LA DYNASTIE ABBASIDE... ET C’EST ELLE QUI PRIT LE POUVOIR DES - TopicsExpress



          

LA DYNASTIE ABBASIDE... ET C’EST ELLE QUI PRIT LE POUVOIR DES MAINS DE LA DYNASTIE OUMAYYADE Sache, lecteur, que cette dynastie a été fourbe, astucieuse et perfide, plus féconde en ruses et en tromperies que forte et énergique, surtout dans ses dernières années. Car les derniers princes Abbassides paralysaient la vertu dun gouvernement ferme et puissant, pour avoir recours à des supercheries, et à des tromperies. A ce sujet le poète Kechadjem[145] dit, en faisant allusion à la vie paisible des gens dépée, et à linimitié des gens de plume, qui vivaient en guerre les uns avec les autres. « Quelle profite aux gens dépée cette indolence et ce repos dans lesquels ils coulent leurs jours, jouissant des douceurs et des délices, de la vie. » « Combien dentre eux ont quitté le monde, sans avoir jamais pris part à un combat, sans sêtre précipité dans une mêlée opiniâtre. » « Matin et soir ils se promènent, portant dans son fourreau une épée dont le tranchant non encore employé na reçu aucune brèche. « Mais les gens dépée, jamais leurs épées ne restent sans être humectées de sang. » Un autre poète adressa ces vers à Motewekkel, lors quil eut fait mourir son ministre Mohammed ben Abd-elmélik Alzeyyat. « Peu sen est fallu que le cœur ne nous manquât par lexcès de la douleur, lorsquon a appris le meurtre du vizir. » « O émir des croyants, tu as donné la mort à lhomme qui faisait mouvoir ton empire ! » « Patience, patience, ô enfants dAbbas, votre perfidie a ulcéré nos âmes. » Cependant cette même dynastie a fait un grand nombre de belles actions et de traits de générosité. Pendant sa durée les sciences et les lettres ont fleuri ; les préceptes de la religion ont été respectés ; les bonnes œuvres pratiquées avec éclat, les provinces dans un état prospère, les défenses de la loi observées ; les frontières bien défendues. Lempire est resté, dans cette situation jusquaux derniers temps de la monarchie des Abbassides. Alors leurs affaires se sont embrouillées, et la puissance a passé en dautres mains. Nous raconterons ceci dans son lieu, sil plait à Dieu. Mais il est temps de passer à lhistoire particulière de chaque calife. I. — RÈGNE DE SAFFAH (132/749-136/754) Le premier des Abbassides qui aient possédé le califat, est Al-Saffâh, qui se nommait Aboul-Abbas Abd-Allah Mohammed ben Ali ben Abdallah ben al-Abbas ben Abd-almothalib. Il fut salué calife en 132. Cétait un bon prince, doux, modeste, sage, doué de toutes les qualités, plein de retenue, et dun beau moral. Après son inauguration, lorsquil fut pleinement investi du pouvoir, il sattacha à la poursuite des restes des Omeyades, et des principaux personnages de cette famille, et les immola. Un jour quil donnait audience, et que Soleïman ben Becham-ben Abd-almélik[146] Omeyade, auquel ils témoignent une grande considération, se trouvait près de lui, le poète Sodaïf[147] entra et récita ces vers : « Ne te laisse point abuser par la conduite et les démonstrations de certains personnages distingués : ces apparences cachent un mai dangereux. » « Frappe de lépée, tiens le fouet élevé, jusquà ce que tu ne voies plus dOmeyade sur la terre.[148] Soleïman se retourna vers Sodaif et lui dit : « Tu nous a tués ! ô cheikh ! » En effet Al-Saffâh entra, et Soleïman fut pris et immolé.[149] Un autre poète entra chez le calife au moment où le repas était servi ; soixante et dix Omeyades y assistaient : il récita ces vers : « La puissance souveraine sest établie sur des bases solides, grâces aux princes illustres et courageux de la maison dAbbas. » « Ils ont cherché à venger Hachem et ont satisfait cette vengeance, après que la fortune leur a été contraire, et que lespoir les avait abandonnés. » « Ne faite, grâce daucune faute à Abd-chems ; [150] coupez les rameaux et les rejetons. » « Par un effet de leur bassesse et de leur avilissement, ils vous témoignent une fausse amitié : Hé bien donc, soyez comme le tranchant du rasoir, auquel rien néchappe.