Djaffar Benmesbah L’Egypte entre Moise et Pharaon La pyramide - TopicsExpress



          

Djaffar Benmesbah L’Egypte entre Moise et Pharaon La pyramide croule sur l’Egypte et sur le net défilent, en harmonie simulée, la Pravda des démocrates de farce, friands des solutions militaires et l’hystérie burlesque des charlatans, hypocrites inconditionnels de l’islamisme, drapé du vestimentaire élégant des Koufar. Ne pas condamner la répression du général criminel égyptien Abdelfatah Khalil Al Sissi ou taire la nature fourbe et non moins criminelle des islamistes et leur maitre à penser Mohamed Morsi, c’est se vouloir, vaille que vaille, protagoniste du drame avec à la main l’emblème du sang. Refuser d’abdiquer devant l’un et devant l’autre, c’est refuser aussi de renvoyer la facture du désastre aux générations à venir. L’urgence est de lutter contre les facteurs qui mènent indéniablement à ce type de situations tragi-comiques, lesquelles ne trouvent leurs dénouements que dans le sang : voilà l’ambition de tout être civilisé. La dérive ne commence pas au lendemain de l’élection d’un islamiste à la magistrature suprême, les démocrates y ont contribué car une fois l’élection proche, ils s’y engagent en rangs dispersés et chacun jouit de l’illusion de voir briller son étoile personnelle au-dessus de celles des autres. La dérive ne commence pas au soir de la déposition du Président Morsi que l’on dit contraire à la légalité constitutionnel et aux valeurs démocratiques, à ne pas perdre de vue que Hitler a été porté au pouvoir par les urnes. La dérive dans tout le sous-continent nord-africain est dans l’acceptation et l’officialisation en terme politique d’un quelconque parti islamiste mais avant tout, cette dérive est une suite logique au silence des intellectuels. C’est une erreur que de croire que la question de la séparation du politique et du religieux doit-être discutée que par des partis et les hommes politiques, elle devrait être posée par les intellectuels et les scientifiques qui sont les plus concernés tant ils portent en eux la charge du gout de l’esprit et de sa garantie. C’est à l’élite qu’il revient de hâter le renouvellement des idées, de faire participer la majorité silencieuse à l’entrain de l’expression, de préparer la société à sa propre évolution et de l’aider à se débarrasser des inepties qui n’ont aucun intérêt pour sa santé morale. Trop de confusions entourent le sens de la laïcité que les plumes mercenaires des islamo-baathistes ont bien voulu confondre intentionnellement avec l’athéisme et, hélas, ces confusions se nourrissent du silence des intellectuels. Tout comme l’Algérie, tout comme le Maroc, tout comme la Tunisie, tout comme la Lybie, l’Egypte est subitement orpheline de son intellectualité. Comme si l’esprit nord-africain a disparu avec les mémoires tout le temps assassinées par l’oubli, des Sidi Kaddour El Alami, Kateb Yacine, Ali Douagi, Suleyman Al Baruni, Taha Hussein… Aujourd’hui, ils se comptent sur les doigts de la main les intellectuels qui assument leurs responsabilités dans le sens d’une révolution des consciences politiques et d’un questionnement existentiel. Peu d’intellectuels visent l’esprit critique des croyants crédules excités par des islamistes zélés. Peu objectent l’ingérence de la religion dans la sphère publique. Critiquer tout précepte culturel qui limite les libertés et les droits humains sans vexer le croyant en tant qu’individu, cela s’appelle modernité. On n’est pas moderne parce qu’on sort avec une fille en mini-jupe dans une décapotable avec un chapelet suspendu de ses boules noires au rétroviseur. Il faut s’avoir éviter de confondre la modernité avec le modernisme. Sans vouloir défendre des religieux par le rationnel, la contribution d’hommes de religion musulmane au principe de la laïcité est visible et certains hommes de foi l’ont assumée au risque de leur vie. Pour répondre aux souteneurs acharnés du président Morsi, en 1925, un porte-parole autorisé de l’institution juridico-théologique de l’islam, l’imam d’Al Azhar Ali Abderrazik écrit un livre manifeste "L’Islam et les fondements du pouvoir" pour démontrer que si le prophète a été commandeur des croyants, ce fut une parenthèse historique et non un modèle à reproduire. Ce docteur de l’islam conseillait aux musulmans de réfléchir à la création d’un État et d’un système de gouvernement sur la base de la raison humaine. Le fait qu’il ait été mis à l’écart et exclu du corps des ulémas n’a pas empêché ses pensées de servir d’éminents philosophes et historiens de l’islam à l’exemple du regretté Mohammed Arkoun. En 1985, un imam soudanais Mahmoud Taha, ancien opposant du gouvernement colonial britannique, avait suggéré une réflexion sur "le libre arbitre et la responsabilité individuelle". Il sera pendu sur ordre du président Jaafar Noumeiri qui sera à son tour déchu par les islamistes qu’il courtisait. Pour échapper à la pendaison, un théologien éclairé libyen, Assadeq Annaïhoum, dut se réfugier en Angleterre. Et c’est à partir de Londres, en 1993, qu’il lançait une revue obstinément laïque, An-Naqid, dans laquelle il déclarait que l’islam n’a jamais parlé de délit d’apostasie et que le hijab est une construction idéologique. Des penseurs religieux admettent – malheureusement, ils sont rares - qu’on peut être tout naturellement laïque et musulman, laïque et chrétien, laïque et juif, laïque et athée. Ils interviennent dans les domaines de la laïcité que les intellectuels non religieux ont délaissés. Manquent-ils de courage ? Il est vrai que l’opposition au penseur laïc a toujours été sauvage, pas du tout intelligente par la réflexion mais toujours escortée par la force de l’État. En parlant de l’Etat – tous les Etats nord-africains- les intégristes n’ont ni l’intelligence ni le dynamisme nécessaire pour intégrer les institutions de l’État si celui-ci ne leur envoie pas l’ascenseur. Les régimes nord-africains à l’exemple de celui de Bouteflika veulent un État arabo-islamisme ratifié par la primauté de la religion sur la citoyenneté et ainsi tous les domaines de la vie des individus sont régentés par la religion. Ça restera ainsi tant que les intellectuels laïques convergent en privé. Le dogme religieux n’a pas la peau dure et si les intellectuels décident enfin de mettre leur lumière à contribution, tous les archaïsmes finiront aux orties. Djaffar Benmesbah.
Posted on: Mon, 19 Aug 2013 15:42:41 +0000

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