SECTION 1 : LES REGIMES POLITIQUES. La notion de régime - TopicsExpress



          

SECTION 1 : LES REGIMES POLITIQUES. La notion de régime politique permet de comparer les différents modes de gouvernement étatique. Cependant, il est difficile de définir les éléments caractéristiques d’un régime ; par exemple la différence qui sépare la république et la démocratie. Pour Jean-Louis QUERMONNE, le régime politique c’est « l’ensemble de éléments d’ordre idéologiques, institutionnels et sociologiques qui concourent à former le gouvernement d’un pays donné pendant une période déterminée. » La notion de régime politique comporte quatre éléments : • Le principe de légitimité. • La structure des institutions. • La configuration du système des partis. • La forme et le rôle de l’Etat. I. Genèse des typologies des régimes politiques. A/ La typologie d’Aristote. Aristote est un philosophe grec du 4ème siècle avant JC : 384 – 322. Dans ses ouvrages ; Ethique à Nicomaque et La Politique, Aristote cherche à classer de façon empirique les différentes constitutions et à les juger d’un point de vue moral : quelle est la meilleure et la plus juste des formes de gouvernement ? Il distingue les formes ayant pour but la justice dans le sens de l’intérêt commun, et celles qui ne visent que l’intérêt personnel des dirigeants. Selon Aristote, il existe trois formes « correctes » de régimes politiques qui visent l’intérêt commun et qu’il distingue selon le nombre de gouvernants appelés à exercer l’autorité : • Lorsqu’il y a un seul gouvernant, il s’agit de la royauté : « L’Etat où le commandement n’appartient qu’à un seul. » • Lorsqu’il y a quelques gouvernants, c’est l’aristocratie : « L’Etat où le commandement est confié à plus d’un. Il s’agit de personnes parmi les plus honnêtes parce qu’elles n’ont en vue que le plus grand bien de l’Etat et de ses membres. » • Lorsqu’il y a une multitude de gouvernants, c’est une politeïa (terme grec parfois traduit par république) : « L’Etat où la multitude gouverne pour l’utilité publique. » Cependant, Aristote indique que chacune de ces formes peut dégénérer : • la royauté en tyrannie, qui est une monarchie qui vise le seul intérêt du monarque. • L’aristocratie en oligarchie, qui est une forme d’aristocratie qui ne vise que l’intérêt des plus riches. • La politeïa en démocratie, qui est une forme de politeïa qui ne vise que l’intérêt des plus pauvres. Ce sont des formes déviantes qui ne visent que l’intérêt de quelques uns au lieu de celui de toute la population. Selon Aristote, ces formes sont corrompues : « Les constitutions qui sont des déviation des constitutions normales présentent un caractère despotique. » Aristote introduit un élément supplémentaire dans La Politique afin de distinguer l’oligarchie et la démocratie : le statut socio-économique de ceux qui gouvernent. « La différence véritable qui sépare la démocratie et l’oligarchie l’une de l’autre c’est la pauvreté et la richesse. » La richesse est en effet l’apanage de la minorité. La démocratie est donc le gouvernement des pauvres qui s’exerce contre les riches alors que la politeïa est un gouvernement qui vise l’utilité commune sans exclure qui que ce soit. La typologie d’Aristote cherche à faciliter le jugement de valeur concernant le bon gouvernement. Si elle paraît simpliste au premier abord, elle est en réalité plutôt complexe dans la mesure où elle fonctionne à un triple niveau ; un niveau éthique et moral (il donne son avis) ; un niveau institutionnel (le nombre de gouvernants) et un niveau socio-économique avec la notion de richesse. Aristote défend, quant à lui, une forme mixte (ou moyenne) qui est le régime constitutionnel permettant à tous les citoyens d’accéder au moins à certaines charges publiques. C’est-à-dire que les citoyens sont tour à tour gouvernants et gouvernés. Cependant, pour Aristote, la royauté peut, dans certains cas, s’avérer être la meilleure forme de gouvernement même si en pratique, il est préférable qu’une constitution aie les traits de la politeïa et de l’aristocratie. D’après Aristote, la meilleure constitution est celle où la classe moyenne gouverne, exerce le contrôle politique. En effet, il estime : • Que les décisions collectives sont sans doute bonnes et justes • Que si la classe moyenne est assez nombreuse pour conserver un équilibre entre les pouvoirs, l’Etat aura une grande stabilité. Machiavel, auteur du 16ème siècle, se réfère