Janvier 2013 : La rétroactivité fiscale dans la jurisprudence du - TopicsExpress



          

Janvier 2013 : La rétroactivité fiscale dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel Le Conseil constitutionnel a développé une jurisprudence désormais bien établie sur la rétroactivité de la loi fiscale (I). Il en a fait application lors de lexamen de la loi de finances pour 2013 et de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 (II). I – Une jurisprudence bien établie Dune part, le Conseil ne reconnaît pas lexistence dun principe de confiance légitime. Au contraire, le Conseil juge quil est loisible au législateur dadopter des dispositions fiscales rétroactives dès lors quil ne prive pas de garanties légales des exigences constitutionnelles. Ainsi, dans la décision n° 97-391 DC du 7 novembre 1997, il a jugé : « que le principe de non rétroactivité des lois na valeur constitutionnelle, en vertu de larticle 8 de la Déclaration des droits de lhomme et du citoyen, quen matière répressive ; quil est loisible au législateur dadopter des dispositions fiscales rétroactives dès lors quil ne prive pas de garantie légale des exigences constitutionnelles ; quaucune norme de valeur constitutionnelle ne garantit un principe dit de « confiance légitime ». Dans cette décision, le Conseil en déduit « quen prévoyant que les dispositions nouvelles (assujettissant à limpôt sur les sociétés les plus-values résultant des cessions dactif) régiraient les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1997, le législateur sest borné à déterminer les modalités dapplication de la loi dans le temps en fondant son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction du but quil sest fixé ; que, dans ces conditions, le principe dégalité na pas été méconnu ». Si lexigence de sécurité juridique na pas été reconnue comme un principe constitutionnel, le Conseil utilise cette exigence pour limiter la rétroactivité des lois, protéger léconomie des contrats légalement conclus et renforcer son contrôle sur les lois de validation. Dans la décision n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, il a ainsi limité les possibilités de rétroactivité de la loi fiscale : « Le principe de non rétroactivité des lois na valeur constitutionnelle, en vertu de larticle 8 de la Déclaration des droits de lhomme et du citoyen, quen matière répressive ; que néanmoins, si le législateur a la faculté dadopter des dispositions fiscales rétroactives, il ne peut le faire quen considération dun motif dintérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ». En lespèce, le Conseil a estimé que le souci de prévenir les conséquences financières dune décision de justice censurant le mode de calcul de lassiette de la contribution en cause ne constituait pas un motif dintérêt général suffisant pour modifier rétroactivement lassiette, le taux et les modalités de versement dune imposition. La jurisprudence du Conseil constitutionnel a ainsi évolué en faisant une place plus grande à la sécurité juridique à travers la protection de la garantie des droits qui résulte de larticle 16 de la Déclaration de 1789. Ainsi, depuis sa décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances pour 2006, il juge « quil est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou dabroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, dautres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; quen particulier, il méconnaîtrait la garantie des droits proclamée par larticle 16 de la Déclaration de 1789 sil portait aux situations légalement acquises une atteinte qui ne soit justifiée par un motif dintérêt général suffisant ». La notion dintérêt général « suffisant » indique un contrôle renforcé du Conseil constitutionnel sur les motifs invoqués pour justifier la rétroactivité ou la remise en cause par la loi de situations légalement acquises. II – Les décisions du 29 décembre 2012 * La conformité à la Constitution de la « petite rétroactivité » fiscale La « petite rétroactivité fiscale » est une invention jurisprudentielle du Conseil dÉtat. Elle est la conséquence de la détermination du fait générateur de limpôt. Celui-ci est fixé en matière dimpôt sur les sociétés au jour de la clôture de lexercice (CE, Ass. 16 mars 1956, n° 35663, Sieur Garrigou, concl. Laurent, Recueil p. 121-122) et en matière dimpôt sur le revenu au dernier jour