J’avais devant les yeux les ténèbres. L’abîme Qui n’a - TopicsExpress



          

J’avais devant les yeux les ténèbres. L’abîme Qui n’a pas de rivage et qui n’a pas de cime, Était là, morne, immense ; et rien n’y remuait. Je me sentais perdu dans l’infini muet. Au fond, à travers l’ombre, impénétrable voile, On apercevait Dieu comme une sombre étoile. Je m’écriai : — Mon âme, ô mon âme ! il faudrait, Pour traverser ce gouffre où nul bord n’apparaît, Et pour qu’en cette nuit jusqu’à ton Dieu tu marches, Bâtir un pont géant sur des millions d’arches. Qui le pourra jamais ! Personne ! ô deuil ! effroi ! Pleure ! — Un fantôme blanc se dressa devant moi Pendant que je jetai sur l’ombre un œil d’alarme, Et ce fantôme avait la forme d’une larme ; C’était un front de vierge avec des mains d’enfant ; Il ressemblait au lys que la blancheur défend ; Ses mains en se joignant faisaient de la lumière. Il me montra l’abîme où va toute poussière, Si profond, que jamais un écho n’y répond ; Et me dit : — Si tu veux je bâtirai le pont. Vers ce pâle inconnu je levai ma paupière. — Quel est ton nom ? lui dis-je. Il me dit : — La prière. Victor HUGO Les Contemplations, Jersey, déc. 1852. + Merci à Société Joseph de Maistre pour cette ID célestielle +
Posted on: Fri, 20 Sep 2013 07:42:00 +0000

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