explicitement à la typologie d’Aristote en étant assez pessimiste : « Nulle précaution ne peut empêcher que chacune de ces espèces réputées bonnes, quelles qu’elles soient, ne dégénère dans son espèce correspondante. » Cette typologie reste une référence pour les sociologues d’aujourd’hui, tout en présentant un intérêt historique. B/ La typologie de Montesquieu. Charles Louis de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu (1689 – 1755) est donc un noble, ce qui donne une importance à sa pensée. Elu à l’Académie française en 1728, il voyage beaucoup en Europe et c’est lors de ces voyages qu’il observe les différentes formes de gouvernement existantes qu’il classe dans son ouvrage ; De l’Esprit des Lois, parut en 1748. Il les classe selon leur : _nature, c’est-à-dire selon la répartition institutionnelle du pouvoir souverain, _principe ; qui anime chaque forme de gouvernement. Pour Montesquieu, les pratiques culturelles sont le ressort qui fait fonctionner chaque mécanisme institutionnel. C’est-à-dire qu’un mode de gouvernement n’est pas simplement un agencement de règles juridiques mais repose sur la dynamique sociale propre à chaque régime ; la relation entre les habitants et le mode de gouvernement d’un état. A la différence d’Aristote, Montesquieu cherche plutôt à comprendre qu’à juger les régimes ; la dimension morale est absente de son analyse. Il distingue trois types de régimes : « Il y a trois espèces de gouvernement : le républicain, le monarchique et le despotique. » • Le gouvernement républicain qui se décline en deux formes : _la république démocratique : « C’est le régime où le peuple tout entier exerce , en corps, sa souveraine puissance. ». Montesquieu se réfère ici aux petites cités-états de la Grèce antique où les citoyens pouvaient directement exercer l’autorité. _la république aristocratique qui est définie comme le régime dans lequel la puissance souveraine appartient seulement à une partie du peuple et il s’agit généralement de la noblesse. Montesquieu évoque les exemples des républiques de Venise et de Gênes ainsi que la monarchie élective de Pologne. • Le gouvernement monarchique : « La monarchie est le régime où un seul gouverne mais par des lois fixes et établies. » « Le Roi doit œuvrer en accord avec les pouvoirs intermédiaires, subordonnés et dépendant. ». Par cette phrase, Montesquieu défend son ordre pour lui, la monarchie doit aller de pair avec la noblesse. • Le gouvernement despotique qu’il critique très vivement car selon lui, ce régime rime avec la crainte et l’arbitraire. « Un seul homme gouverne selon son caprice ; sans lois ni règles. » implicitement, Montesquieu vise la monarchie française, qu’il condamne. Pour Montesquieu, le principe inhérent à la monarchie, c’est l’honneur alors que dan les républiques, ce principe est la « vertu », terme par lequel il entend un patriotisme passionné, un dévouement sans égal pour la patrie. Au début de son ouvrage, Montesquieu vante cette vertu, mais au fur et à mesure qu’il progresse dans son analyse, il met en évidence son sens inhumain et irrationnel : « La vertu nécessite un certain conformisme imposé par les gouvernements et qui altère les libertés des individus. » Parallèlement, Montesquieu met en avant les aspects positifs de l’honneur monarchique qui élève l’individualité sans l’étouffer. Montesquieu prépare le lecteur à l’éloge de la constitution anglaise. En effet, en Angleterre, l’ancien gouvernement monarchique dont les racines s’appuyaient sur l’honneur s’est transformé de lui-même en un système plus efficace de pouvoirs compensateurs (séparation des pouvoirs). Montesquieu érige la constitution anglaise en modèle et indique implicitement que chaque nation devrait l’imiter. Cette constitution anglaise repose sur le système de contre-poids : le pouvoir exécutif est entre les mains du monarque alors que le pouvoir judiciaire appartient aux magistrats et que le pouvoir législatif appartient à des chambres même si le Roi a la possibilité d’y participer par son veto. C/ La typologie de Rousseau. Rousseau, auteur du 18ème siècle : 1712 – 1778. Sa pensée politique est fondée sur le concept de volonté générale et estime que les fondements du droit et de la société politique reposent sur l’ensemble des citoyens qui agissent comme un tout et qui adoptent des lois appliquées à chaque individu. Rousseau réfute les fondements de l’Ancien Régime ; pour lui, les citoyens