[151] » « Jai été irrité, et dautres que moi lont été aussi, de les voir en possession des coussins et des trônes. » « Faites-les descendre où Dieu a désigné leur place, dans la demeure de lavilissement et de loubli. » « Souvenez-vous du meurtre de Hossein et de Zéïd ; souvenez-vous du martyre de Mehras[152] ; de lAbbasside tué à Harrân, [153] où il repose enseveli, loin de son sol natal, et dans loubli.[154] » Un des Omeyades qui étaient présents, se retourna vers son voisin et dit : Le poète nous porte le coup mortel. Par lordre dAl-Saffâh on les tua tous à coups dépées ; on étendit des tapis sur leurs cadavres, et Al-saffah sétant placé sur ces victimes, prit son repas et entendit les cris que poussaient les mourants, jusquà à ce quils eussent tous expiré. Les Abbassides sefforcèrent deffacer jusquaux plus faibles vestiges de la famille dOmmaiah ; ce fut au point quils exhumèrent les tombeaux de ces princes à Damas. Ils ouvrirent le tombeau de Moawiah Ibn Abi Soufyân et ny trouvèrent que de légers filaments, semblables à cette poussière que font voler les rayons du soleil ; ils ouvrirent aussi le tombeau de Yézid, et y rencontrèrent quelques portions dor réduites en poussière. Le règne dAl-Saffâh ne fut pas de longue durée : il mourut à Anbar en 136.[155] DE lETAT DU VIZIRAT SOUS LE REGNE DE SAFFÂH Il est indispensable, avant dentrer dans le sujet, de dire quelques mots de préambule sur cette institution. Je dis donc que le vizir est un intermédiaire entre le prince et ses sujets ; il faut, par conséquent, quil y ait dans sa nature une moitié capable de saccorder avec le tempérament dun monarque, et lautre, avec le tempérament de la foule, pour traiter chacun de ces deux partis avec des procédés qui lui attirent le bon accueil, laffection et la confiance ; et son capital, cest la droiture. On dit en proverbe : « Quand le mandataire trompe, le plan périclite. » Et aussi : « Celui à qui lon fait un rapport mensonger, ne saurait prendre de sage décision. » La capacité et la fermeté doivent être au nombre de ses principales qualités ; lintelligence, la vigilance, la finesse, la résolution sont au nombre de ses qualités indispensables, et il ne sera pas dispensé dêtre somptueusement généreux et hospitalier, pour que les sujets du prince aient pour lui de linclination, et pour quil lui sait rendu grâces par toutes les bouches ; et la bienveillance, la longanimité, lattention réfléchie dans les affaires, la douceur, la dignité, la fermeté et lexécution des ordres quil donne sont les qualités dont il a absolument besoin. Lorsque Nasir prit comme vizir Mouayyad ad-Din Muhammad, fils de Barz, de Qoum, il le revêtit des insignes du vizirat. Puis, le Qoumite siégea solennellement en qualité de vizir, devant tout le peuple rassemblé. Et il émana de Sa Majesté le khalife une charte minuscule, grande comme le petit doigt, écrite de la main de Nasir. Elle fut alors lue à la foule, et voici ce quelle contenait : « Au nom dAllah le Clément, le Miséricordieux ! Muhammad, fils de Barz, de Qoum, est notre lieutenant en ce qui concerne le pays et nos sujets. Celui qui lui obéit, nous obéit, et qui nous obéit, obéit à Allah, et qui obéit à Allah, Allah le fera entrer dans le paradis ; et celui qui lui désobéit nous désobéit, et qui nous désobéit, désobéit à Allah, et qui désobéit à Allah, Allah le fera entrer dans le feu. » Ce rescrit accrut le prestige du Qoummite aux yeux de la foule ; par lui son autorité grandit, et le respect du vizir monta dans les cœurs. Les bases du vizirat ne furent établies, et ses règles ne furent fixées que sous la dynastie des Abbasides. Avant ce temps, ses bases nétaient pas fixées, ni ses règles établies : mais seulement chaque prince avait des hommes formant son entourage et une suite ; quand une affaire se présentait, il consultait les hommes