SOIRÉE CULTURELLE. Le libraire me présenta Mademoiselle Tallarolo, une institutrice portant une robe de tarlatane et d’organdi, qui achetait Giraudoux, Morand, Agatha Christie en édition de poche ainsi que le dernier livre d’Amélie Nothomb, puis son compagnon, le professeur Granadoire qui enseignait les lettres classiques à la faculté et ne s’intéressait plus au roman. Je lui ai parlé de Proust, de Dostoïevski, de Joyce et de Conrad, mais il a écarté sèchement mon propos d’un vif revers de sa main projetée vers l’avant. Le libraire organisa le lendemain un repas ayant le livre pour sujet, auquel il convia également une dizaine de ses autres clients. Assis aux côtés de Lucette qui aimait la littérature américaine depuis qu’elle lisait Bret Easton Ellis, je n’osais lui parler des défonces de celui-ci, mais j’évoquais Bruce Benderson et Thomas Pynchon avant de lui conter l’histoire du travesti se prenant pour Nancy Reagan dans New York Rage et celle de la Vente à la criée du lot 49, délirante selon la critique alors que jubilante ai-je suggéré avec le même aplomb, aurait été mieux adapté. Lorsque nous avons décidé de partir, elle a choisi afin de ne pas éveiller les soupçons, de m’attendre dans sa voiture pendant que j’irais aux toilettes. Intrigué par des petits cris et des chuchotements, j’ai grimpé sur la cuvette des W.C, me suis élevé sur la pointe des pieds jusqu’au faîte de la cloison et j’ai vu dans le box voisin Granadoire qui la maintenant par la taille, sodomisait Tallarolo. Sous la cloche formée par les étoffes, elle gémissait et anhélait comme un coureur de cross-country. Ah putain, ça fait du bien s’écria alors Granadoire s’exprimant enfin en langage courant…
Posted on: Sun, 24 Nov 2013 08:52:26 +0000
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