de lannée civile de réalisation ou de mise à disposition des revenus (CE, Ass. 5 janvier 1962, n° 46798, Sieur X, concl Poussière, Recueil p. 7). Le fait générateur de limpôt intervient ainsi le 31 décembre, la plupart des sociétés clôturant leur exercice à la fin de lannée civile. La loi de finances de fin dannée étant publiée au plus tard à cette date, elle entre en vigueur au moment où survient le fait générateur de limpôt et régit létablissement de limpôt au titre de revenus réalisés pendant lannée qui a précédé cette entrée en vigueur. Les requérants demandaient au Conseil constitutionnel de mettre fin à la « petite rétroactivité » fiscale des articles 22, 23 et 24 de la loi de finances 2013 ou du moins den limiter les effets. Le Conseil na pas fait droit à cette demande. Il a estimé que cette « petite rétroactivité » est inhérente à des impositions acquittées en année n+1 sur des revenus ou des produits réalisés en année n. Par suite, il na pas modifié sa jurisprudence et a jugé que la modification, en fin dannée 2012, des règles applicables aux impôts qui seront dus en 2013 au titre de lannée 2012, ne portait pas atteinte à des situations légalement acquises. Il a donc écarté les griefs formulés contre les articles 22, 23 et 24 de la loi de finances pour 2013 tirés de la rétroactivité de la loi (cons. 108). Le Conseil a confirmé cette position sagissant de larticle 15 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 relatif à la réforme de limposition du produit résultant de la cession à titre onéreux dun usufruit temporaire. En effet, cette réforme nest applicable quaux cessions ayant pris date certaine à compter du 14 novembre 2012. Par conséquent, les produits de cessions ayant pris date certaine antérieurement continueront à être soumis à la législation antérieure. La « petite rétroactivité » était, en lespèce, cantonnée à la période débutant lors du dépôt du projet de loi sur le bureau de lAssemblée nationale. * Le contrôle de la rétroactivité de la loi fiscale Le Conseil a reconnu le caractère rétroactif de deux ensembles de dispositions, celles de larticle 9 de la loi de finances pour 2013 qui ôtaient au prélèvement forfaitaire opéré sur les dividendes et les produits de placement en 2012 son caractère libératoire et celles de larticle 18 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 relatives aux règles dimposition des plus-values dapport de valeurs mobilières et de titres à une société contrôlée par le cédant. Sagissant de la réforme du prélèvement libératoire versé en 2012, le Conseil a jugé que son effet rétroactif nétait pas fondé sur un motif dintérêt général suffisant. La notion de prélèvement libératoire revient en effet à libérer de limpôt par le calcul dun prélèvement sur lopération considérée. Le paiement, lorsquil est opéré, est libératoire. Limpôt exigible a déjà été versé. La mesure contestée tendait dabord à permettre de lever de nouvelles recettes fiscales. Toutefois, le Conseil nadmet quexceptionnellement quun motif purement financier puisse justifier latteinte à des situations légalement acquises. Il a en conséquence jugé contraire à la Constitution le paragraphe IV de larticle 9 et apporté également, par voie de conséquence, des modifications au paragraphe VI du même article relatif à lentrée en vigueur de certaines dispositions pour les revenus perçus en 2012 (cons. 44 et art. 4 du dispositif de la décision n° 2012-662 DC). Sagissant de larticle 18 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012, il a pour objet de mettre fin à des mécanismes doptimisation fiscale. Le Conseil a jugé que constitue un motif dintérêt général suffisant, pour faire remonter la date de prise deffet dune mesure fiscale nouvelle de cette nature à la date du dépôt du projet de loi de finances sur le bureau de lAssemblée nationale, lobjectif déviter que la publication de ce projet résultant de ce dépôt nentraîne, avant lentrée en vigueur de la loi, des effets contraires à lobjectif poursuivi. Il a donc déclaré conformes à la Constitution les dispositions du paragraphe II de larticle 18 de la loi de finances rectificative pour 2012 qui prévoyaient que le paragraphe I est applicable aux apports réalisés à compter du 14 novembre 2012 (cons. 19 de la décision n° 2012-661 DC).
Posted on: Fri, 18 Oct 2013 22:15:27 +0000

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