sont le seul souverain légitime de la communauté politique. Il distingue bien le peuple souverain et le gouvernement qui est seulement l’agent de la volonté générale et dont les formes d’organisation sont multiples. Sa typologie peut être rapprochée de celle d’Aristote ; dans son ouvrage le Contrat Social, il différencie trois formes de gouvernements en se fondant également sur le nombre de gouvernants : • La démocratie : « Tout le peuple ou la plus grande partie du peuple exerce la souveraineté. » • L’aristocratie : « La souveraineté est détenue par une minorité d’individus » • La monarchie : « Le gouvernement est concentré dans les mains d’un magistrat unique dont tous les autres tiennent leur pouvoir. » D’après Rousseau, chaque forme de gouvernement est « la meilleure en certains cas et la pire en d’autres. » Mais en général, la démocratie se prête plutôt aux états petits et pauvres ; l’aristocratie aux états médiocres en grandeur et en richesse ; et la monarchie aux grands états opulents. !! à la définition de la démocratie par Rousseau. Rousseau défend, quant à lui la démocratie même s’il en retient une acception très étroite qui ne concerne que les petits états où les citoyens exercent directement le pouvoir. « Il convient tout à fait que dans la rigueur de l’acception, la démocratie n’a jamais existée et n’existera jamais. » Quant à la monarchie, si Rousseau admet que c’est le type de gouvernement qui a le plus de vigueur, il en critique les éléments : « le but de la monarchie n’est point celui de la félicité publique et la force même de l’administration tourne sans cesse au préjudice de l’Etat. » L’aristocratie est moins critiquée et Rousseau en distingue plusieurs sortes : _l’aristocratie naturelle qui convient aux peuples simple régis par des sages, des anciens (comme les Indiens d’Amérique) qui gouvernent grâce à la possession d’une certaine expérience. _l’aristocratie héréditaire qui est un gouvernement par la noblesse, est également le pire des gouvernements pour Rousseau. _l’aristocratie élective qui est proche du gouvernement représentatif dans la mesure où elle consiste à confier par des élections, l’administration des affaires publiques aux plus sages (aux plus instruits) ainsi qu’à ceux qui peuvent mieux y donner tout leur temps. Cette typologie se rapproche de celle d’Aristote car Rousseau considère également que chaque forme de gouvernement correcte peut dégénérer : • La démocratie en ochlocratie • L’aristocratie en oligarchie • La monarchie en tyrannie D’après Rousseau, si les gouvernements peuvent dégénérer, c’est parce que la volonté particulière des gouvernants agit sans cesse contre leur volonté générale, c’est-à-dire leur conception de l’intérêt collectif. La principale préoccupation de Rousseau est d’essayer de mettre en évidence les conditions dans lesquelles un gouvernement peut être le meilleur. Il existe de nombreuses lectures de la pensée de Rousseau ; certains pensent qu’il est le fondateur de la démocratie alors que d’autres, comme Karl POPPER, pensent qu’il est le précurseur du totalitarisme. En effet, dans le Contrat Social, Rousseau écrit : « Il faut faire en sorte que chaque citoyen soit dans une parfaite indépendance de tous les autres et dans une excessive dépendance de la cité. Ce qui se fait toujours dans les mêmes moyens ; il n’y a que la force de l’Etat qui fasse la liberté de ses citoyens ? . » Le totalitarisme est la confusion des sphères privée et publique. II. Les régimes démocratiques. A/ Le concept de démocratie. 1. Les critères des régimes démocratiques. Au sens étymologique, la démocratie est le gouvernement par le peuple. Pour certains, la démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Dans ce cas, l’intérêt général est l’intérêt particulier au peuple. Le choix des gouvernants par le peuple et le principe représentatif. Depuis le 18ème siècle, avec l’apparition du régime représentatif, on distingue : • La démocratie directe qui est un régime politique dans lequel le peuple gouverne directement ; il adopte et exécute les lois. En pratique, elle a pu exister dans les cités-états grecques, dans certains cantons suisses, parfois en France lorsque l’on a recours au référendum, mais le plus souvent, s’il en existe une certaine forme, elle complète la démocratie indirecte. • La démocratie indirecte qui est un régime gouverné par un nombre restreint d’individus qui représentent la nation dans son