Hollywood : Arme de persuasion massive La propagande a toujours - TopicsExpress



          

Hollywood : Arme de persuasion massive La propagande a toujours été un instrument de pouvoir, ceci depuis la Rome antique. Destinée à l’embrigadement des foules, elle a été employée dans des proportions industrielles lors de la montée du fascisme en Europe et dans l’ex URSS pour promouvoir les idées des régimes, conduisant parfois à des extrémités comme le Stakhanovisme (du nom d’un mineur mythique qui aurait abattu en une journée l’équivalent du travail de 17 mineurs moyens, dont la légende poussait les ouvriers à se dépasser dans l’espoir d’atteindre cet objectif surhumain). Mais, comme le révèle ce documentaire intitulé « opération Hollywood », les institutions américaines ont également cédé face aux sirènes de la propagande et de la désinformation, en employant le divertissement pour exalter le sentiment patriotique qui justifiait les guerres menées par les Etats-Unis depuis la seconde moitié du vingtième siècle. Grâce au journaliste Dave Robb, qui s’intéresse aux relations parfois étroites entre le Pentagone (quartier général des forces de la défense des États-Unis) et Hollywood, le réalisateur Emilio Pacull dresse un état des lieux de ces liens souvent délétères entre une organisation tournée vers le profit (Hollywood) et une autre, vers la domination (le Pentagone). La première trace d’influence de l’armée sur le divertissement évoquée par Dave Robb se trouve dans le feuilleton télévisé « Lassie », qui raconte les aventures toutes mignonnes d’un gamin, Jimmy Miller et de sa fidèle chienne, Lassie. La série, pourtant loin de toute revendication politique a subi l’influence de l’armée lorsqu’une de ses aventures implique des militaires. Dans le scénario original, la gentille Lassie réagit à un bruit anormal lors du crash d’un avion de l’armée de l’air. Le bruit était dû à une malfaçon de l’appareil, et de là vient le nœud du problème car l’armée, mise à contribution pour des raisons logistiques a forcé la production en charge de « Lassie » de changer le scénario, qui attribue le crash de l’avion au gel des instruments, ce qui est un dégât imprévisible et aléatoire. Le plus important dans cette anecdote, c’est la volonté inflexible de l’armée de paraître irréprochable, y compris dans l’entretien de ses appareils. La cible de la série a également son importance : les enfants, qui sont les soldats de demain. Preuve à l’appui, Dave Robb a prouvé que les militaires n’accordent leur aide que si le scénario leur plaît, et si ce n’est pas le cas, la collaboration ne se concrétisera que si celui ci est remanié selon leur goût. Comme le rappelle Philip Noyce, un réalisateur, Hollywood aborde l’armée par souci d’économie, puisqu’elle dispose et peut prêter le matériel nécessaire pour réaliser un film de guerre crédible. L’armée quant à elle se montre coopérative lorsqu’elle y trouve un intérêt publicitaire et dans ce sens, ce qui n’est pas bon pour l’image de l’armée se retrouve exclu de ce mécénat, qui ne date pas d’hier… Cette relation est en fait essentielle pour les forces armées, car la population, dans sa grande majorité ne fait l’expérience de la guerre qu’à travers le cinéma (même si les médias vont de plus en plus « près » des conflits). Pour exemple, le film « Pearl Harbour », mettant en scène un triangle amoureux sous les bombes de l’attaque japonaise dans l’avant poste américain, déclencheur de l’entrée en guerre des Etats-Unis dans la seconde guerre mondiale. Le film connu un succès monstre grâce aux deux éphèbes se disputant la belle tout en défendant les valeurs américaines, mise à mal par un ennemi bien traître. Selon Dave Robb, la pire erreur de « Pearl Harbour » réside dans l’autocensure à laquelle se sont soumis les scénaristes, afin de contenter au mieux le Pentagone et ainsi bénéficier de son soutient complet. Philip Strub, représentant des forces armées dans ce documentaire admet que les films comme « Pearl Harbour » sont bons pour l’armée et influencent le public puisqu’ils suscitent de l’intérêt pour les évènements auxquels ils se réfèrent. L’essentiel est donc que l’armée soit dépeinte comme positive, en véhiculant héroïsme et franche