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BENIN : DES DERIVES PRESIDENTIELLES QUI FONT TANGUER LA REPUBLIQUE Très tôt ce matin dans le quotidien L’Evénement Précis, j’ai lu un éditorial signé par mon ami et collègue de plume Olivier Allochémè. Il avait comme titre : « Des records d’instabilité ». L’auteur y a tenté d’analyser les diverses facettes du remaniement intervenu il y a encore quelques jours dans l’équipe gouvernementale de notre pays. A vrai dire, j’ai tiré ma réflexion actuelle de son travail empreint d’un certain professionnalisme et de courage journalistique. Puis, j’en viens à présent à ma propre lecture des faits intervenus pour livrer au public facebookeur et internaute mes réflexions profondes sur notre appareil politique tel qu’il fonctionne depuis un certain temps. Inutile de m’attarder sur le factuel même du remaniement tellement il a été commenté et analysé par les divers canards de la place ainsi que les journalistes-éditorialistes qui animent tant bien que mal l’espace médiatique dans notre pays. Mon analyse va se baser sur quelques éléments majeurs permettant de débrouiller quelque peu l’horizon brumeux qui se crée pour notre démocratie depuis un certain temps. UN REGIME FANTAISISTE ET FOUTEUR DE MERDES En seulement deux ans d’exercice du pouvoir sous son deuxième et supposé dernier mandat constitutionnel, le président Boni Yayi a déjà triplé les actes de nomination au sein de son équipe gouvernementale. Un véritable signe d’instabilité chronique lorsqu’on sait les énormes défis de développement auxquels le pays fait face depuis toujours et surtout que les titulaires des divers portefeuilles ministériels n’ont généralement aucun temps pour traduite dans les faits la supposée vision du président. Le Béninois lambda est en droit de s’interroger sur la réalité de cette vision dont le président et son camp politique n’ont eu de cesse de vanter ici et là les avantages pour le peuple toujours aussi souffrant qu’appauvri. Cela d’autant que, pour son deuxième mandat gagné grâce à un K.O aussi légendaire qu’intimidant, l’on attendait de Yayi tout sauf le perpétuel jeu de relais gouvernemental auquel il a soumis le peuple cinq ans durant. En effet, aussitôt installé dans les réalités du pouvoir exécutif en Avril 2006, Yayi n’hésita pas à congédier Dame Colette Houéto de son poste de Ministre d’Enseignement Primaire, soit quelques semaines seulement après l’installation de son tout premier gouvernement. Quelques instants après, ce fut au tour du très technocrate Gaston Cossi Dossouhoui de faire les frais de la méthode cavalière du prégo puisqu’il fut remplacé au pied levé par Roger Dovonou, lui-même envoyé plus tard au ministère du commerce sans coup férir. Inutile de dénombrer les multiples nominations effectuées à la tête de nos sociétés d’Etat dont notamment celles relatives au Port Autonome de Cotonou (PAC). Systématiquement, il n’y avait pas un seul conseil de ministres sans nominations prononcées. Il n’y avait pas non de conseil des ministres sans nomination de conseillers spéciaux et de chargés de mission à la présidence. La conséquence immédiate fut une inflation de structures aux attributions floues et vides de sens sinon concurrentes entre elles. Que de deniers publics n’ont été gaspillés inutilement pour contenter les nombreux fidèles du chef d’Etat contraints à battre le macadam dans des marches à travers le pays, si bien que le Bénin donnait beaucoup plus l’image d’un vaste chantier jonché non pas de projets en cours d’exécution mais plutôt de marches empreintes de déclarations passionnées de soutien à un homme pourtant investi du pouvoir suprême au sommet de l’Etat. Ironie du sort, diront certains. A l’analyse, on peut retenir que le régime dit du changement n’a réellement rien changé de fondamental si ce n’est d’installer une sorte de fantaisie dans la gestion du pays. A voir de plus près la valse des nominations en conseil des ministres d’un mois à un autre couplé des