dintelligence et de bon jugement, et chacun deux remplissait ainsi loffice de vizir. Mais quand les Abbâsides commencèrent à régner, les statuts du vizirat furent arrêtés, et le vizir prit le titre de vizir ; il sappelait auparavant secrétaire kâtib ou conseiller (mouchîr). Les linguistes disent : ouazar signifie refuge, abri ; ouizr signifie charge ; alors vizir est tiré soit de ouizr, et dans ce cas il signifie celui qui supporte la charge, soit de ouazar, et, dans ce cas, il signifie celui à qui lon revient et à lopinion et à lexpérience de qui on a recours. Et de quelque façon que lon retourne la ratine ouazara, on trouve quelle indique soit lidée de refuge, soit celle de charge.[156] Le premier vizir qui occupa les véritables fonctions de vizir auprès du premier khalife abbâside est Hafs, fils de Soulaimân Abou Salama al-Khallâl (le vinaigrier). Il était un affranchi des Benou Hârith, fils de Kab. On donne trois explications de son surnom dal-Khallâl (le Vinaigrier). La première est que sa résidence à Koûfa avoisinait le quartier des marchands de vinaigre, quil fréquentait ; ainsi son surnom fut tiré de leur profession, comme al-Gazzâlî[157] (le Fileur) reçut son nom des fileurs (al-gazzâlîn), quil fréquentait beaucoup. Jai vu, pourtant, à cette dénomination dal-Gazzâlî, une explication différente. On dit, en effet, quil aimait faire l’aumône aux femmes pauvres qui se présentaient au marché au fil pour vendre leur fil, et voyant leur dénuement, leur pauvreté et la modicité de leurs gains, il prenait compassion delles, leur faisait de grandes aumônes, et engageait les autres à leur donner : de là son surnom. La seconde explication de ce nom dal-Khallâl est celle-ci : il aurait eu des boutiques où lon fabriquait le vinaigre, doù viendrait son surnom. Daprès la troisième explication ce serait un relatif tiré des khilal des épées — cest-à-dire les fourreaux. Abou Salama était un des plus riches personnages de Koûfa, et il faisait de grandes dépenses en faveur des hommes de la propagande abbâside ; et la cause de son alliance avec les Abbâsides, la voici : il était gendre de Boukair, fils de Mahân, [158] lequel était secrétaire particulier de limâm Ibrahim. Lorsque Boukair fut sur le point de mourir, il dit à limâm Ibrahim : « Jai un gendre à Koûfa, nommé Abou Salama al-Khallâl ; je lai établi à ma place pour diriger laction de votre parti. » Puis il mourut. Alors, Ibrahim limâm écrivit à Abou Salama pour lui annoncer ces nouvelles, et en lui donnant des instructions pour les affaires du parti. Et Abou Salama devint le chef de la propagande abbâside, quil dirigea avec autorité. Mais, ayant sondé le fond des Abbâsides, il résolut de se séparer deux et de passer au camp des Alides. Il écrivit donc aux trois plus grands représentants de cette famille : Djafar, fils de Muhammad as-Sâdiq, Abd-Allah, surnommé le Pur, fils de Hasan, fils de Hasan, fils d’Ali, fils dAbou Thâlib, et Omar al-Achraf, fils de Zain al-Abidin, et il confia les lettres à lun des affranchis de cette famille, en lui disant : « Va trouver dabord Djafar, fils de Muhammad as-Sâdiq ; sil accepte, détruis les deux autres lettres ; sinon, va trouver Abd-Allah le Par] sil répond favorablement, détruis la lettre destinée à Omar ; sinon, va trouver Omar. » Lenvoyé alla donc trouver dabord Djafar, fils de Muhammad, et lui remit la lettre dAbou Salama. Il répondit : « Quai-je à faire avec Abou Salama, qui est partisan dune autre famille que la mienne ? » Lenvoyé lui dit : « Lis la lettre. » Mais as-Sâdiq dit à un esclave : « Approche la lampe. » Quand elle fut approchée, il prit la lettre et la consuma à la flamme. Lenvoyé lui dit : « Tu ne réponds pas ? — Tu as vu ma réponse «, dit as-Sâdiq. Alors lenvoyé sen vint trouver Abd-Allah le Pur et lui présenta sa lettre. Il la lut, lui fit bon accueil, et partit aussitôt trouver as-Sâdiq et lui dit : « Voici une lettre dAbou Salama. Il mécrit pour moffrir