ensemble et sont élus par les citoyens (c’est une forme de choix délibéré). Cependant, le choix des gouvernants par le peuple et le principe représentatif sont des conditions nécessaires mais pas suffisantes. La séparation des pouvoirs et son système de contre-poids. La distinction des autorités qui exercent les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, permet de garantir que les décisions politiques vont bien dans le sens de l’intérêt général. Le niveau élevé de libertés et de droits accordés et garantis au citoyen. Ils sont garantis dans la Loi fondamentale de l’Etat : la Constitution. Les régimes démocratiques garantissent la libre confrontation des idées et des opinions, donc la libre compétition des candidats à la représentation : c’est le pluralisme. La Constitution définit des règles auxquelles sont soumises les différentes autorités politiques. La Constitution encadre le pouvoir et garantit les libertés. Tous les régimes démocratiques contemporains qui ont ces critères ne fonctionnent pourtant pas de la même manière ; il y a distinction entre un régime parlementaire et un régime présidentiel. Les régimes démocratiques peuvent être également des monarchies ; les monarchies constitutionnelles, ou des républiques. 2. La distinction entre république et démocratie. La république Etymologiquement : res qui signifie la chose et publica, publique. Donc la chose publique. Elle est souvent opposée à la monarchie, ce qui est un tort dans la mesure où elles peuvent être toutes les deux des démocraties pluralistes. La différence entre la république et la monarchie réside dans les modalités d’accès au pouvoir exécutif ; dans une république les citoyens élisent leur Président alors que dans une monarchie, le Roi ou la Reine accède à la tête de l’Etat selon une logique héréditaire et non pas élective. Les monarchies constitutionnelles (Grande-Bretagne) sont des démocraties pluralistes ; les rois et les reines ont essentiellement une fonction symbolique ; c’est en réalité le 1er Ministre, issu d’une élection, qui est le véritable chef du gouvernement. Les termes de démocratie et de république ne se recouvrent pas. La démocratie n’est forcément une république puisqu’elle peut prendre la forme d’une monarchie constitutionnelle. La république n’est pas forcément une démocratie pluraliste. B/ Régime démocratique et système de partis. La caractéristique de la démocratie est le pluralisme, c’est-à-dire la libre confrontation des idées et des opinions. En effet, aucun régime démocratique ne comprend qu’un seul parti politique (pas de parti unique). Cela suppose une compétition entre plusieurs partis politiques. Cependant, leur nombre varie selon les démocraties ; parfois il y en a essentiellement deux et parfois il y en a presque une dizaine. Cette notion de système de partis est utile pour comparer et comprendre les différentes configurations politiques. 1. Les systèmes de partis. Il s’agit d’une notion intéressante pour trois choses : • Désigne un nombre de partis politiques suffisamment représentatifs sur le plan politique et électoral dans un pays donné. • Intègre la distribution des différentes forces politiques et leur degré de stabilité. • Permet de préciser les relations existantes entre les partis politiques (opposition, alliance, …) a) Bipartisme et multipartisme. Le bipartisme. Le bipartisme se dit lorsque dans un pays donné, deux grands partis politiques disposent d’un quasi monopole de la représentation politique (USA, GB). Cependant, il existe deux caractérisations de bipartismes : • Le bipartisme rigide ou souple : cette qualification s’attache au degré de cohésion des partis politiques. A la différence du bipartisme souple (USA), le bipartisme rigide désigne une configuration dans laquelle les partis politiques connaissent une discipline de vote ; c’est-à-dire que le gouvernement est soutenu par des parlementaires issus du même parti que lui. Jusqu’à récemment, la Grande-Bretagne illustrait la configuration du bipartisme rigide ; la discipline du parti majoritaire assure une assise politique stable. La Chambre des communes n’est finalement qu’une chambre d’enregistrement ; elle ne fait qu’entériner les actions ou les propositions du gouvernement : elle est soumise à l’autorité générale. Aux USA, il s’agit de bipartisme souple : le parti majoritaire (républicain) au Congrès n’entérine pas obligatoirement le choix du gouvernement, ce qui