changements intempestifs d’équipes gouvernementales, on ne peut qu’avoir des réminiscences de la triste période postindépendance où notre pays avait la réputation des changements de régimes par l’effet des coups d’Etat qui frisaient à la limite le puéril. Car pour mémoire, le Bénin a réussi le tour de force d’avoir dans son palmarès politique un président d’un jour de gouvernement. Ne me demandez pas de vous rappeler son nom. Car ça n’ennoblit personne, n’est-ce pas ? Comparaison n’est pas raison dit-on. Mais, Yayi, de par sa méthode ubuesque de gestion des affaires d’Etat n’a rien fait pour nous dégommer de cette triste réputation d’ « enfant malade de l’Afrique » qui nous collait à la peau comme une sangsue. UN AMATEURISME D’ETAT EN PLEIN XXIè SIECLE L’on pourrait concéder aux leaders qui ont géré notre pays après l’obtention de l’indépendance du 1er Août 1960 à Porto-Novo sous l’onction de la France d’avoir montré des tares dignes d’un roman de fiction. L’on pourrait leur concéder d’avoir voulu chercher à gouverner tous au même moment ce pays considéré à tort ou à raison par le célèbre romancier français Emmanuel Mounier comme étant le « quartier latin de l’Afrique ». Car un territoire jadis aux prises de monarques absolutistes et féodaux ne saurait se muer aussitôt en un oasis de démocratie et de maturité politique où le pouvoir se partage sans heurts. Non, dans une certaine mesure, on peut excuser nos anciens acteurs politiques tels que Maga, Sourou Migan Apithy, Ahomadégbé, Zinsou, etc. Ces crises de croissance qu’on connait chez tout enfant normal ont été quelque peu émoussées par le long règne du remuant Mathieu Kérékou qui dès par le jeu du dernier coup d’Etat intervenu le 26 octobre 1972 a stabilisé le jeu politique du pays et essayé tant bien que mal d’unifier une nation qui partait déjà résolument en lambeaux. Mais, ce qu’on ne peut ni comprendre ni tolérer, c’est que ce même Bénin qui au sortir de la mythique Conférence Nationale des Forces Vives de Février 1990 a su surprendre l’Afrique et la planète toute entière par son génie politique sans précédent se retrouve aujourd’hui sur le bas-côté de la gouvernance politique. On ne peut établir une quelconque logique entre notre élogieux palmarès démocratique des années ’90 et notre descente actuelle dans les profondeurs de classement sur l’ensemble du continent en matière de gouvernance. Car comment peut-on justifier qu’un chef d’Etat qui dit se soucier du développement de son pays se permettre de bafouer les règles élémentaires de gestion d’Etat en instaurant une instabilité chronique dans son équipe gouvernementale depuis son avènement à la tête de notre pays ? On peut passer sur les errements du début, c’est-à-dire lors du premier mandat. Car on arguerait que le président à la recherche d’un second mandat était obligé de sacrifier les exigences de développement. Encore que… Mais, que notre président en vienne à répéter les mêmes caprices de mutations de ministres sans raison dans son team gouvernemental et ce systématiquement depuis le début de son second mandat, cela relève d’un grave amateurisme managérial. On me dira que la constitution lui donne amplement les pouvoirs de disposer de ses ministres comme il l’entend. Soit. Mais, la morale politique recommande qu’un chef sache raison garder. Surtout que le peuple ne se retrouve pas du tout dans ces changements semblent beaucoup plus répondre d’un souci de régler des problèmes personnels que des préoccupations liées au développement socio-économique du pays. Car en réalité, ne nous leurrons pas du tout. La dissolution brutale et inattendue de l’ensemble des ministres intervenue il y a tout juste deux mois dans notre pays masque très mal une situation de crise grandeur nature entre le chef de l’Etat et quelques-uns de ses collaborateurs. En toile de fond, il y avait naturellement le scabreux dossier Talon, véritable serpent de mer qui menace d’emporter outre-tombe l’âme de tout un peuple s’il ne l’a déjà