le khalifat ; et cette lettre mest apportée par la main dun de nos partisans du Khorasan. » Mais as-Sâdiq lui dit : « Depuis quand les gens du Khorasan sont-ils tes partisans ? Leur as-tu envoyé Abou Mouslim ? En connais-tu un seul de nom ou de vue ? Et comment seraient-ils tes partisans, quand tu ne les connais pas et quils ne te connaissent pas ? — On dirait, riposta Abd-Allah, quil y a derrière tes paroles une chose que tu ne dis pas. » As-Sâdiq répondit : « Dieu sait que je me suis imposé de toujours donner le bon conseil à tout Musulman ; comment ten priverais-je ? Aussi, ne te laisse pas attirer par des chimères ; car cette souveraineté écherra certainement à ces gens-là ; [159] et javais reçu avant toi une lettre pareille à la tienne. » Abd-Allah sortit de chez lui, mécontent. Quant à Omar, fils de Zain al-Abidîn, il repoussa la lettre en disant : « Je ne connais pas son auteur pour avoir à lui répondre. » Abou Salama échoua dans son projet ; le parti abbâside fit son œuvre, et Saffâh fut nommé khalife. Cette histoire lui fut rapportée par une bouche malveillante ; le khalife «n conçut une vive rancune contre Abou Salama, et il le fit mettre à mort. QUELQUES MOTS SUR SA VIE ET SUR SON MEURTRE Abou Salama était un homme bienveillant, généreux, très hospitalier, très libéral, très amateur délégance en armes et en chevaux, beau parleur, connaissant bien les anecdotes, les poésies, la biographie, la controverse et lexplication du Coran ; toujours prêt à la réplique, grand seigneur, et dun noble caractère qui frappait ceux qui lapprochaient. Lorsque Saffâh fut reconnu khalife, il le prit comme vizir, lui confia les affaires et lui remit la direction des administrations ; il fut surnommé le Vizir de la famille de Muhammad ; mais Saffâh méditait déjà sa perte. Saffâh eut peur, en tuant lui-même son vizir Abou Salama, déveiller les soupçons dAbou Mouslim et de le voir se hérisser de colère comme une panthère ; aussi il usa de finesse et écrivit à Abou Mouslim une lettre[160] pour lui apprendre le projet quavait formé contre lui son vizir, de transporter le pouvoir en dehors de leur famille ; 210 il ajoutait : « Je lui pardonne son crime par considération pour toi. » Mais ce qui se dégageait de cette lettre, cest que la nécessité simposait de trouver juste lexécution du vizir. Il envoya la lettre par son frère Mansour ; et dès quAbou Mouslim eut achevé de la lire, il comprit le désir de Saffâh ; il envoya alors une troupe dhommes du Khorasan, qui tuèrent Abou Salama. Alors le poète dit : Le vizir, le ministre de la famille de Muhammad a péri. Que quiconque te déteste soit vizir[161] ? Le salut commence à luire, et souvent on devrait se réjouir de ce qui inspire de la répugnance.[162] FIN DU VIZIRAT D’ABOU SALAMA. On n’est pas daccord sur son successeur auprès de Saffâh. On dit que ce fut Abou-l-Djahm, [163] dautres Abd er-Rahman. Pour Abou-l-Djahm, il fut vizir de Saffâh un ce tain temps ; et lorsque le khalifat échut à Mansour, le nouveau khalife, qui avait beaucoup de choses contre lui, lui servit de la pâte damandes empoisonnée. Quand il saperçut quil avait pris du poison, il se leva pour sen aller. « Où vas-tu ? lui dit Mansour. — Où tu mas envoyé. Émir des Croyants, » dit al-Djahm. Souli[164] prétend que Saffâh eut comme vizir, après Abou Salama, Khalid, fils de Barmak. HISTOIRE DU VIZIRAT DE KHALID, AVEC QUELQUES MOTS SUR SA VIE Ce Khalid est l’aïeul des Barmékides ; et en ce temps-là il faut trouver lorigine de la lignée barmékide, qui prit lexpansion que lon sait jusquà sa fin, sous le règne de Rachid. Khalid était un des hommes les plus marquants de la dynastie abbâside. Cétait un homme éminent, considérable, généreux, ferme, vigilant. Saffâh le prit comme vizir, et il ne lui pesa pas. Il portait le titre de vizir. On dit aussi pourtant que tous ceux qui furent chargés du vizirat après Abou Salama évitèrent le titre de vizir, car cétait un mot de