s’explique par la structure fédérale et la culture politique (les différentes politiques entre le Nord et le Sud ; il n’y a pas d’unité de l’idéologie. • Le bipartisme parfait ou imparfait : concerne le nombre de suffrages rassemblés par les deux grands partis politiques. Le bipartisme est dit parfait lorsque les deux partis politiques représentent au moins 90% des suffrages. Lorsque un des deux partis politique est élu, il peut gouverner seul. Le bipartisme est dit imparfait lorsque les deux grands partis politiques représentent entre 75% et 80% des suffrages. La parti majoritaire élu doit le plus souvent solliciter un petit parti pour gouverner. En Allemagne, on parle de deux parties ennemies. Le multipartisme. Il désigne une situation de concurrence entre plusieurs partis politiques qui ont alors besoin de former des coalitions pour accéder au pouvoir. • Le multipartisme intégral : aucun parti politique ne dispose d’une position hégémonique (aucun ne sort du lot). Les coalitions sont généralement instables, de même que les gouvernements car il n’y a pas de dégagement d’une majorité stable. C’est le cas de la Belgique et des Pays-Bas. • Le multipartisme avec un parti dominant : le parti dominant recueille au moins 30% des voix et constitue un pilier de la coalition. Il s’agit d’une stabilité gouvernementale. La distinction entre le bipartisme et le multipartisme ne satisfait pourtant pas : en effet, elle ne donne qu’une indication sur le degré de fragmentation des partis. D’autres éléments peuvent être pris en compte pour comparer les systèmes des partis : la polarisation. b) La polarisation des systèmes de partis. Cette notion date de 1960 environ. C’est Giovanni SARTOLI qui a le premier proposé de distinguer le multipartisme modéré et le multipartisme extrême et polarisé. • Le multipartisme modéré : le nombre de partis dans un état est limité de 3 à 5. Ces partis sont eux-mêmes modérés, c’est-à-dire qu’il n’existe pas de partis extrêmes. • Le multipartisme extrême et polarisé est présent dans l’hypothèse où il existe plus de 5 partis dans un état et dans ce cas, il existe des partis extrêmes au niveau de l’idéologie. Bipolarisation et multipolarisation. « Par bipolaire, je veux dire que le fonctionnement effectif du système de partis tourne autour de deux pôles, que les partis soient au nombre de deux, trois ou quatre. Dans ce cas, le système est dépourvu de centre ; il n’y a pas de pôle central. Par multipolaire, je désigne un système de partis organisé autour de plus de deux pôles et qui dans ce cas a un centre. L’important, cependant, ce n’est pas seulement le nombre de pôles mais la distance qui les sépare. Quand l’éventail des opinions politiques est extrême, autrement dit quand les pôles de droite et de gauche représentent véritablement deux pôles opposés, je dirais que le système a de la polarité que nous trouvons en face d’un système de partis polarisés. » SARTOLI distingue les systèmes de partis selon qu’ils sont bipolaires ou multipolaires. Sartoli a mis en évidence que le système bipolaire favorise le consensus dans la mesure où les partis politiques convergent vers le centre d’un point de vue idéologique. C’est une configuration centripète. En revanche, le système multipolaire comporte des clivages idéologiques beaucoup plus tranchés ; les partis sont éparpillés sur le plan idéologique et il y a beaucoup moins de consensus. C’est la configuration centrifuge. Ces distinctions ont permis de distinguer le multipartisme bipolaire (Suisse, Canada) et le multipartisme multipolaire (Allemagne de Weimar). Les théories ne nous expliquent pas pourquoi tel système comporte deux partis alors qu’à tel autre six ou sept. 2. L’influence des mode de scrutin sur le respect de parti Maurice DUVERGER dans Les partis politiques (1951). Il existe au moins trois modes de scrutin : • Scrutin majoritaire à un tour ; le candidat en tête est élu quelque que soit son avance et le pourcentage des voix. • Scrutin majoritaire à deux tours ; mode de scrutin moins brutal. Pour être élu au premier tour, le candidat de tête doit obtenir la majorité absolue (plus de 50%) et le quart des voix des électeurs inscrits (au moins 25%). L’absentéisme est donc un phénomène important. S’il n’y a pas de résultat au premier tour, on organise un second tour qui ne présente que les candidats ayant recueillis un certain pourcentage des voix. • La représentation proportionnelle : elle