fait. En plein XXIè siècle, aucun gouvernement digne du nom ne saurait saper les bases du développement de son peuple en jouant de façon aussi dilettante avec les intérêts supérieurs de la Nation ? Dans un monde en pleine mutation et caractérisé par un tarissement de ressources de tous ordres et à tous les niveaux et où seuls les pays sérieux engrangent des avantages certains et durables, notre pays déjà laminé par des crises internes et externes ne saurait se permettre une gestion aussi hasardeuse de ses actifs. UN AVENIR OMBRAGEUX MALGRE TOUT Qui peut se convaincre de la justesse des derniers choix opérés par le chef de l’Etat. Tout d’abord, il fait entrer le Professeur Géro Amoussouga comme ministre en charge de la coordination et du suivi des Objectifs du Millénaire (OMD) et des Objectifs de Développement Durable (ODD). Nul ne peut contester au professeur son savoir-faire en matière économique notamment pour quelqu’un qui a déjà dirigé le prestigieux département des Sciences Eco à l’Université d’Abomey-Calavi. On ne saurait meilleur théoricien pour l’affaire. Mais, là où le choix du président suscite légitimement des inquiétudes, c’est le moment choisi et la matière du portefeuille. Car à voir de plus près, ces attributions se retrouvent déjà parfaitement dans celles du département en charge de la planification et du développement ou dans celui en charge de la dénationalisation. Qu’on veuille en faire un ministère à part dénote d’un manque de rigueur dans la conduite des affaires d’Etat. Certes, les OMD constituent une affaire importante dans l’ère du temps. Il faut absolument atteindre ces fameux objectifs dictés par les Nations Unies d’ici 2015, soit à un an de la fin du dernier mandat de Yayi. Mais, en fait, que faisait-on depuis 2006 pour se rapprocher significativement desdits objectifs ? Pour qu’on soit obligé d’en faire une affaire à part comme s’il suffisait de créer ce ministère présidentiel pour précipiter l’atteinte aussitôt, cela ressemble à une ruée désordonnée vers une sortie dans un stade après un match de foot. On risque de se piétiner inutilement. Passons ce choix pour nous intéresser au jeu de chaises musicales intervenu entre Naomie Azaria, la toute première femme détentrice du portefeuille des sports dans l’histoire de notre pays et Safiou Affo qui passe la main à cette dernière au ministère du commerce. Là encore, tout semble indiquer que le choix n’a pas été assez mûri. Car à peine a-t-elle réussi à conjurer les démons qui torturaient notre sport-roi en organisant avec un succès certain l’élection du nouveau bureau de la Fédération Béninoise de Football avec l’avènement de l’honorable Augustin Ahouanvoébla à la tête de ladite fédération que Yayi l’envoie s’essayer dans le chaudron surchauffé de la CCIB où rien n’augure d’une issue imminente. Le président a-t-il pris la peine d’estimer les réelles capacités de cette brave femme à gérer le commerce de notre pays dans toutes ses facettes avant de la permuter de son précédent poste ? Et qui lui dit que le nouveau titulaire des sports et loisirs saura mieux faire que Dame Azaria ? Voilà autant d’interrogations qui taraudent les esprits depuis quelques heures à l’annonce du troisième remaniement yayiste à l’ère de la Refondation. D’où il faut s’inquiéter désormais de l’avenir de notre jeunesse si les affaires d’Etat doivent être conduites avec autant de légèreté et de laxisme. DE MAUVAIS PRETEXTES POUR DE MAUVAIS RESULTATS A priori, l’érection d’un ministère spécifiquement dédié à la question des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) dans notre pays a de quoi séduire les experts en sciences économiques et en développement. Car cela semble indiquer que notre gouvernement et son chef se soucier du développement à travers les OMD qui doivent être atteints ou presque à l’horizon de l’an 2015. Mais, encore une fois, qu’est-ce qui justifie qu’on dessaisisse le très sérieux Antonin Dossou du même portefeuille au profit du fringant