Escapade au Pays du Dragon (Avril 2013) Ah, mes amis, quelle - TopicsExpress



          

Escapade au Pays du Dragon (Avril 2013) Ah, mes amis, quelle épopée ! Je viens de rentrer, mais j’ai du mal à « atterrir », le cœur encore plein de belles images et du souvenir de merveilleuses rencontres. Merci à Danielle et Jean qui ont si bien organisé cette aventure au Pays du Dragon. Et merci à tous les copains pour les bons moments passés ensemble. Ce lundi 1er avril, nous étions douze à embarquer à bord du Boeing 777 de Vietnam Airlines. Après 10h.30 de vol, il nous dépose en douceur à Hanoi. Manh, le Directeur de l’agence Vietnam Original Travel, est là pour nous accueillir. Formalités de visa pour ceux qui ont choisi de le faire sur place. Chargement des bagages dans le minibus climatisé qui nous conduit à l’agence pour régler notre voyage, et changer un peu d’argent. Pour cent euros, je me retrouve deux fois millionnaire (en dongs)… Truong, notre guide, nous accompagne à l’hôtel Gondola, un 3*** confortable, avec climatisation, situé dans une petite rue tout près du lac Hoan Kiem (Lac de l’Epée Restituée) que, lorsque j’étais enfant, on appelait familièrement « Petit Lac ». Léger rafraîchissement pour effacer les vapeurs de la nuit, courte visite à la légendaire Tortue, résidente centenaire du pagodon du lac (Temple Ngoc Son), auquel on accède par une passerelle peinte en rouge, et nous accueillons Alain et Pauline, qui ont fait « voyage buissonnier » par Aeroflot via Moscou. Nous sommes donc quatorze (dont sept Foefien(ne)s) pour cette grande aventure de trois semaines. En route pour notre premier déjeuner « local » ! Une visite au musée ethnographique (à ne pas manquer !), dont une partie se trouve en plein air, nous apprend l’histoire du Vietnam avec ses 54 différentes ethnies (les Vietnamiens - 87% de la population totale - sont de l’ethnie kinh), à l’aide de photos et de scènes colorées, composées de personnages dans leur vie quotidienne. A l’extérieur, nous découvrons leur habitat, des maisons sur pilotis au toit de latanier « grandeur nature »… Pour terminer cette première journée, un tour de cyclopousse dans le « quartier des corporations » et un excellent dîner. Avant de regagner nos chambres, Danielle nous suggère de préparer un « petit sac » pour deux jours, afin de ne pas charger notre minibus. L’aventure commence ! Dès le lendemain, nous sommes dans l’ambiance : six heures pour parcourir les 250 km qui nous séparent de Ba Bê (ba - trois -, donc « Trois Baies »). Malgré le soin que prend Tinh, notre chauffeur, pour négocier les « nids d’éléphant », notre minibus tressaute (et nous avec) en passant sur les trous énormes qui parsèment la route. Nous arrivons au bord du lac en fin d’après-midi, et laissons le minibus pour sauter dans des sampans pour atteindre l’autre rive. Nos bagages sont chargés sur des motos, car le village est à un quart d’heure de marche. Accueil chaleureux de la famille (de l’ethnie Tay) qui nous loge pour 48 heures dans une maison sur pilotis. Confort spartiate : échelle de meunier pour accéder à la salle commune du premier étage, matelas placés côte à côte à même le sol, moustiquaire pour décourager le plus petit insecte, sanitaires rudimentaires dans la cour… mais un excellent dîner (nems, beignets de courge, poulet grillé, riz, légumes…), servi sur la terrasse couverte, attenante à la salle commune. L’air est tiède, le silence ponctué par les bruits de la campagne : coassements des crapauds-buffle, grognements des cochons, cocoricos d’un coq insomniaque, miaulements de la minette familiale à la recherche d’un copain… On s’attarde un peu en compagnie du maître de maison, en savourant un petit verre d’alcool de riz, puis chacun se retire pour la nuit, qui débute par… un concert de ronflements : tout le monde est