consiste à attribuer à chaque parti politique qui présente une liste, un nombre de sièges proportionnel au nombre de suffrages obtenus par le parti. Il s’agit du mode de scrutin le plus démocratique dans la mesure où tous les partis ont les chances d’avoir des représentants dans une assemblée. « La représentation proportionnelle tend à un système de partis multiples, rigides et indépendants les uns des autres. Le scrutin majoritaire à deux tours tend à un système de partis multiples, souples et dépendants les uns des autres. Le scrutin majoritaire à un tour tend au dualisme des partis. » Selon Maurice DUVERGER, il y a en quelques sortes un lien de cause à effet entre un mode de scrutin donné et un système de partis. Certains sociologues ont nuancé cette analyse qui semblait caricaturale : Douglas RAY a pointé des exceptions dans la théorie de DUVERGER : malgré un scrutin proportionnel, l’Autriche a pendant longtemps connu le bipartisme. Autre exemple ; le Canada connaît un multipartisme avec un scrutin majoritaire à un tour : le mode de scrutin majoritaire à un tour et le bipartisme ne sont pas forcément liés. Plus les circonscriptions sont grandes, plus les suffrages et les sièges ont tendance à se disperser entre les partis ; c’est le multipartisme. A l’inverse, RAY a montré que plus les circonscriptions sont petites, plus on a de chances d’être dans une situation de bipartisme. Le mode de scrutin n’est donc pas le seul facteur à influencer le système de partis : on peut inclure ; la taille de la circonscription, l’histoire nationale, la nature du consensus social. Tout de même, le bipartisme est fortement lié au scrutin majoritaire uninominal à un tour, malgré quelques exceptions. Pourquoi ? Ce mode de scrutin invite les électeurs à voter utile et donc à éliminer les partis les moins représentatifs. Ce mode favorise la concentration des suffrages sur les deux principaux partis. Un certain nombre d’exceptions s’expliquent par la nature du consensus social : en Inde, malgré ce mode de scrutin, il y a un multipartisme (un parti dominant et les autres) qui s’explique par la division de la société en castes hermétiques. Chaque parti représente en effet une caste. Avec le scrutin majoritaire à un tour, les électeurs investissent le parti au pouvoir de la mission d’appliquer un programme pour lequel ils ont voté. Le scrutin majoritaire à deux tours : « Au premier tour on choisit, au second on élimine. » Ce mode de scrutin favorise la conclusion d’alliances et d’accords de désistement. Il tend à structurer le système de partis en deux pôles opposés et induit une logique d’affrontement rendant plus clair le choix des électeurs. Des alliances se nouent et les électeurs savent par avance quelle coalition va gagner en cas de victoire. La représentation proportionnelle favorise la fragmentation (la multiplication) politique mais pourtant, elle n’implique pas nécessairement un multipartisme et une instabilité politique même si c’est souvent le cas. N’importe quelle formation politique est représentée en proportion. L’objectif est d’obtenir qu’une assemblée soit le reflet le plus fidèle possible du peuple ; c’est une représentation miroir. Ce mode de scrutin vise à ce que chacune des tendances idéologiques manifestées dans la nation soit représentée en proportion des suffrages obtenus. En principe, ce mode de scrutin ne favorise pas les alliances puisque les petits partis peuvent avoir des représentants et faire entendre leur voix sous leurs propres couleurs. On dit que ce mode va souvent de pair avec l’instabilité politique : il ne permet pas de dégager une majorité. On remarque l’utilisation de ce mode pour empêcher les partis adverses de sortir majoritaires et les fragmenter (Mitterrand en 1986 mais c’est un échec). On dit que ce mode de scrutin aurait favorisé l’arrivée au pouvoir d’Hitler puisqu’il permet de fractionner le système de partis politiques. Mais la montée du nazisme est moins liée au mode de scrutin qu’au contexte socio-économique de l’époque et aux divisions existantes au sein des partis. III. Les régimes autoritaires et totalitaires. Leur point commun est qu’ils ne sont pas des régimes démocratiques, dans le sens où ils ne répondent pas aux critères des démocraties pluralistes. Ces deux régimes sont souvent confondus sous le terme de dictature et sont pourtant différents. A/ Régime autoritaire. Les individus n’ont pas de liberté d’expression alors que dans les régimes totalitaires, ils n’ont ni cette liberté, ni la liberté d’opinion ; ils ne peuvent même pas penser. 