Mon égarement de la nuit : Jack avait eu une journée - TopicsExpress



          

Mon égarement de la nuit : Jack avait eu une journée difficile il est vrai. Il est vrai quil avait été à deux doigts détranger sa secrétaire et de poignarder son patron, ou linverse, il ne savait plus. Il était énervé. Nerveusement épuisé. Il devait avoir une sale tête, car une jeune touriste, lair perdue et une carte de Paris à la main avait brusquement renoncer à lui demander son chemin quand il avait relevé les yeux de son journal. Oui, son travail commençait à simprimer sur lui, il en avait conscience. De plus en plus sombre, de plus en plus inquiétant. Mais au moment où il franchit les portes du métro, il laissa comme chaque jour sur le quai un poids immense et les traits de son visage se décontractèrent instantanément. Linda était sa princesse, sa muse, une divinité faite femme. Et le mieux, cest quelle vivait chez lui. Il se réjouissait davance: Que lui avait-elle préparé comme surprise aujourdhui? Chaque soir quil rentrait épuisé du boulot depuis six mois, elle enluminait sa vie et effaçait les blessures de la journée par une action réjouissante et spectaculaire. Une fois elle avait changé le minuscule appartement en nid damour bestial, tamisant lambiance avec des bougies, répandant des pétales de roses et lattendant nue sur le lit dans une attitude féline provocante, un verre de champagne à la main. Une autre fois elle lui avait préparé un repas formidable fait des mets les plus délicats, une autre fois tous ses amis lattendaient chez lui pour lui fêter son non-anniversaire... Bref, Linda était formidable et elle était la femme de sa vie. Il allait lépouser et ensemble, ouvrir un restaurant dans le sud de la France, près de Montpellier, puisque cest là quelle avait grandi et où elle aspirait à faire grandir des enfants. Cest pour ça quil se tuait à la tâche, cest pour ça quil supportait tous ces connards au travail, ce rêve, ce si doux rêve.. La seule couleur qui éclairait sa vie. Une fille à la peau brune et aux divines boucles ambrées. Il finit son trajet de retour en imaginant davance tous les outrages quil allait lui faire subir ce soir, encore. Lorsque quil sortit de lascenseur au sixième étage de son immeuble, il se sentit brutalement glacé avant même davoir vu de quoi il sagissait. Un instinct animal lui fit immédiatement sentir que quelque chose allait de travers. Pourtant en relevant la tête et en jetant un regard sur le long couloir parsemé de portes, il ne vit rien danormal. Mais son estomac se tordait. Un très mauvais sentiment, comme une méchante pointe au cœur. Quest-ce quil marrive? il fit un pas en avant pour éviter la porte de lascenseur qui se refermait et qui menaçait de lui emporter un bras. Son appartement était au bout du couloir miteux et terriblement sombre, car les ampoules pétées navaient jamais été changées. Je délire. Je suis juste très fatigué. se dit-il en secouant la tête se convaincre de bouger alors quil était demeuré immobile quelques secondes. Malgré cette pensée, latroce malaise quil ressentait ne se dissipait pas. Il se décida à avancer. il marchait dun pas lourd dangoisse, son cœur saccélérait à chaque mètre parcouru. Il lentendait battre dans sa tête. Il ne clignait plus des yeux, son regard était fixé sur la porte derrière laquelle Linda lattendait. Linda.. Il essayait de se détendre en pensant à elle pour contrer cet absurde idée de malheur. Mais ses mains étaient blanches à force de serrer le sac et le journal quelles tenaient. Arriver devant la porte lui sembla être une éternité. Il prit une grande respiration et chercha sa clef dans sa poche de manteau. Un silence anormal régnait. Quelle surprise lui avait-elle préparé? Encore une avec tous ses amis qui surgissent de derrière les meubles en criant joyeux non-anniversaire!? Il commença à tourner la clef dans la serrure mais se paralysa instantanément, Car se faisant, il avait regardé vers le sol. Il écarquilla les yeux: Une marre de sang. Une grande flaque qui semblait avoir coulé de dessous la porte vers le couloir. Il se sentit pas bondir en arrière, mais il eut conscience de heurter de plein fouet le mur. Son sac tomba sur le sol en projetant de grandes éclaboussures, détail quil ne pu sempêcher de voir et dont la vision le terrorisèrent encore plus. Il entendit résonner son propre hurlement qui finit par mourir dans sa gorge dans un râle dangoisse étouffé. Il était là, tremblant de tout son être, réduit à présent au silence par la terreur. Il navait jamais pu supporter le sang et tout ce qui se rattachait à la violence. Cette intrusion dans son quotidien était comme une déchirure soudaine dans la stabilité de son état mental. Il se sentait partir, ses pensées fusaient dans tous les sens. Il narrivait pas à se décider à faire quelque chose. Après un moment infini de pur effroi, rompant brutalement la camisole de langoisse qui lemprisonnait, il se jeta sur la porte, louvrit à la volée et se précipita à lintérieur. Le noir absolu. Il vacilla, les mains en avant, comme un aveugle perdu. Il pensa à Linda, il pensa aussi à lagresseur qui pouvait être encore là, et malgré sa peur de mourir lui aussi, il ne pouvait sempêcher davancer. Ça sentait le sang à plein nez. Il traversa le salon dans la plus totale obscurité. Il avait limpression davancer vers la mort. Le silence pesait sur ses épaules, oppressant. Linda? se risqua t-il à appeler dune voix chevrotante. Cest à ce moment là quavançant son pied, il heurta une masse molle qui le fit basculer. Il sentit le choc lorsque sa tête frappa la chaise qui se renversa dans un grand fracas. Abasourdi quelques secondes, Jack ne savait plus où était le haut et le bas, où il se trouvait. Il se sentit dun coup tournoyer dans le vide comme si il avait été avalé par les ténèbres et la pensée quil ne reverrait plus jamais la lumière du jour le traversa comme une griffe glacée. Revenant un peu à lui, tâtonnant frénétiquement la moquette pour comprendre ce qui était près de lui, il réalisa dun coup que quelque chose se trouvait sous ses jambes. Quelque chose de tiède. En une seconde il compris. Se retournant, ses mains rencontrèrent de délicates boucles. Puis un visage de princesse. Il poussa un hurlement déchirant. Cest à ce moment là que ce qui était resté jusque là tapis dans lobscurité, bougea de lautre coté de la pièce, et se déplaçant rapidement sans encombre, surgit près de lui dans un bruit de tissus froissé. ferme là, connard fut la dernière chose quil entendit avant que le son sourd de lobjet qui lui fracassa le crâne ne résonne dans sa tête.
Posted on: Sun, 10 Nov 2013 16:45:33 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015