Petit message dun docteur, pour la lutte contre la suppression - TopicsExpress



          

Petit message dun docteur, pour la lutte contre la suppression dancre de couleur! Un grand merci au Dr Nicolas KLUGER pour son soutien et sa lettre envoyée ce jour de Finlande ! -------------------------------------------------------------------------------------------- Madame la Ministre, Cest à la fois en tant que dermatologue, spécialiste des questions médicales liées à la pratique du tatouage depuis plusieurs années, membre de la Société Française de Dermatologie, de la Société Finlandaise de Dermatologie et de lAcadémie Européenne de Dermatologie et de Vénérologie, ancien membre du groupe dexperts sur lévaluation des risques des produits de tatouage à lANSM en 2010, et co-fondateur de lESTP (European Society of Tattoo and Pigment research), que je me permets de solliciter votre bienveillance en vous demandant dintervenir sur une réglementation qui, pourtant fondée sur un principe de précaution, me parait à ce jour prématurée, disproportionnée, et avec vraisemblablement un effet inverse de celui escompté et des conséquences désastreuses sur la pratique du tatouage en France, en termes à la fois sanitaires et économiques. Je plaide depuis de nombreuses années pour une évolution des connaissances dans ce domaine et pour une collaboration avec les professionnels sur le terrain. En lien permanent avec les tatoueurs et leurs clients, jai ainsi pu publier à ce jour une cinquantaine darticles scientifiques, ainsi que plusieurs articles dans la presse grand public, sur les questions de santé liés au tatouage. Mon travail avec les professionnels du tatouage, notamment avec le Syndicat National des Artistes Tatoueurs en France, ainsi que dans plusieurs pays dEurope, ma démontré que la profession représentait un modèle de responsabilité sanitaire. Lexemple français est en ce sens incomparable : Le SNAT, fondé en 2003 et comptant aujourdhui plus de 1100 membres professionnels, a non seulement milité pour une standardisation des règles dhygiène mais a anticipé lapplication de la réglementation sanitaire de 2008 en sensibilisant tous ses adhérents au strict respect de ces règles. La profession doit également composer avec le tatouage clandestin, qui peut être exécuté par n’importe quelle personne s’improvisant tatoueur à son domicile ou se déplaçant chez les clients, et qui exercent avec des produits et matériels hors de tout contrôle, le plus souvent acquis par Internet. Il constitue à mon sens un vrai problème, non suffisamment pris en compte par les autorités. Dans ce contexte, ma connaissance (à la fois de lensemble de littérature médicale et par mon expérience de terrain auprès des tatoueurs en France et en Finlande, mais aussi de clients et de patients tatoués) des risques liés au tatouage, me permet daffirmer aujourdhui que : - Les complications bactériennes et infectieuses en général restent rares. Les cas d’infections graves sont rarissimes, et dans tous les cas surviennent que si le tatouage n’a pas été pratiqué dans des conditions d’hygiène et d’asepsie stricte ou en cas d’absence de soins après tatouage. - Les allergies aux produits (qui nécessitent dêtre mieux connues en lien direct avec les professionnels) restent bénignes dans une grande majorité des cas et rares en regard du nombre de tatouages réalisés chaque jour. Par définition, une « allergie » survient sur un terrain particulier propre à chaque individu. A l’heure actuelle, nous n’avons pas identifié précisément les composés responsables de telles réactions. De plus, nous ne pouvons prédire quelle personne réagira ou non à un composé d’une encre (hormis si cette dernière a déjà fait une réaction dans le passé). Il est donc illusoire d’espérer que la liste de produits interdits à ce jour aura une quelconque incidence sur le nombre de cas à venir. A mon sens, elle ne garantit en rien la sécurité que souhaite les autorités françaises de santé. - Lassociation cancer/tatouage est absolument fortuite à ce jour (ce qua confirmé lANSM récemment dans les médias). - Les connaissances actuelles en terme de toxicologie sur les encres de tatouage sont basées quasi-exclusivement sur des modèles in vitro et sur des animaux. Elles sont en outre établies sur des modèles toxicologiques qui ne sont en rien celui du tatouage. Or, il n’est pas acceptable scientifiquement recourir à ce type de raccourci : Il est bien connu, en toxicologie, qu’un produit « toxique » dans une condition donnée ne l’est pas forcément dans un autre situation, d’autant que d’autres facteurs entrent en compte. Le tatouage constitue un modèle toxicologique particulier et même unique qui mérite d’être étudié et compris, avec létablissement de tests toxicologiques appropriés visant à garantir la meilleure sécurité possible. Rien ne garantit ainsi que d’autres substances ne figurant pas dans le présent arrêté, et donc de fait autorisés (puisque non interdits) ne soient pas plus toxiques. En létat actuel des connaissances, il est absolument nécessaire de pouvoir travailler avec les tatoueurs et de bien différencier les pratiques professionnelles (qui assurent un haut niveau de sécurité sanitaire) et les pratiques « sauvages » (qui impliquent lusage de produits et matériaux hors circuit professionnel et constituent possiblement une source de la majeure partie des complications). La fondation, lors du 1er Congrès européen de recherche sur