Les arrêts du 19 mars 2013 Baby Loup et CPAM : précisions sur le - TopicsExpress



          

Les arrêts du 19 mars 2013 Baby Loup et CPAM : précisions sur le principe de laïcité au travail. Par Thierry Vallat, Avocat. Les deux arrêts qui viennent d’être rendus conjointement par la Cour de cassation le 19 mars 2013 sur l’application du principe de laïcité dans le monde du travail, public et privé, ont déjà fait couler beaucoup d’encre, mais méritent, par les principes qu’ils énoncent sur la discrimination au travail, qu’on y revienne. Dans une première décision CPAM de Seine Saint Denis (pourvoi n° 12-11.690) du 19 mars 2013, la Chambre sociale valide le licenciement d’une technicienne prestation maladie engagée par contrat de travail à durée indéterminée le 4 septembre 2001 par la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis, licenciée pour cause réelle et sérieuse le 29 juin 2004 aux motifs qu’elle portait un foulard islamique en forme de bonnet. En effet, le règlement intérieur de la caisse avait été complété le 10 février 2004 par une note de service interdisant « le port de vêtements ou d’accessoires positionnant clairement un agent comme représentant un groupe, une ethnie, une religion, une obédience politique ou quelque croyance que ce soit » et notamment « le port d’un voile islamique, même sous forme de bonnet » ; La salariée devait saisir la juridiction prud’homale en nullité de son licenciement en soutenant que celui-ci était discriminatoire au regard de ses convictions religieuses ; Déboutée de ses demandes, elle soutenait devant la Cour de Cassation : 1°/ que les principes de laïcité et de neutralité n’ont vocation à s’appliquer qu’à l’Etat, aux collectivités publiques, aux personnes morales de droit public et à leurs agents ; qu’en affirmant que ces principes justifiaient en l’espèce son licenciement , en ce que ceux-ci lui interdisaient, dans le cadre de ses fonctions, de porter un « foulard en bonnet » manifestant son appartenance à la religion musulmane quand celle-ci n’était pas un agent de l’Etat, d’une collectivité publique ou d’une personne morale de droit public, mais une salariée de droit privé travaillant pour le compte d’une personne morale de droit privé, la cour d’appel a violé, par fausse application, l’article 1er de la Constitution et par refus d’application les articles 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article L. 1132-1 du Code du travail ; 2°/ qu’aux termes de l’article L. 1121-1 du Code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ; qu’en affirmant que son licenciement , lequel trouvait son unique cause dans le fait que celle-ci portait, dans l’exercice de ses fonctions un « foulard en bonnet » manifestant son appartenance religieuse, sans rechercher, ainsi que cela lui était demandé, si au regard des fonctions qu’elle exerçait, lesquelles ne la conduisaient pas à être en contact avec les assurés, l’interdiction qui lui était ainsi faite de porter un « foulard en bonnet », était justifiée au regard de la nature des tâches qu’elle avait à accomplir et proportionnée au but recherché, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1121-1 du Code du travail et des articles 1er de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; 3°/ qu’en disant que le licenciement était justifié quand elle avait elle-même relevé que la salariée portait un simple « foulard en bonnet », ce dont il résultait que l’interdiction qui lui avait été faite n’était pas proportionnée au but recherché, la cour d’appel a violé l’article L. 1121-1 du Code du travail et les articles 1er de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention européenne des droits de l’homme ; 4°/ qu’aux termes de l’article L. 1321-3 du Code du travail, un règlement intérieur ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ; qu’à cet égard, un règlement intérieur ne saurait apporter de restriction générale à l’exercice d’une liberté fondamentale ; qu’en décidant que le licenciement était fondé dès lors que celle-ci n’avait pas respecté le règlement intérieur de la caisse primaire d’assurance maladie, lequel interdisait pourtant, de façon générale, aux salariés de la caisse le port de vêtements ou d’accessoires manifestement leur appartenance à un groupe, une ethnie, une religion, une obédience politique ou quelque croyance que ce soit et comportait ainsi une restriction générale à l’exercice d’une liberté fondamentale, la cour d’appel a violé l’article L. 1321-3 du Code du travail, ensemble les articles 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; La Cour de cassation refuse ce raisonnement et approuve les juges du fond d’avoir retenu que les principes de neutralité et de laïcité du service public sont applicables à