1. Les critères d’identification. Ces critères sont l’absence de pluralisme politique et celle de la liberté d’expression. a) L’absence de réel pluralisme politique. Les régimes autoritaires se caractérisent par le refus du jeu démocratique ; les gouvernements en place y reste longtemps car ils refusent d’organiser de véritables élections et donc de voir sanctionné leu pouvoir par le vote des citoyens. Pour rester au pouvoir, les dirigeants peuvent mettre en œuvre différentes stratégies : • Interdire toute activité politique organisée : interdiction des partis politiques, des débats d’idées, parfois des syndicats, de l’activité des associations, … Les consultations électorales sont quasiment inexistantes. Ce cas de figure est présent dans les états où il n’existe pas une tradition politique de forte participation de la nation (Népal). Ainsi que dans les états où il existe un climat de violence étatique tel qu’il intimide les éventuels opposants (Grèce des colonels : régime militaire en Grèce entre 1967 et 1974). Cependant, on constate qu’assez peu de régimes autoritaires interdisent de façon aussi radicale la pratique de la politique. • Contrôler la vie politique : les élections ont lieu mais ne concernent pas le ou les dirigeants du régime. C’est l’apaisement du peuple par une illusion : les consultations électorales existent mais sont truquées. La plupart des dirigeants de ces régimes veillent à avoir des sortes de relais qui permettent de contrôler la société. Ce qui passe souvent par une institutionnalisation d’un parti politique unique ou d’un syndicalisme d’état incluant du corporatisme. b) L’absence de la liberté d’expression. Cette absence varie selon les régimes autoritaires ; elle est plus ou moins importante. Mais en grande majorité, les régimes veillent à contrôler l’expression des opinions politiques des citoyens ainsi que les instruments d’information et de communication. Les régime autoritaires cherchent à combattre les organisations politiques qui s’opposeraient au pouvoir en place. Ils sélectionnent les informations et pratiquent la censure. Cela aboutit à une désinformation ; ils musellent la presse et la radio. Les individus ne sont pas informés de la politique réelle menée par les dirigeants. Les atteintes à la liberté d’expression ne touchent que les domaines proches du champs politique mais il arrive que dans d’autres régimes autoritaires, ce contrôle soit étendu à d’autres domaines comme la culture et les loisirs. C’est la culture d’état. Dans tous les cas, le contrôle étatique opéré ne concerne que l’expression des opinions ; il ne concerne pas les opinions elles-mêmes. Les régimes totalitaires veillent à ce que les idées circulantes aillent dans le sens du pouvoir en place. Alors que les régimes autoritaires ne cherchent pas à convaincre, l’important est que les citoyens ne le disent pas et qu’ils ne cherchent pas à renverser les dirigeants en place. Ces régimes ne cherchent pas à agir sur les idées des citoyens, ni à uniformiser leur pensée. Ils ne pratiquent pas l’embrigadement des jeunes, ni des lavages de cerveau. 2. Les différents types de régimes autoritaires. Il existe quatre modèles de régimes autoritaires qui sont avancés pour la première fois par Guy HERMET qui conceptualise ces différents modèles dans Aux frontières de la démocratie (1983). a) L’autoritarisme patrimonial. Il est caractérisé par un mode de domination traditionnel : celui d’un souverain qui distingue mal ce qui relève de la sphère privée et ce qui relève de la sphère publique. Le chef n’établit pas de distinction entre les ressources de l’Etat et ses deniers personnels. Il n’y a pas de distinction, non plus, ente l’intérêt général et ses propres intérêts. Cette confusion est également présente dans les monarchies d’ancien régime. Aujourd’hui, on emploi le terme de néo-patrimonialisme pour désigner les régimes contemporains peu différenciés. Ce modèle de régime autoritaire est caractérisé par l’absence de contre-pouvoir comme en Afrique subsaharienne ou en Irak de Saddam Hussein. On constate que : • Les gouvernants s’enrichissent de façon considérable alors qu’il y a des écarts de richesse très importants dans le pays. Il y a souvent une élite très riche et la majorité de la population, très miséreuse. • Le dirigeant peut acheter