les tatouages des 13 et 14 novembre derniers à Copenhague, de la Société Européenne de recherche sur les tatouages et les pigments de tatouage (ESTP), soutenue à la fois par des médecins, des épidémiologistes, des toxicologues, des chimistes, mais également des fabricants dencres et des tatoueurs, constitue une initiative extrêmement encourageante. La volonté des tatoueurs professionnels à travailler dans les meilleures conditions sanitaires avec des produits sûrs nest plus à prouver. Larrêté du 6 mars 2003, pris sur décision de lANSM, invoque un principe de précaution mais ne dispose daucun fondement scientifique ou de preuve de risque avéré : LAgence de Sécurité du Médicament exige des tatoueurs quils prouvent linnocuité des produits utilisés alors quon dispose ipso facto dun certain recul sur cette innocuité, ne serait-ce que par labsence de constat objectif de pathologie sur un grand nombre de tatoués depuis plusieurs années. Je regrette dailleurs que larrêté du 6 mars 2013 nait pu faire lobjet dune réflexion préalable en lien avec les professionnels, comme ils pouvaient le concevoir lorsque lAFSSAPS a pour la dernière fois sollicité le SNAT, en 2010, en manifestant une réelle volonté de travailler en lien étroit avec les tatoueurs afin délaborer une réglementation adaptée, et en admettant alors avoir tout à apprendre sur le tatouage, lutilisation des produits et le fonctionnement globale du marché. A la suite dune rencontre formelle dans les locaux de lAFSSAPS le 4 juin 2010, le SNAT, malgré ses multiples relances, na malheureusement eu aucune nouvelle de lAFSSAPS ou de lANSM sur le suivi de ce travail. De fait, si le point 4° de larrêté du 6 mars 2003 est maintenu sans modification et entre en vigueur au 1er janvier 2014, malgré les requêtes argumentées et répétées du SNAT depuis la publication de ce texte, le Ministère de la santé et les administrations locales chargées des contrôles vont devoir faire face à une situation dramatique : Les fournisseurs français, qui assurent aujourdhui une parfaite traçabilité des produits importés (aucune encre nétant fabriqué à ce jour en France), validés par ailleurs en Europe, ne pourront vraisemblablement plus maintenir leur commerce après le 1er janvier 2014 puisque plus de 90% de leur catalogue se retrouve de fait invendable. Quand bien même ils le pourraient, les tatoueurs français, privés de lessentiel de leur matière première, se trouveront face à un choix critique : - Soit bannir la majeure partie de leurs couleurs de leurs étagères et effectuer exclusivement des travaux en noir, blanc, vert ou bleu (palette très limitée pour ces deux dernières couleurs) dans une période où les possibilités graphiques et artistiques doivent beaucoup aux évolutions des couleurs ; - Soit continuer à utiliser leurs couleurs habituelles, autorisées sur lensemble du territoire européen à lexception de la France, et se trouver par conséquent en situation dillégalité ; - Soit se déplacer hors de nos frontières pour réaliser des travaux en couleur dans nimporte quel pays de lUnion européenne. Quel que soit le scénario, le territoire sera inévitablement inondé de produits vendus hors de lEurope, non traçables et présentant eux un véritable danger sanitaire, sachant que les produits diffusés par Internet hors circuit professionnel contiennent eux des substances nocives en quantités réellement dangereuses. Le retour à la clandestinité, avec les répercussions aisément sue lon connait déjà, accompagnera fatalement cette interdiction démesurée. Bien quexerçant actuellement en Finlande, je travaille en permanence avec le SNAT, et envisage lannée à venir avec la plus grande inquiétude. Je suis convaincu quune démarche de bon sens, prenant acte de tous ces éléments, permettrait déviter le pire. En termes précis, la seule mesure concrète pouvant enrayer selon moi cette crise avant le 1er janvier 2014 est de confirmer, par la publication dun arrêté modificatif, linterprétation initiale du SNAT, validée par la DGS le 5 avril 2013, puis rejetée par lANSM : Le point 4° de larrêté du 6 mars 2013, renvoyant à larrêté du 6 février 2001 fixant la liste des substances qui ne peuvent entrer dans la composition des produits cosmétiques, présente 2 colonnes visant des produits « destinés à être appliqués à proximité des yeux » et ceux « en contact avec les muqueuses » : Des situations qui ne concernent évidemment pas les encres destinées au tatouage artistique. En clarifiant cette seule spécificité de larrêté, le texte ne concernerait plus quune part infime des encres couleur actuellement en usage, et permettrait ainsi denvisager sereinement de faire évoluer la réglementation dans les mois et les années à venir en la fondant sur les données futures que professionnels et experts séchinent à réunir au niveau européen. Une décision finalement infime au regard des disproportions que représente le maintien de cette interdiction. Je reste évidemment disposé à répondre à vos questions ou à celles de lANSM, et à accompagner le SNAT autant que nécessaire au sein dun prochain groupe de travail à la DGS, auquel il semble indispensable que des représentants de lANSM participent. Vous remerciant par avance pour l’intérêt que vous voudrez bien portez à ma lettre, Veuillez agréer, Madame la Ministre, lexpression de ma très haute considération. N. KLUGER
Posted on: Wed, 04 Dec 2013 20:58:51 +0000

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