l’ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé et que, si les dispositions du Code du travail ont vocation à s’appliquer aux agents des caisses primaires d’assurance maladie, ces derniers sont toutefois soumis à des contraintes spécifiques résultant du fait qu’ils participent à une mission de service public, lesquelles leur interdisent notamment de manifester leurs croyances religieuses par des signes extérieurs, en particulier vestimentaires ; Or, la salariée exerçait ses fonctions dans un service public en raison de la nature de l’activité exercée par la caisse, qui consiste notamment à délivrer des prestations maladie aux assurés sociaux de la Seine-Saint-Denis, qu’elle travaillait en particulier comme « technicienne de prestations maladie » dans un centre accueillant en moyenne six cent cinquante usagers par jour, peu important que la salariée soit ou non directement en contact avec le public, dès lors la restriction instaurée par le règlement intérieur de la caisse était nécessaire à la mise en œuvre du principe de laïcité de nature à assurer aux yeux des usagers la neutralité du service public . Dans l’arrêt Baby Loup du même jour (pourvoi n°11-28.845), c’est au contraire l’annulation du licenciement qui est prononcé, sur le fondement du principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution lequel n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public. Ce principe ne peut dès lors être invoqué pour les priver de la protection que leur assurent les dispositions du Code du travail, sous réserve seulement des dispositions des articles L. 1121-1, L. 1132-1, L. 1133-1 et L. 1321-3 du Code du travail qui précisent que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et proportionnées au but recherché. Dans cette affaire, une éducatrice de jeunes enfants exerçant les fonctions de directrice adjointe de la crèche et halte-garderie gérée par l’association Baby Loup avait fait l’objet d ’une procédure de licenciement pour faute grave aux motifs notamment qu’elle avait contrevenu aux dispositions du règlement intérieur de l’association en portant un voile islamique. S’estimant victime d’une discrimination au regard de ses convictions religieuses, l’éducatrice avait sollicité la nullité de son licenciement. La Cour d’appel de Versailles, par arrêt du 27 octobre 2011, avait dit le licenciement fondé et avait rejeté cette demande de nullité du licenciement, en retenant que les statuts de l’association précisaient que celle-ci a pour but de développer une action orientée vers la petite enfance en milieu défavorisé et d’oeuvrer pour l’insertion sociale et professionnelle des femmes du quartier, qu’elle s’efforce de répondre à l’ensemble des besoins collectifs émanant des familles, avec comme objectif la revalorisation de la vie locale, sur le plan professionnel, social et culturel sans distinction d’opinion politique ou confessionnelle, que conformément à ces dispositions la crèche doit assurer une neutralité du personnel dès lors qu’elle a pour vocation d’accueillir tous les enfants du quartier quelle que soit leur appartenance culturelle ou religieuse, que ces enfants, compte tenu de leur jeune âge, n’ont pas à être confrontés à des manifestations ostentatoires d’appartenance religieuse, que tel est le sens des dispositions du règlement intérieur entré en vigueur le 15 juillet 2003, lequel, au titre des règles générales et permanentes relatives à la discipline au sein de l’association, prévoit que le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées par Baby Loup, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche, que les restrictions ainsi prévues apparaissent dès lors justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché au sens des articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du code du travail, qu’il résulte des pièces fournies, notamment de l’attestation d’une éducatrice de jeunes enfants, que la salariée, au titre de ses fonctions, était en contact avec les enfants. La Chambre sociale de la Cour de cassation censure ce raisonnement estimant que le règlement intérieur de l’association Baby Loup prévoyant que « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées par Baby Loup, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche », instaurant une restriction générale et imprécise, ne répondait pas aux exigences de l’article L. 1321-3 du Code du travail. Le licenciement, prononcé pour un motif discriminatoire, était donc nul. Le débat est donc relancé et l’application du principe de laïcité dans le privé encore sujette à bien des controverses en perspective ! village-justice/articles/arrets-precisions-principe-laicite,14125.html
Posted on: Sun, 20 Oct 2013 08:18:12 +0000

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