Roger Federer fut génial et il l’est toujours. Le fait qu’il - TopicsExpress



          

Roger Federer fut génial et il l’est toujours. Le fait qu’il ne brille pas cette saison n’altère en rien son génie. Qu’il perde contre des inconnus, qu’il peine, qu’il ne redevienne jamais plus numéro un mondial, n’enlève rien à ce que fut sa perfection. Ce qui est valable pour Mozart l’est aussi pour lui: quand on a été Federer un jour, on le reste toujours. Et l’on n’appartient à personne. Ni aux médias évidemment, ni même au public suisse qui s’est identifié à ce champion comme jamais à aucun autre avant lui. Ce public dont la fibre patriotique vibre si délicieusement à chaque fois que son « Rodgeur » gagne. Ce public - si versatile et prompt à brûler ce qu’il a adoré - au sein duquel certains s’agacent aujourd’hui de voir notre monument national perdre quelques plumes. Au point d’oser presque le prendre en pitié. Au point même de lui demander de se plier à cette injonction: « Roger, ou tu brilles et tu gagnes encore, ou tu prends ta retraite ! » La victoire ou l’effacement, rien que ça. Rien de moins. Je ne suis pas de ceux-là. Car outre le fait que se retirer du circuit ne regarde que lui, il y a, dans cette incitation carnassière à lui demander de gagner ou alors de quitter la scène, une logique consternante selon laquelle tout se résumerait à ceci: gagner ou perdre. Une vision très étriquée du sport. Car c’est bien d’autre chose qu’il s’agit avec Federer. Avec lui on est au-delà de la comptabilité boutiquière des victoires et des défaites. A un génie on ne demande rien, on s’en souvient… Picasso aussi a peint quelques croûtes, et alors ? Cela ôte-t-il quoi que ce soit à son œuvre ? Une évidence demeure: par son exceptionnel talent et par son travail, Federer a fait du tennis un art, il a enchanté le monde, marqué l’histoire de ce sport et donné de la Suisse la meilleure des images. Un jour nous pourrons dire: « Je l’ai vu jouer, je m’en souviens, c’était vraiment fabuleux... » Oui, tout est là, dans cette grâce, cette élégance, ces merveilleuses fulgurances qui furent les siennes. Le tennis comme un poème et ces heures de directs mémorables où nous admirions la beauté de ses gestes. Car sans beauté à quoi rime le sport ? A de la viande en mouvement, à de la productivité, à de dérisoires statistiques. Certes, à 32 ans il illumine moins qu’il ne fatigue. Certes, il plie, il souffre, il perd. La haute compétition est impitoyable avec le corps des athlètes. Le combat contre l’âge est un combat sans espoir; et le maquillage ici ne fait pas illusion. Même lui, Federer, n’échappe pas à la loi physique selon laquelle « on ne peut pas être et avoir été ». D’une certaine manière, il fait déjà partie de notre passé, de notre mémoire collective. Et alors ? Il restera toujours un champion génial. Même s‘il décline. Car effectivement il décline. Comme vous et moi. Et en ce sens, il nous est plus proche aujourd’hui dans ses défaites qu’il ne le fut jamais du temps de sa gloire.
Posted on: Tue, 20 Aug 2013 21:28:19 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015