fatigué. Le lendemain matin, l’hôtesse nous régale de crêpes à la banane et de thé/café, puis départ pour une croisière sur le lac Ba Bè dans un étroit bateau ouvert. Nous accostons dans un village entouré de rizières qui s’étendent à perte de vue, les propriétés délimitées par de petits murets de terre. Ici, dans le Nord, il y a quatre saisons, et le riz pousse au même rythme que le blé chez nous. Le climat ne permet qu’une récolte par an, tandis que l’on moissonne deux fois dans le Sud. Pour l’heure, les pousses vert tendre sont d’environ 20 cm de haut. Nous prenons des photos, faisons signe aux quelques paysans qui, les jambes enfoncées dans l’eau jusqu’aux mollets, repiquent les dernières pousses. Des buffles nous regardent d’un œil paisible. Notre promenade nous entraîne sur un chemin de terre à travers un bois de bambous, puis le bateau nous conduit chez Le Pirate, un restaurant au bord de l’eau, apparemment très fréquenté. Sur le chemin du retour, notre barque s’arrête dans un endroit calme. Deux téméraires (Serge et notre guide) « piquent une tête » et déclarent que l’eau est bonne… Au village, le dîner est déjà prêt. Aussi délicieux que la veille : soupe au potiron, petits choux farcis, sauté de buffle ( !), émincé de porc, courgettes. 6 heures du matin. Mon nécessaire de toilette sous le bras, j’ouvre doucement la porte du dortoir et descends avec précaution les marches étroites et irrégulières. Jacques est déjà au rez-de-chaussée, concentré sur son tai chi vietnamien. Je me glisse dans une salle d’eau pour me préparer avant le réveil général. Difficile de prendre une douche (il y a de l’eau chaude !) sans laisser derrière soi une pataugeoire. D’abord, un coup de jet pour enlever les inévitables empreintes de pas sur le sol. Par chance, la veille, j’ai eu la bonne idée d’acheter des zép (savates) en caoutchouc dans la boutique du village, pour 15000 dongs (60 centimes). Petit déjeuner, remise de menus cadeaux à la famille (crayons et stylobilles pour les enfants, bonbons, articles de toilette…), dernières photos, adieux à nos hôtes, et nous voilà à nouveau sur le départ. La route qui monte vers Bao Lac est à peine praticable, et nous avançons à une allure d’escargot. Mais le paysage est magnifique, avec les premières rizières en terrasse et des plantations de thé accrochées à la colline. Comment imaginer le courage et la ténacité des habitants pour défricher ces terrains pentus et arides, et les transformer en terres cultivables. Tout cela, avec du matériel rudimentaire. Un peu plus loin sur la route, après Cao Bang, nous rencontrons un groupe de femmes de l’ethnie Zao, louées à la journée pour transporter tout ce qui est transportable dans des hottes de bambou tressé. Sous le foulard qui la recouvre, leur tête est rasée sur le devant. Un critère de beauté inattendu. Elles se prêtent en souriant à la séance photo. Nous nous attardons un peu, mais un groupe d’hommes est là, qui les presse de partir. Derniers sourires, et les voilà qui s’en vont, nonchalantes, larges pantalons noirs et tuniques de couleur pastel. Arrivée à Bao Lac en soirée. L’hôtel Thuy Duong est confortable (on m’octroie une grande chambre avec… trois lits doubles) et le personnel sympa. Le dîner est à la hauteur de l’accueil : canard laqué, bœuf à l’ananas, porc grillé, émincé de courgettes. Truong, notre guide, a prévu des fruits du dragon pour dessert. Rencontre d’un couple de Français dont c’est le premier voyage au Vietnam. Ils adorent. Samedi 6 avril. Départ en deux groupes pour le fief des Lolos noirs, ainsi nommés à cause de leurs vêtements sombres. Nous sommes d’abord sept, plus notre guide, à parcourir les 8 km de route qui s’arrête au bas de la piste menant au village lolo. Une ambulance archaïque nous attend, une fourgonnette kaki datant de la guerre, cadeau