Programmes indigestes, classes surchargées, méthodes - TopicsExpress



          

Programmes indigestes, classes surchargées, méthodes inadaptées... Du primaire à luniversité, le système denseignement public a désespérément besoin dune refonte dans le monde arabe. École de garçons dImbaba, dans un quartier pauvre du Caire. M. Nabawi, professeur dhistoire et de géographie, ne cache pas son exaspération quand on lui demande si les devoirs de ses élèves nécessitent des recherches sur internet. Nous navons ni le temps ni les moyens de lexiger, répond-il dun ton dédaigneux. Nous nous contentons de suivre le programme. Si je leur demande de faire des recherches, ils ne termineront pas le devoir. Ici, les classes peuvent compter 40, 50, voire 60 élèves. Ils sont incultes, et internet les rend encore plus ignorants. Et lenseignant, qui refuse de donner son nom complet, de se diriger vers la sortie du lycée pour négocier avec une mère des cours particuliers pour son fils. Dans un système éducatif saturé qui se soucie peu dinculquer aux élèves la capacité de penser par eux-mêmes, le travail des professeurs particuliers consiste à aider les jeunes à mémoriser des programmes souvent verbeux et abrutissants. Et à leur fournir des réponses types que les lycéens sont encouragés à apprendre par coeur pour les régurgiter sur leurs copies. >> Lire aussi : En Égypte, léducation peine à se mettre au niveau Les programmes indigestes, les écoles surpeuplées et le recours aux cours particuliers ne sont pas le lot de la seule Égypte. À écouter parents, professeurs et observateurs, le secteur de léducation est en crise dans lensemble du monde arabe. Les problèmes sont moins aigus dans certains pays, comme au Liban, au Qatar et dans les Émirats arabes unis, qui sen tirent bien dans les classements internationaux en matière déducation. Mais ailleurs, du primaire à luniversité, les systèmes denseignement public ont désespérément besoin dune refonte. Engorgés et sous-financés, les systèmes nationaux produisent une foule de diplômés mal formés en quête demploi dans la fonction publique. Et les employeurs se plaignent souvent du manque de dynamisme et de compétences exigés dans le secteur privé. Les qualités valorisées par les économies modernes - comme le sens de linitiative, la créativité et les capacités à résoudre des problèmes - sont trop rares, disent-ils. Le Rapport 2013 sur la compétitivité mondiale place ainsi lÉgypte au dernier rang, sur 148 pays, quant à la qualité de lenseignement primaire. Le Yémen est avant-dernier, alors que lAlgérie et la Libye occupent la 131e et la 132e place. >> Lire aussi : Mohammed VI critique la politique éducative du gouvernement islamiste Lécole primaire : insuffisante pour avoir des connaissances de base Selon le Rapport mondial de suivi sur léducation pour tous publié par lUnesco, le primaire dans le monde arabe nest souvent pas de qualité suffisante pour garantir à tous lacquisition des connaissances de base. Une étude de 2007 faisait apparaître que 53 % des lycéens égyptiens âgés de 13 ans à 14 ans natteignaient même pas les standards internationaux les plus bas en mathématiques. Pauline Rose, directrice dudit rapport, affirme que 35 % des enfants arabes qui arrivent en quatrième année ne remplissent pas les critères minimums de lecture et de compréhension et ne maîtrisent pas les opérations mathématiques de base. Je ne pense pas quil y ait un pays dans le monde arabe où lon puisse dire que les résultats sont bons, déclare-t-elle. La Jordanie faisait mieux, mais des [études] récentes montrent que le niveau na pas progressé, et sest même un peu dégradé. Dans une région où la moitié de la population a moins de 24 ans, les ressources sont surexploitées et les effectifs sont souvent bien trop importants pour que les professeurs puissent suivre chaque élève individuellement. La pression pour faire de la place à la cohorte suivante conduit à laisser passer de classe ceux qui devraient redoubler. Il y a des enfants qui arrivent en dernière année décole élémentaire en étant à peine capables de lire, indique Nayra Ijeh, une consultante égyptienne en matière déducation. Ils passent grâce à la tricherie collective. Il arrive même que des professeurs à lextérieur des salles dexamens leur hurlent les réponses au mégaphone. Mais elle nen a pas moins rencontré des enseignants et des proviseurs de qualité, et de bons établissements qui réussissaient en dépit du système, jamais grâce à lui. >> Lire aussi Le baccalauréat au Maroc : à lécole de la triche Lapprentissage machinal : un des principaux défauts du système éducatif Les observateurs soulignent que lun des principaux défauts du système éducatif, en Égypte et ailleurs dans le monde arabe, est la dépendance à lapprentissage par coeur, lequel ne peut inculquer la pensée critique, préalable indispensable au progrès et à linnovation. La notion [qui sous-tend léducation universitaire en Égypte] est quil y a une somme finie de savoir, explique Khaled Fahmy, professeur dhistoire à luniversité américaine du Caire. On a donc un livre standard qui doit être enseigné, et les étudiants sont censés acquérir ce seul savoir. Labsence de bibliothèques explique le peu de recherches effectuées. Le professeur délivre un cours qui nest que la répétition du manuel de base, et les étudiants ne sont examinés que sur ce contenu. Professeur de mathématiques à luniversité du Caire, Hany al-Husseini reproche au système de navoir pour horizon que lexamen et déplore que les équipes universitaires soient sous pression pour faire passer autant détudiants que possible, sans considération de leur niveau réel. La faculté où il enseigne nest pas très demandée, la recherche scientifique en Égypte étant essentiellement le fait dinstitutions dÉtat, lesquelles rémunèrent mal. Les sciences sont considérées comme des disciplines un peu marginales et même un peu excentriques, regrette-t-il. La possibilité de gagner de largent y est limitée. La plupart des étudiants viennent ici parce que leurs notes ne leur permettent pas daller ailleurs. Ils ne sont pas motivés. Mais nous considérons que notre mission est de déceler les plus doués dès la première année, de les extraire du système de lapprentissage machinal et de leur donner une bonne formation. ________ Par Heba Saleh
Posted on: Thu, 21 Nov 2013 21:15:34 +0000

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