis pour les libérer du mal, mais avec notre amitié fidèle, nous leur faisons comprendre que le bien existe, que nous pouvons porter avec eux le mal qui les ronge, jusqu’au point de ne pas pouvoir dormir la nuit, tant il est vrai que nous ne sommes pas tranquilles en pensant à leur mal. Et c’est beau de découvrir la puissance de la simple présence qui accompagne, rassure, redonne force, soutient et compatit. Voilà, chers parrains, j’espère n’avoir pas été trop long. J’aimerais partager avec vous encore beaucoup de belles choses que je vis ici chaque jour à Dakar, devant lesquelles je suis émerveillé, tant elle est grande la grâce que Dieu me permet de vivre dans ce pays extraordinaire. Je vous porte dans mes prières quotidiennes et je me confie aux vôtres. Le 21 octobre jai commence ma deuxième année de philosophie. N’hésitez pas à me confier des intentions. Vôtre dans le Christ, Abou Bâ Cesare Linguetta Point-Cœur ST. Monique Arafat, Grand-Yoff B.P. 13099 Dakar SENEGAL
Posted on: Fri, 25 Oct 2013 18:33:41 +0000