du « grand frère » russe. Nous nous serrons, pas très rassurés, sur de minuscules bancs de bois. L’étroit sentier grimpe, grimpe. La fourgonnette roule tout doucement, cahin-caha, s’accroche au chemin caillouteux, nous ballote d’un côté et de l’autre. A l’intérieur, nous agrippons ce qui est à portée de main pour maintenir l’équilibre, nous attendant, à chaque instant, à verser dans le fossé. Vingt minutes plus tard, l’ambulance nous dépose non loin de l’entrée du village. Des enfants nous accompagnent en sautillant joyeusement sur le dernier bout de piste, prêts à recevoir les cadeaux que nous ne manquerons pas de leur offrir… A la porte du village, une mamie est chargée d’encaisser le droit de visite, que s’empresse de lui remettre Truong. Un grand-père nous fait signe de le suivre pour la visite de leur maison sur pilotis. Au rez-de-chaussée, une broyeuse pour le maïs, des cochons noirs et une vache, sans compter poulets et canards qui sortent de partout. Ce village vit en autarcie et semble ne manquer de rien. Nous nous déchaussons pour monter à l’étage : une grande salle commune avec un coin cuisine et des ustensiles en fer-blanc. Sur le foyer, une bouilloire pour le thé. Le grand-père est fier de nous montrer les nombreuses photos de l’Oncle Ho, épinglées sur une grosse poutre, ainsi que les documents attestant de ses faits d’armes dans l’armée vietnamienne. Ensuite, il nous invite à prendre place pour une démonstration de pipe à eau. Assis sur le plancher, nous le regardons, tandis que les enfants tournent autour de nous, silencieux et pourtant curieux. Parmi eux, se trouve le petit garçon de « Terre Inconnue », le film de Philippe Rostan. Il est timide mais travaille bien à l’école (de l’avis des autres enfants). Truong lui remet sa casquette blanche de l’agence sous les cris de joie de ses camarades… Dans cette région montagneuse, il vaut mieux prévoir des vivres plutôt que d’espérer trouver un restaurant. Après une heure de route, nous nous arrêtons dans un café-boutique. Assis sur des sièges d’enfant en plastique rouge, nous nous confectionnons un « sandwich vietnamien » avec ce que nous avons trouvé ce matin : banh my (petite sœur de notre baguette), gioi et concombre. En dessert, de la pastèque. Après ce pique-nique frugal, par une route tortueuse, nous entamons la montée vers Dong Van par le mont Ma Phi qui culmine à 2000 mètres. A mesure que nous montons, nous découvrons des paysages fabuleux : rizières en terrasse, rochers volcaniques sur fond ocre, ponctués ça et là de hameaux. Tout en bas, dans un lit de terre rouge, serpente une rivière couleur émeraude. Après un court arrêt pour jouir de la vue panoramique, nous traversons un village Hmong, à 35 km de la frontière chinoise. Ici, les maisons, construites par le gouvernement, sont en dur mais la pauvreté est encore présente. Partout, le drapeau national flotte - étoile jaune sur fond rouge -, comme pour montrer au puissant voisin (qui a tenté une invasion en 1979) le nationalisme des habitants. Arrivée à Dong Van en fin d’après-midi. Une fois installés à l’hôtel, nous sommes libres jusqu’au dîner, et en profitons pour faire un tour dans la petite ville. Danielle, Jean, Alain, Pauline, Edith, Marie et moi, nous installons dans un café pour un pot offert par Edith, face à de grandes halles anciennes, probablement un marché couvert. Le crépuscule descend, il est temps de rentrer pour dîner… C’est dimanche, jour de marché. 