camaraderie, afin de susciter des vocations militaires dans le public. Le premier exemple d’implication directe de l’armée dans l’industrie hollywoodienne est « Wings » sorti en 1927 sur la première guerre mondiale. Outre le prêt de matériel, l’armée a également investi directement dans la production du film. En 1941, alors que les Etats-Unis s’apprêtent à rejoindre le conflit mondial, armée et cinéma travaillent main dans la main pour promouvoir l’effort de guerre. Des vétérans filment les conflits pour Hollywood dans l’esprit américain, mais parmi ses films, « Que la lumière soit », une vérité émerge qui sera pourtant tue au public : aucun soldat ne revient sans blessure. Dans les années 60, la collaboration continue et trouve son apogée dans « Le jour le plus long » vantant les faits d’armes américains lors de la seconde guerre mondiale, la guerre juste (et puis aussi bien gagnée). La donne change avec la guerre du Viêt-Nam, qui oppose les américains aux armées révolutionnaires communistes locales. Le conflit que les américains pensaient gagné d’avance, s’enlise face à un ennemi qui connaît parfaitement le terrain (la jungle vietnamienne ca doit pas être facile) et capable de se sacrifier pour la cause qu’il défend. Les armées américaines pour tenter de repousser et de briser la résistance de ses adversaires seront conduites à des exactions aujourd’hui réprouvées par l’Histoire, comme la diffusion de l’agent orange, pesticide aux propriétés tératogènes (engendrant des difformités chez l’embryon). La guerre du Viêt-Nam est donc loin d’être propre, suscite le mécontentement des foules et l’émergence des mouvements pacifistes. Reflet de cette vision du Mal dans les intentions et les procédés de l’armée des films comme Full Metal Jacket, Platoon ou « Apocalypse Now » se verront refuser l’aide de l’armée. Pourtant, le film « Bérets Verts » donne une vision exagérément optimiste de ce conflit et a bénéficié largement du soutient de l’armée. Cette tentative ne parviendra pas à effacer le traumatisme laissé par cette guerre. Des films comme « Platoon » semblent pourtant essentiels à la compréhension de la guerre du Viet Nam comme le rappelle Dale Dye, le conseiller militaire du filme. Il permet au public de renouer avec cette page de son histoire, en lui montrant son enfer ce qui contente à la fois vétérans et pacifistes. Le film servant aujourd’hui de référence à la fois en tant que témoignage réaliste et en tant que film de guerre en général est « Apocalypse Now », de Francis Ford Coppola. Le film raconte l’histoire d’un officier américain remontant le Mékong afin d’exécuter un autre officier coupable de sédition et de trahison. Durant le voyage il découvre la dévastation du Viet Nam et les exactions de ses frères d’armes, réduits à faire le Mal dans un conflit sans raison et mené par des incompétents (ou des monstres, selon le point de vue). Philip Strub illustre parfaitement l’évidence selon laquelle l’armée ne pouvait participer à « Apocalypse Now », car son synopsis prend sa source dans l’ordre donné à un soldat américain d’en tuer un autre, et ça c’est pas très positif et véhicule une autre idée que la franche camaraderie. Après la guerre du Viet-Nam le pentagone se concentre sur le développement de nouvelles technologies, considérées alors comme l’avenir des conflits armés. Dans ce courant, Hollywood renoue avec l’armée dans le film Top Gun qui deviendra un énorme succès. Encore une fois, un triangle amoureux (une belle jeune fille qui hésite entre deux beaux gosses), de gros engins volants, de la frime et du patriotisme sont au menu. Le film promet aux jeunes américains des sensations fortes, des potes, et de beaux joujoux volants et il n’en fallait pas moins à l’armée pour collaborer avec le plus grand enthousiasme. 