Le père tool. Sa mère dormait, avachie sur le canapé du - TopicsExpress



          

Le père tool. Sa mère dormait, avachie sur le canapé du salon. La bave aux lèvres, elle tenait dans sa main son tube de Prozac. Mo l’observa un instant, puis sapprocha delle. Il ramassa la couverture par terre et la recouvrit. Il prit ses clefs et sortit de lappartement silencieux. La nuit tombait sur la ville et lair fraîchissait. Mo, le cœur à lenvers, se rendait à la messe du soir, animée par le père Tool. Le père Tool était un homme dune cinquantaine dannées, avec des yeux doux et des cheveux argentés. Il avait vu Mo grandir et devenir un jeune homme. Il vivait dans un petit appartement de fonction situé dans l’arrière-cour de léglise. La mère de Mo était une fervente catholique, et elle avait initié son fils dès le berceau à la prière et la foi. Elle lui récitait des prières, lui chantait des chansons religieuses. Puis, quand il fut en âge de comprendre, elle lui expliqua qui avait été Jésus-Christ, ce quétait une église, et le devoir de se rendre à la messe pour se recueillir auprès du Sauveur. Mo avait tout gobé. Mais ce qui lui avait plu en se rendant à la messe, c’était le père Tool. Il ouvrait la messe par une petite chanson en saccompagnant dune guitare, et racontait de belles histoires. Alors pour Mo, se rendre à la messe, c’était comme sil allait à un concert gratuit. Le père Tool couchait avec la mère de Mo. Mo sen doutait, mais sen foutait. Quand le père Tool leur rendait visite, il en profitait pour lui confier ses problèmes à l’école, ou avec les filles, et le père Tool lui donnait toujours de très bons conseils. Le père Tool buvait des litres de vin rouge. Ça amusait Mo, quand il était encore un marmot, de voir cet homme rire et secouer cette bouteille pleine de liquide rouge et il pensait que tant quil y aurait cette bouteille tout irait bien. La mère de Mo tomba en dépression à son entrée au lycée. Sans raison. Dun coup . Elle ne dormait plus, ne mangeait plus, ne parlait plus, elle se contentait de se faire du souci pour ses cernes. « Est-ce que ça se voit que jai des cernes ? ». « Est-ce que ça se voit ? », demandait-elle à son fils, complètement terrifiée. Soudainement, le père Tool avait cessé de passer les voir. Et la mère de Mo ne réagissait plus quand elle entendait les mots « foi, messe, Jésus-Christ, vierge Marie... » Leur symbole et leur sens avaient été extraits de son âme. Les neurologues lui avaient diagnostiqué une rupture d’anévrisme avortée et avaient précisé que lon devrait sestimer heureux quelle soit encore en vie. Mo arriva au seuil de l’église. Il pénétra dans lancienne bâtisse et se laissa imprégner par le calme apaisant du lieu. Il aimait toucher du bout des doigts les murs centenaires, jetait un regard furtif aux statues angéliques qui veillaient en silence sur les hommes. Le père Tool accordait sa guitare. Une trentaine de fidèles étaient assis, ici et là, attendant paisiblement que la messe commence. Le père s’aperçut de la présence de Mo et lui adressa un sourire, ça lui fit chaud au cœur, comme la tape dans le dos du père quil navait jamais connu. Le père Tool salua laudience, s’éclaircit la gorge et débuta comme à son habitude son sermon par une petite ballade : Le père dit au fils, tu devras être faible, pour être fort, tu devras être effrayé, pour être brave, tu devras connaître la peur pour être sauvé, Le fils répondit au père, jai si peur de devenir un homme, jai si peur de faire des erreurs, mon père aidez moi à comprendre, Et le père répondit, (tous les fidèles chantèrent le refrain) Guerre, guerre, guerre, la guerre contre âme, creuse creuse, oui creuse tout au fond de ton cœur, chacun dentre nous doit faire face au démon, et maintenant cest ton tour, Le téléphone de Mo se mit à sonner. Toute la salle le dévisagea. Il sortit rapidement de l’église et répondit. Les voisins avaient aperçu sa mère qui titubait sur le trottoir, en robe de chambre. Il se mit à courir, affolé. Il retrouva sa mère sur le chemin, perdue dans la nuit. Elle tenait des propos incohérents, passait du rires au larme, demandant à Mo qui il était au juste. Il la ramena à la maison. Elle avait fait ses besoins par terre. Mo nettoya et fit prendre un bain à sa mère. Ensuite, il lui administra sa médication. Il sen voulait de ne pas avoir assisté à la messe. Sa mère devenait imprévisible. Les établissements qui se proposaient de la prendre en charge étaient hors de