7h30. Assise sur un banc devant une longue table de bois, j’attaque de bon cœur un pho fumant. La patronne du stand me regarde en souriant, presque avec affection, dévorer ma soupe au poulet en lui disant ngon lam. Pour faire bonne mesure, elle dépose devant moi un bol débordant de soy. C’est trop. J’en prélève une boulette et lui rends le reste. Les passants regardent avec curiosité cette « visage pâle » jouer de la baguette. Une jeune femme en costume coloré, venue faire son marché avec sa hotte, s’installe à côté de moi et commande le même menu. Echange de sourires. Revigorée, je fais le tour des étals, ne sachant où poser les yeux : femmes vêtues de couleurs flamboyantes ; étals de fruits et légumes ; étoffes et vêtements multicolores ; matériels de toutes sortes (pioches, binettes, faucilles) ; ustensiles et articles de ménage… Je me retrouve soudain dans le coin « boucherie ». Cet étalage de viande, dont une tête de chien, me soulève le cœur. Vite, je me sauve. Je croise un jeune couple qui essaie de maîtriser un chaton gris pour le faire entrer dans un grand sac en toile. Je leur demande : « C’est pour le manger ? ». Ils me regardent, hilares : « Non, c’est pour les souris !». Pardi ! Peu à peu, le marché est envahi par les gens de la région dans leurs beaux vêtements. Certains se sont levés avant le chant du coq et ont parcouru des kilomètres. Le dimanche, jour de marché, c’est jour de fête ! L’excursion d’aujourd’hui commence par la visite d’un village ancien Hmong, avec ses maisons en torchis ocre datant de plus de 400 ans. Les habitants sont très pauvres, mais les enfants ont l’air bien nourris et se laissent photographier volontiers. Certains sont même un peu cabots et cherchent l’objectif, puis demandent à voir les photos… Devant le palais du roi Hmong Vuong Chi Sinh, demeure historique datant de l’époque coloniale, de jolies jeunes femmes en costume de Hmong Vert jouent les « top models »… Le village suivant est celui des Lolos fleuris, vêtus de couleurs vives. A la sortie du village, surprise : une magnifique roseraie s’étendant à perte de vue jusqu’au pied de la montagne. Des femmes, louées pour la saison, sont chargées de leur entretien. L’une d’elles apparaît, les bras chargés d’un énorme bouquet : les tiges mesurent environ 80cm de long ! Puisque nous sommes montés à 2000 mètres, c’est maintenant la descente. D’autres rizières en terrasse et de rochers sur fond ocre. Nous croisons des gens sur la route. Où vont-ils ?... Des femmes « grattent » un minuscule bout de terre parmi cette rocaille, pour y planter… quelques légumes ? Deux ou trois plants de thé pour la consommation familiale ?… Jean-Pierre, notre poète de service, nous offre « la minute poétique » quotidienne. Arrivée en fin d’après-midi à Ha Giang. Installation au Truong Xuan Resort, en dehors de la ville, dans des bungalows au milieu d’un parc, avec terrasse donnant sur une jolie rivière aux eaux couleur émeraude. Un petit « coin piscine » aménagée dans la rivière invite les courageux. Seuls, Jean-Michel et Serge se hasardent à y tremper les pieds… Bien « calés » par un savoureux (et copieux) dîner, nous regagnons nos bungalows pour une nuit paisible… Le lendemain matin, frais et dispos, nous faisons honneur au petit déjeuner, mais il est temps de quitter ce petit paradis… En route, d’autres villages : Nung, Hmong, Dao… Bac Ha. Ce soir-là (8 avril), nous fêtons l’anniversaire de Jacques à l’hôtel Sao Mai. Le dîner est plantureux, arrosé de vin rouge de Dalat, et clôturé par un gâteau au chocolat commandé par l’agence. Pour ne pas être en reste, le directeur de l’hôtel offre l’alcool de riz et ouvre la sono pour un tour de piste. En l’honneur des 66 ans de Jacques, on a baptisé la route qui grimpe jusqu’à 2000 mètres, la « Route 66 ». Comme en Amérique ! Notre nuit est écourtée par un réveil en fanfare à 6 heures. Pendant une heure, les directives du gouvernement sont relayées dans toute la ville par des haut-parleurs. Cela arrive souvent, paraît-il. Sur la route menant à Sapa, nous nous arrêtons à Lao Cai pour apercevoir, de l’autre côté du Fleuve Rouge, le voisin chinois et ses tours modernes. Sur le pont qui enjambe le