5 ans après Top Gun, lorsque la première guerre du Golfe éclate, le public a de nouveau confiance dans les motivations de ses dirigeants. Cependant, la supériorité technologique des américains se révèle écrasante, et coupe toute tension dramatique exploitable dans un film à grand budget. C’est donc ici Hollywood qui s’éloigne du sujet de la guerre. Les forces armées contrôlent tout de même les images, gommant le côté « salissant » de la guerre et ses atrocités. L’industrie hollywoodienne avait besoin de nouveaux ennemis, contournant la technologie qui les vaincrait trop facilement : les terroristes. Ces nouveaux méchants ont fait l’apparition au cinéma bien avant les évènements du 11 septembre 2001, et évidemment après. Même après les revers du Viet-Nam, l’armée s’acharne à donner une bonne image de ses soldats, nuisant à la véracité. Pour exemple, la page 51 du script original des « Messagers du Vent » dans laquelle un dentiste arrache les dents en or d’un cadavre. Cette anecdote ne fut pas du goût de l’agent de liaison et le personnage du dentiste fut effacé du scénario. Les soldats américains sont tous des gentils. Le film « treize jours », bien que basé sur des enregistrements authentiques prouvant que des généraux ont tenté de pousser le président Kennedy dans une troisième guerre mondiale lors de la crise des missiles de Cuba, n’a reçu aucun soutient de l’armée, qui n’aimait pas l’image sous laquelle elle a été présentée. L’armée ne peut pas directement museler un réalisateur qui ne colle pas à son image de marque, car la liberté de parole est garantie par le premier amendement de la constitution des États-Unis. Le fait de refuser son aide si le scénario ne lui plaît pas est la seule parade contre le cinéma qui lui fait de l’ombre. Pourtant l’attitude inverse, le fait de favoriser certains films dans un but de propagande est anticonstitutionnel car il utilise les moyens issus de l’argent public pour son propre bénéfice. De plus, le public est tout autant captif que les réalisateurs déboutés, puisque ceux ci ne peuvent livrer leur propre opinion. Après les attentats du 11 septembre, l’armée rentre dans une nouvelle ère de communication et réalise ses propres films de propagande. La réalité se mêle à des images « grand spectacle » pour promouvoir les guerres contre le terrorisme, au nom de la sacro-sainte liberté de parole à laquelle chaque homme devrait avoir droit. La guerre attise la curiosité du public, et son besoin sans limite d’informations le pousse vers des jeux vidéo simulant le combat armé. L’idée de la guerre se banalise, s’édulcore encore dans les esprits et l’armée se frotte les mains. Le réalisme de la guerre n’est pas bon à voir, car il décourage les vocations. Pourtant, l’armée ne peut pas nier certains faits, comme ceux qui ont inspirés « la Chute du faucon noir », à savoir les crashs d’hélicoptères américains et la récupération des survivants par les camarades dans une population très hostile. Malgré les images fortes, l’armée accorda sa collaboration grâce à l’héroïsme mis en avant dans le film et à la relative réussite de la mission. Le film se termine sur le maigre espoir que l’armée collabore à un film anti-guerre, prouvant ainsi qu’elle défend toutes les opinions y compris celles qui lui sont défavorables. Ce documentaire permet de prendre une certaine distance quant à l’image de l’armée véhiculée par certains films hollywoodiens. La critique de la propagande employée par l’armée est totalement justifiée, mais ne conçoit pas que celle ci soit conditionnée par des décennies d’usage, qui dans ses débuts était inspirée par les meilleures intentions (gagner la guerre, préférable à la perdre, ça met tout le monde d’accord). Ses dérives sincarnent à la perfection dans Philip Strub, agent de liaison du Pentagone à Hollywood, expert en noyade de poisson. Soulignons la justesse de la règle cinématographique émise par Dave Robb, établissant un rapport entre la qualité du film et l’absence de toute collaboration du Pentagone. L’influence pernicieuse devient parfois risible tellement elle est exagérée, notamment dans la série Stargate SG 1, dans laquelle l’US Air Force apparaît plus comme une compagnie de boy-scouts que comme une force militaire. La propagande gagnent même des genres éloignés de la réalité comme la science fiction, dans le très moyen « Battle for Los Angeles » qui voit le brave Aaron Eckhart dégouliner le patriotisme pas frais face à des extraterrestres très agressifs. L’armée américaine n’a pas fini de faire du dégât, y compris dans nos salles obscures…
Posted on: Wed, 27 Nov 2013 22:44:25 +0000

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