prix. Ce soir-là il sendormit sur un matelas, près de sa mère. Le lendemain il se rendit en cours, très inquiet. Il rentra entre midi et deux pour sassurer que sa mère allait bien. Lui prépara des œufs, mangea et fit manger sa mère. Il revint des cours à dix-huit heures, accompagné de sa petite amie, Ève, un joli bout de femme, férue de peinture et de voyages. Elle s’était aperçue de l’inquiétude de son petit copain et, quand il lui expliqua ce qui le tracassait, elle lui proposa de tenir compagnie à sa mère, afin quil assiste à la messe lesprit tranquille. Il se rendit à l’église détendu. Le père Tool se préparait. Il fit un signe à Mo. Il avait lair fatigué remarqua Mo. Il ajusta les partitions posées sur le pupitre et commença : Le fils dit au père, Mon père à quoi cela rime, je suis si bien, si mal, je suis si coupable dêtre aussi libre, est-ce le monde ou moi qui suis dans le péché ? Et le père répondit, Mon fils tu nas rien compris, le route nest ni longue ou courte, les questions ni noires, ni blanches, et tu devras vivre avec ce poids sur le dos, (Tous les fidèles reprirent le refrain) Va, va, va, va sur le chemin, cours, cours, cours, cours pour attraper ton âme, chacun dentre nous dois faire face au démon, et maintenant cest ton tour, Mo s’appliquait à être juste sur le refrain. Il s’arrêta de chanter quand il vit des policiers entrer dans l’église et se ruer sur le père Tool. Le père Tool posa guitare et se coucha au sol. Il n’opposa aucune résistance. Il avait traversé l’église, menotté, en souriant aux fidèles atterrés. Les policiers firent évacuer les pèlerins et mirent en place un périmètre de sécurité tout autour de l’église. Cétait comme une descente aux enfers pour Mo. Le sort s’acharnait contre les deux personnes qui comptaient le plus pour lui. Il prit le chemin de la maison, bouleversé, se demandant pourquoi le père Tool avait été arrêté. Cette nuit étoilée, si belle, si douce, lui fit mal au cœur. Il attendit, quelques mètres avant sa maison, que ses larmes cessent puis, une fois sur le perron, sessuya les chaussures sur la carpette et entra chez lui. Ève n’était plus là. Sa mère, assise sur le canapé, tenait un polaroid dans sa main. Sur la table basse en verre, un album photo était ouvert en son milieu. Mo prit la photo de la main de sa mère.... Sa mère décéda, dune chute dans la cuisine, trois ans plus tard. Elle voulait boire un coca, elle ne buvait plus que ça avant de mourir. Mo entama des études en médecine et vendit la maison maternelle. Il se trouva une petite amie, Marion, et ils se marièrent rapidement. Ils louèrent un appartement dans les hauteurs de la côte dAzur, un endroit tranquille et bordé de verdure. Mo devint père. Un petit garçon. Sa femme avait choisi son prénom : Ananda. Leur vie de couple se déroulait plutôt bien. Un après-midi du mois de Juin, alors quils se promenaient en famille sur lavenue Jean-Médecin, Marion proposa de faire un tour sur la promenade des Anglais. Il faisait beau, chaud et les caresses de lair marin devaient être délicieuses argumenta l’épouse de Mo. Mo accepta. Il conduisait la poussette avec souplesse. Le petit Ananda, faisait la sieste. En face de l’hôtel Méridien qui faisait face à la mer, Mo perçut de la musique. Depuis le feu qui était vert, il jeta un regard sur la promenade des Anglais. Une foule se tenait autour d’une personne. Sûrement un automate, un peintre, ou un musicien, pensait Mo. Ça lamusait. La famille traversa au feu rouge et atteignit le trottoir spacieux de la promenade. Leau de la Méditerranée était transparente, pure. Une brise soufflait. Au milieu de la foule, un homme jouait de la guitare, Le bruit de la circulation et les discussions dans le public improvisé couvraient son show. Mo demanda à Marion de tenir la poussette. Il voulait voir ce qui attirait tant les gens. Il traversa la foule et découvrit un clochard. Le cheveu gris rare, tête baissée, sur sa vieille guitare, il braillait comme un dément. Son gobelet de chez Starbuck était rempli de pièces. La circulation s’arrêta. La foule disparut. Le sang de Mo se glaça. Le clochard, édenté, sale, releva doucement tête et sa ritournelle frappa le cœur de Mo. Va,va,va, va sur le cheminnnnn, cours, cours, courrrrrs, cours pour attraper ton âme, chacun dentre nous doit apprendre à aimerrrrrr son démon, et le nom de ton démon est ton nommmmm,
Posted on: Fri, 08 Nov 2013 13:37:22 +0000

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