fleuve, les véhicules (surtout des camions) font du sur-place. Quelques photos et nous rejoignons avec plaisir notre minibus climatisé : il fait une chaleur moite. Le minibus grimpe les derniers 70 km pour atteindre Sapa, situé 1600 mètres : 1000 mètres de différence avec Lao Cai, situé à 600 mètres, la même altitude que Hanoi. Déjeuner dans le meilleur restaurant de la ville, le Red Dao House. Je veux bien le croire, étant donné le tarif des boissons, plus chères qu’ailleurs… L’hôtel Elégance, en haut d’une côte, est à l’écart du centre bruyant. Ma chambre, au 3ème étage (sans ascenseur) est plutôt une suite familiale avec trois lits doubles, et donne, d’un côté sur un petit bois de bambous, et de l’autre, sur la ville. Sapa a bien changé depuis mon passage en 2004. C’est devenu une ville très très touristique. Hôtels et boutiques sont coude à coude, de même que les vendeuses en costumes bariolés qui sillonnent les rues pour nous proposer les produits artisanaux : petits sacs tissés multicolores, peignes en corne, bracelets… Je fais le tour de la ville avec Juliette et Marie-Rose, mes copines d’enfance de Saint-Rambert, et leurs « hommes », Jean-Michel et Serge. A la recherche de cartes postales, je trouve une librairie, et dépense près d’un demi-million de dongs… en bouquins. On ne se refait pas. Je suis papivore depuis que je sais lire. On nous gâte pour le petit déjeuner, supervisé par le patron lui-même : pho, crêpes à la banane, œufs, fruits, pain, beurre, confiture… A quelques minutes de Sapa, nous sommes à destination. Une pluie fine nous accueille. Plus bas, le paysage se perd dans la brume… A peine descendus du bus, nous sommes assaillis par une horde bariolée et jacassante : une vingtaine de femmes, certaines avec un bébé accroché dans le dos, nous cernent, brandissant sachets de tissus et bracelets en argent ou verre coloré comme autant de trophées. C’est à peine si nous pouvons entamer la descente sur le chemin caillouteux, détrempé par le crachin persistant. Malgré nos dénégations, elles s’accrochent, tirent sur nos vêtements. Une heure plus tard, elles sont toujours là, agglutinées autour de nous. Charmantes, mais collantes… A bout de résistance, pour se débarrasser de celle qui s’accroche encore, on achète une babiole qui restera au fond d’un tiroir… et dix autres apparaissent, surgies de nulle part. On voudrait leur faire plaisir, mais trop, c’est trop. Même les plus zen s’énervent. Finalement, la plupart retournent sur leurs pas, probablement à l’assaut du prochain car de touristes. Cette randonnée parmi les rizières en terrasse dure la matinée, nous menant de village en village - Lao Chai, Ta Van, Giang, Ta Chai -, à la rencontre des minorités Hmong (appelée autrefois Meo - chat), Dao, Tay, Giay… Rencontres du bout du monde, où les gens vivent encore comme leurs ancêtres, de leurs productions artisanales, et cultivent champs et rizières avec du matériel d’autrefois, labourant avec une charrue de bois tiré par un buffle. Dans ces régions reculées, le buffle constitue la richesse d’une famille… de même qu’un garçon pour diriger le buffle. Devant sa maison, une femme file le chanvre sur une sorte de rouet qu’elle actionne avec ses pieds. Drôle de gymnastique qui fait travailler bras et jambes ! A l’issue de cette longue marche par des chemins de terre rouge détrempés, sous le crachin qui nous transperce jusqu’au os, nous sommes heureux de nous installer pour déjeuner. Mais un vent de panique agite le groupe : on a perdu Juliette ! Jean-Michel, son compagnon, est dans tous ses états… Quelques minutes plus tard, Juliette arrive, tout sourire : elle a foncé tout droit et nous attendait devant le bus, à la sortie du village. Ne voyant venir personne, elle a rebroussé chemin et nous a retrouvés… Le déjeuner est agrémenté par un spectacle de