professeur Amoussouga ? Qu’est-ce qui justifie qu’on érige un ministère juste satisfaire des objectifs qui tiennent dans un délai de moins de deux ans à compter de la date de la nomination du nouveau ministre rattaché à la présidence ? Qu’adviendrait-il alors de ce ministère dès la consommation de la date butoir fixée par l’Organisation des Nations Unies ? Va-t-on le ranger au placard puisque sa raison d’être est spécifiquement de coordonner les OMD et les ODD ? Ainsi, à y voir de plus près, on constate que notre président s’illustre beaucoup plus dans les actes sensationnels et des actions d’éclat plutôt qu’à capitaliser sur l’existant et poser les jalons solides en vue d’un essor certain pour le développement de notre pays. Car ce fameux portefeuille chargé des OMD peut bel et bien être compris dans les attributions du département en charge de la dénationalisation ; ce qui aurait eu l’avantage d’économiser au profit du contribuable béninois les énormes charges afférentes à son fonctionnement. Il n’est pas saugrenu de croire que le gouvernement se contredit encore une fois dans sa volonté maintes fois professée de redresser l’économie du pays alors qu’il crée manifestement des conditions de dilapidation des maigres ressources dont dispose le Bénin. Peut-être faudra assurer à tout prix une promotion ministérielle au professeur Géro Amoussouga, monétariste par excellence avant le terme du dernier mandat du chef de l’Etat qu’il a soutenu envers et contre tous. Mais, qu’à cela ne tienne…On aurait pu lui trouver mieux que ce strapontin à l’allure d’une éphéméride. Et que peut-on retenir de cet universitaire dont les mérites sont reconnus ici comme ailleurs s’il doit se plier comme un simple torchon aux offres du tout-puissant prince ? Nos intellectuels ont-ils encore une dignité et une idée de leur personnalité sils doivent accepter pour un oui ou un non de s’acoquiner avec le pouvoir politique ? D’où la question centrale qui se profile dans tout ce trémolo gouvernemental: le président Yayi a-t-il la maitrise de la science de gouvernementale ? Sait-il vraiment s’y prendre lorsqu’il s’agit de nommer un cadre au gouvernement selon les critères d’éligibilité ? Est-il parvenu à cerner les contours de la science managériale dans ses notions basiques depuis plus de sept ans de présidence ? Le moins qu’on puisse dire est qu’on patauge encore dans un amateurisme de mauvais goût au pays du vaudou comme on appelle mon pays. Car si on doit remanier à trois reprises un même gouvernement en seulement deux ans sans qu’il y ait eu une crise majeure, cela prête à un simple jeu de cartes où les joueurs déplacent les pions dans tous les sens sans enjeu. Oui, disons-le tout net : un jeu sans enjeu est insipide et fastidieux aussi bien pour les joueurs que pour les spectateurs. Yayi semble ne pas savoir qu’un ministre, c’est un haut personnage da la République et non un simple quidam qu’on va piquer n’importe où. C’est quelqu’un qui a atteint un niveau de compétence indiscutable dans son domaine et qu’on lui demande de confirmer au plan national tout comme on le fait pour un joueur sélectionné dans l’équipe national de foot. Car remplacer Blaise Ahanhanzo-Glèlè par un simple chef d’arrondissement comme Brice Sossouhounto à la tête du très stratégique département de l’environnement ne peut s’analyser de cette même façon. Ceux qui ont estimé que le président aime composer avec des pantins qu’il peut faire gicler à tout moment n’ont pas tort, n’est-ce pas ? En cela, Yayi aura sans doute réussi à nous administrer une nouvelle approche bien curieuse de gouvernement que nous devrions exporter hors de nos frontières nationales. En cela, le docteur en économie aura démontré aussi ses talents de politologue patenté, n’est-ce pas ? Et sa nouvelle doctrine sera sans aucun doute la « yayicratie » à expérimenter désormais dans tous les pays africains.
Posted on: Thu, 10 Oct 2013 11:22:08 +0000

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