mauvais augure depuis lhistoire dAbou Salama, et à cause de ce vers du poète : Ton vizir, le vizir de la famille de Muhammad a péri. Que quiconque le déteste soit vizir ! Ainsi Khalid, [165] fils de Barmak, remplissait loffice de vizir, sans en porter le titre. Khalid jouissait dune grande considération auprès des khalifes. On rapporte que Saffâh lui dit un jour : « Khalid, tu nas été satisfait que lorsque tu as fait de moi ton serviteur ? » Khalid trembla, et dit : « Prince des Croyants, comment cela, moi qui suis ton serviteur et ton esclave ! » Le khalife sourit, et dit : « Ma fille Raita[166] sendort avec la tienne ; je surviens au milieu de la nuit, et je les trouve toutes deux, et leur couverture a glissé à côté delles. Alors moi je lai remise sur elles. » Khalid baisa sa main et dit : « Cest lhistoire dun maître à qui son serviteur et sa servante doivent une récompense ! » Il y avait foule darrivants à la porte de Khalid, fils de Barmak ; les poètes venaient chanter son éloge, chacun avec la pensée de recevoir sa récompense ; et ceux qui accouraient ainsi auprès des puissants sappelaient auparavant souât, cest-à-dire quémandeurs ; mais Khalid dit : «Je trouve ce mot trop bas pour de pareilles gens parmi lesquels on rencontre des nobles et des grands, et il les appela visiteurs. Et Khalid fut le premier à les appeler ainsi. Et lun deux s’écria une fois : « Par Allah, nous ne savons pas lequel de tes bienfaits envers nous est le plus excellent, si cest la récompense ou le nom que tu nous donnes. » Mais on prétend aussi que cest Mousâouir, [167] fils de Noumân, sous les Omeyyades, qui innova cette façon dagir. Lorsque Mansour bâtit la ville de Bagdad, et que la dépense commençait à lui paraître lourde, il reçut dAbou Ayyoub al-Moûriyâni[168] ce conseil, de démolir le palais de Chosroès et demployer à Bagdad ses matériaux. Le khalife demanda là-dessus lavis de Khalid, fils de Barmak, qui lui répondit : « Ne fais pas cela, Emir des Croyants ; ce palais est lemblème de l’Islâm ; quand les gens laperçoivent, ils voient quune pareille construction ne peut être détruite que par une cause surnaturelle, et cest en même temps loratoire dAli, fils dAbou Thâlib. Et la dépense de la démolition dépassera le profit quon en tirera. » Mais Mansour répondit : « Tu veux, Khalid, rester toujours Persan.[169] » Puis Mansour donna lordre de démolir ; on nen fit tomber quun morceau de pan, et la dépense dépassa ce que Ton en tira. Mansour arrêta alors la démolition, et dit : « Khalid, nous nous sommes rendus à ton avis, et nous abandonnons la démolition du Palais. — Emir des Croyants, répondit le vizir, je te donne à présent le conseil, moi, de le détruire, pour que les gens naillent pas dire que tu as été incapable de détruire ce que dautres avaient édifié.[170] » Mais le khalife épargna le Palais, et arrêta là la démolition. Certain poète écrivit ces vers pour Khalid, fils de Barmak, le jour de Nôrouz, [171] alors que lon faisait à Khalid des cadeaux, parmi lesquels figuraient des coupes dargent et d’or : Je voudrais savoir si vous ne nous réservez pas quelque aubaine, ô présents du vizir, le jour de Nôrouz ! Cela ne compte guère aux yeux de Khalid, fils de Barmak, au chapitre des générosités, quun cadeau dont il fait cadeau ! Que nai-je une coupe dargent de tous ces présents, en dehors de ce que le vizir voudra bien me donner lui-même ! Je la convoite pour le miel à y mélanger avec de leau (hydromel) et pas pour le pissat dune vieille femme ! Alors le vizir lui accorda tout ce qui était exposé devant lui, de vases dargent et dor, et tout cela atteignit une somme considérable. Lorsque Mansour prit possession du khalifat, il le maintint au vizirat ; il le comblait dhonneurs et recourait à ses avis. FIN DE LADMINISTRATION DES VIZIRS DE SAFFÂH, ET EN MÊME TEMPS FIN DE SON RÈGNE.
Posted on: Sat, 23 Nov 2013 22:19:05 +0000

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