danses locales (éventails et bambous). Après l’expédition de la matinée, nous nous accordons un après-midi de repos. D’ailleurs, la pluie persiste et nous dissuade de faire « Sapa by night », après le dîner dans le « coin vietnamien » de Sapa. Le lendemain nous trouve à nouveau sur une route tortueuse de montagne, fréquentée par de nombreux camions. Onze heures à une allure d’escargot pour parcourir les 250 km qui nous séparent de Yen Bai, à cause d’un accident : une semi-remorque s’est couchée en travers de la chaussée… Nous arrivons à destination à la nuit tombante. Et ce n’est pas terminé. Le bus nous laisse devant un chemin de terre, à vingt minutes de marche de notre logement. Nos bagages sont chargés dans une petite remorque accrochée à une moto. Nous suivons à la lueur de nos lampes de poche, attentifs à ne pas nous tordre les chevilles dans les ornières. Notre « chez l’habitant sur pilotis » est encore plus spartiate que le précédent, mais l’accueil est chaleureux : alcool de riz de bienvenue, excellent dîner dont nous nous régalons en compagnie de nos hôtes, assis tant bien que mal sur le plancher. Le repas se termine par des chansons… et le verre de l’amitié : mot, hai, ba… yoooh ! Ici, vivent quatre générations de femmes, de l’arrière-grand-mère au bébé, qui s’est endormi dans les bras de sa mère. Petit déjeuner rapide, et marche à travers champs vers Thac Ba, un lac artificiel de 80 km de long, créé il y a trente ans pour l’irrigation des cultures. Le fils de la maison charge nos bagages dans le sampan et nous partons pour une croisière d’une heure. Impressionnants paysages de collines et plantations se reflétant dans l’eau claire. Des pêcheurs s’activent çà et là… Nous disons bye bye à Yen Bai et repartons vers la « civilisation ». Samedi 13 avril. Hanoi. Journée calme : visite de deux petits temples au nord de Hanoi, dédiés aux dieux protecteurs de la ville, puis à la Pagode au Pilier Unique. Dans la cour du Temple de la Littérature qui contient les stèles des mandarins lettrés, des étudiants - filles en ao dai, garçons en costume - célèbrent dans la joie la fin de leurs études secondaires. Déneuner à Hoa Sua, l’école hôtelière qui forme des jeunes défavorisés, pour leur permettre d’accéder à un métier. J’ai la surprise de reconnaître dans Hanh, la directrice, une jeune fille rencontrée une quinzaine d’années plus tôt, alors qu’elle travaillait pour une ONG, dont je parraine une étudiante (que je verrai à Saigon). Embrassades émues. Près de l’école, Juliette retrouve la maison de sa mère… détruite. Elle garde cependant le sourire. Ce soir, on prépare un nécessaire de toilette : demain, nuit sur une jonque dans la Baie d’Halong. La Baie d’Halong ne ressemble plus à ce qu’elle était la dernière fois que je l’ai vue. Le nouveau port, avec ses constructions qui poussent comme des champignons, me déconcerte, de même que les jonques, autrefois d’une belle couleur acajou, qu’un « responsable » a fait recouvrir d’une uniforme couleur blanc sale. La jonque, prévue au départ pour notre seul groupe, accueille aussi des touristes italiens, des Irlandais en voyage de noces, un couple américano-mongol avec leur fillette. Tandis que nous déjeunons, la jonque se faufile entre les rochers. La température est douce et, sur le pont supérieur, des chaises-longues invitent à la sieste. Vient ensuite une sortie en kayak pour ceux qui le souhaitent. Avant le dîner, initiation à la confection de rouleaux de printemps, dégustés séance tenante… Une nuit plus ou moins confortable sur notre couchette plutôt ferme, puis séance de tai chi sur le pont supérieur au lever du soleil. Petit déjeuner rapidement expédié, visite incontournable de la magnifique Grotte de la Surprise, et retour sur la terre ferme. Avant de regagner l’hôtel Gondola, à Hanoi, Truong nous fait la surprise de nous conduire Rue de la Concession, à l’endroit de l’ancienne mission catholique où étaient rassemblées les Eurasiennes du Nord (Langson, Thanh Hoa) avant d’être rapatriées. Le bâtiment principal, construit en 1886-87, est tel que je me le rappelle, avec sa terrasse au premier étage, mais Juliette et Marie Rose ne s’en souviennent pas. Emue et excitée à la fois, j’essaie de raviver leur mémoire : là, à droite, ce bâtiment neuf a remplacé notre réfectoire ; et là, on a coupé les hévéas pour faire place à un bâtiment ; on a aussi supprimé des cocotiers pour faire des jardins… Mais non, rien, elles ne se souviennent de rien… L’ancienne résidence de Monsieur le Résident est devenue « M.O.D. Palace » : le Ministère de la Défense. Avec un « Tennis Court »… Grâce à Truong, nous sommes autorisés à prendre des photos. Nous quittons Hanoi pour le Centre. Truong nous accompagne à l’aéroport et reste jusqu’à ce que nous passions la douane. Nous le regrettons tous. Au cours de ces deux semaines, nous avons pu apprécier sa gentillesse et sa disponibilité… Un coup d’aile de 45 minutes et Vietnam Airlines nous dépose à Danang, où nous trouvons un nouveau bus et un nouveau guide. Notre séjour dans le Centre sera de courte durée. A Hué, visite de la Cité Impériale de la dynastie Nguyen, de la Pagode de la Dame Céleste (Thien Mu), et des jardins entourant une école de bonzes. Rencontre d’un bonze supérieur, très zen, comme il se doit. Déjeuner en croisière sur la Rivière des Parfums. Hoi An est une ville que tout le monde adore, avec ses maisons anciennes, vieilles de deux siècles, et son pont japonais. Nous y parvenons par le Col des Nuages. La route serpente en grimpant. Au sommet, nous faisons un arrêt PIPI-ttoresque pour jouir du magnifique panorama sur la mer et les plages. Le Lotus est un joli hôtel dans un nid de verdure, avec une piscine, très appréciée à cause de la chaleur torride. Le lendemain matin, visite du temple de la Déesse de la Mer - Phuc Kien - (Hoi An est une ville de pêcheurs) ; la maison de Phung Hung, où l’on nous offre du thé ; le Pont Japonais, ainsi nommé car construit par les… Japonais. L’après-midi est libre, et nous en profitons, Serge, Marie-Rose, Juliette, Jean-Michel et moi pour baguenauder et dépenser nos millions, tandis que d’autres se confient aux mains expertes d’un coiffeur ou d’une masseuse. Nous rentrons à l’heure où le soleil se couche, et où les lampions multicolores des boutiques situées au bord de la rivière se mirent dans l’eau… Samedi 20 Avril. Un troisième guide nous attend à Saigon, avec un nouveau minibus, un Mercedes tout neuf. Déjeuner tardif, à cause de l’horaire de l’avion de Danang à Saigon. Malgré son nom américain Wrap and Roll, très bonnes spécialités vietnamiennes. L’après-midi étant bien entamé, on fait un petit tour au marché, avant de se rendre au restaurant Indochine. Cadre élégant en plein air : tables disposées autour d’un bassin, orchestre - musique nostalgique. A l’entrée, une vieille Traction Avant bicolore, blanche et bordeaux. Ce matin, adieu provisoire à Saigon pour une échappée dans le Delta. Deux heures de bus jusqu’à Cai Bé, petit trajet en sampan. Des jeunes filles en pantalon noir et courte tunique mauve coiffées du cai non nous accueillent au débarcadère du Mékong Lodge. Les chambres, situées dans des bungalows disséminés au milieu de jardins luxuriants, sont élégantes et confortables, la salle d’eau presque à ciel ouvert. La baignoire est un bateau de bois, avec deux yeux peints sur la proue, pour éloigner les mauvais esprits. Un temps de repos après déjeuner, puis deux heures de promenade sous un soleil ardent. Des maisons en dur, certaines luxueuses, bordent le chemin de terre. En passant, nous saluons les habitants. Avant le dîner, le chef nous propose un cours de cuisine : mini-nems, petits raviolis chinois, porc sauce aigre-douce, que nous savourons en buvant l’apéritif offert par Alain et Pauline, qui vont partir les premiers. Embarquement à bord du Cochinchine pour une croisière dans le Delta. Maurice, le « chef de croisière », nous accueille chaleureusement. Il est volubile, et intarissable sur l’histoire de sa famille : 54 ans, benjamin d’une famille de dix enfants (l’aînée est nonagénaire), il n’a pas eu la chance de trois de ses frères, partis étudier en France et qui sont devenus « riches » : médecin, architecte et informaticien. Ils envoient 1000 euros par an pour aider la famille, mais on sent l’amertume chez le petit frère, même s’il fait le brave : un peu radins, les frangins, pas fichus de lui offrir un billet d’avion pour leur rendre visite. Promenade dans un verger. Un gamin me suit et, sans un mot, m’offre un hibiscus rouge, puis un autre. Il a l’air triste. Pour une fois, je n’ai ni stylo, ni bonbons. Je trouve un baume du tigre et le lui donne. Pour le dérider, je le prends en photo et lui montre son image. Il me suit jusqu’à la maison de la famille qui nous accueille. A l’extérieur, deux tables comportant leur production : fruit du jacquier, ananas, mangue, orange, pamplemousse, fruit du dragon, et la théière fumante avec les petits biscuits. On se régale jusqu’à la dernière miette. Retour au Cochinchine pour le dîner arrosé de vin de Dalat, rouge et blanc. On termine la soirée sur le pont supérieur, tandis que la nuit nous enveloppe. J’offre un court poème à Alain et Pauline qui nous quitteront demain… Ce matin, arrivée à Can Tho. Nous troquons le Cochinchine pour un sampan : exploration du marché flottant de Cai Rang, où des centaines de petits bateaux se bousculent pour vendre leurs produits, principalement des fruits et légumes. La pluie gâche un peu cette excursion. D’ailleurs, il est temps de regagner Saigon. Tandis que nous nous arrêtons à l’hôtel Sanouva, Alain et Pauline sont conduits à l’aéroport. Pour ceux qui restent, avant de nous séparer pour un « dîner libre », nous faisons nos adieux à Jacques, Annie, Edith et Marie, qui partent le lendemain, à l’aube. Annie propose de créer un site sur lequel chacun peut envoyer ses photos et où l’on pourra « piocher ». Nous sommes six pour cette dernière journée à Saigon : visite de la poste, conçue par notre Eiffel national ; la Cathédrale Notre-Dame, juste à côté ; la Mairie, construite en 1908 ; le marché Ben Thanh ; un atelier de laque… Tandis que le bus dépose les autres au Sanouva, je continue jusqu’au Rex, un hôtel « du temps des Français »… Dimanche 28 Avril. Home, sweet home… Ce matin, à 7 heures, une limousine de l’hôtel me conduit à l’aéroport… 10h30 de vol sur Air France, un taxi et, vers 20 heures, je suis chez moi. Je suis contente d’être rentrée, un peu désorientée tout de même de me retrouver seule, après deux semaines soutenues dans le Nord et le tourbillon de Saigon. Pas de décalage horaire (cinq heures, c’est rien du tout !), pas même fatiguée… Mon frigo est vide, alors je bois du thé en grignotant des biscuits, et commence à visionner mes photos en pensant aux copains avec lesquels j’ai vécu trois semaines intenses. D’autant plus que nous avons, presque tous, personnellement ou par un(e) conjoint(e), des liens très forts avec le Vietnam. Nous avons eu des crises de fou-rire, des instants d’émotion et de tendresse, des échanges philosophiques - sérieux ou légers - et des moments un peu tendus… Mais je crois que nous avons tous, à des niveaux différents, bénéficié de cette expérience. Pour ma part, j’ai tellement « accumulé » que j’en ai le tournis. Ce qui ne m’empêche pas de penser… à mon prochain voyage. Paule Paris, Mai 2013
Posted on: Sun, 25 Aug 2013 09:04:01 +0000

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