ses fidèles en leur attribuant des postes, des biens matériels (privilèges, argent, promotion, …). Il s’agit de clientélisme. b) Les oligarchies clientélistes. Le clientélisme est l’échange de services inégal entre le gouvernant et d’autres personnes. C’est aussi le fait, pour un homme politique, de chercher à élargir sa clientèle (les personnes qui le soutiennent) par des procédés plus ou moins démagogiques. Ce type de régime autoritaire est souvent fondé sur l’autorité despotique d’un homme, acceptée en vertu des relations d’échange entre le gouvernement et quelques personnes. Dans les oligarchies clientélistes l’appareil d’Etat est totalement corrompu. On ale plus souvent l’illusion de la démocratie (élections truquées) derrière laquelle se succèdent au pouvoir des clans familiaux issus du monde des affaires ou des grands propriétaires. Ce type de régime est présent aujourd’hui en Amérique latine ; Colombie, Pérou. Paradoxalement, l’Etat est assez faible par son incapacité à protéger la sécurité physique des portes-paroles des mouvements populaires. c) Les régimes « bonapartistes » et les dictatures populistes. Un régime bonapartiste est un régime autoritaire qui a des caractéristiques communes avec celles du Second Empire. Ce sont des régimes fondés sur un exécutif fort (un chef charismatique), qui reposent sur un consensus populaire fondé sur l’adhésion du chef : la population approuve ses orientations. Et qui mobilisent les valeurs patriotiques, incarnées par le chef. Ces régimes sont également appelés démocraties plébiscitaires de par la prise en compte politique des masses populaires afin de tenter de les maîtriser, de les contrôler. Ils donnent des droits au peuple pour mieux l’encadrer, pour qu’il ne se rebelle pas. C’est un régime démagogique. Des élections et des référendums sont organisés à intervalles réguliers et servent seulement à renforcer la légitimité du gouvernant. Exemples : la Turquie de Moustafa Kemal, la Tunisie de Bourguiba (élu président à vie en 1975), l’Egypte de Nasser (1950 – 1970). Les dirigeants introduisent souvent des réformes sociales véritables mais elles bénéficient aux classes moyennes et rarement aux masses populaires. Une place importante est accordée à l’armée qui constitue un facteur d’ascension sociale. Certains auteurs qualifient ces régimes de pré-démocratiques dans la mesure où ils font la transition entre une oligarchie et une démocratie pluraliste. C’est le premier pas vers cette démocratie. d) Les bureaucraties autoritaires ou semi-dictatures libérales. Exemples : le Portugal de Salazar (1930 – 1970), l’Espagne de Franco (1936 – 1975). On parle de bureaucratie dans la mesure où le pouvoir bureaucratique se manifeste en-dehors de l’Etat : les institutions très encadrées régissent la vie économique, professionnelle et parfois culturelle. La bureaucratie encadre l’ensemble des activités sociales et s’appuie sur un important système corporatiste (organisé par branches de métiers). Tout cela afin de contrôler la société en s’y infiltrant puisque toute personne qui travaille fait partie d’une corporation, qui est elle-même sous le joug de l’Etat. Les patrons et les salariés ont d’ailleurs l’obligation d’être représentés dans une corporation : c’est un moyen efficace de contrôler la société. Les corporations sont le relais de l’Etat. B/ Les régimes totalitaires. 1. La notion de totalitarisme. Cette notion est assez récente ; elle est née dans l’entre-deux guerres. Elle fut construite pour rendre compte des similitudes entre les régimes nazi et stalinien. Cette notion s’impose ensuite comme catégorie d’analyse sous l’influence d’auteurs comme Hannah ARENDT (USA) ou Raymond ARON (France). Au début des années 1930, on observe l’apparition de deux régimes politiques : le régime nazi et le régime stalinien. Ces deux régimes ne sont pas assimilables mais ils ont en commun certaines caractéristiques. Lors de l’arrivée au pouvoir d’Hitler et de Staline, la violence d’Etat se transforme en terreur qui vise seulement certains groupes sociaux. Il y a ciblages. En URSS, ce sont les croyants et les paysans enrichis qui sont persécutés alors qu’en Allemagne, ce sont les juifs et les communistes. Dans les deux cas, au nom d’une idéologie légitimatrice (la seule valable pour les gouvernants), naît petit à petit une volonté d’abolir les clivages spirituels ou culturels existants dans la société. C’est le refus des différences, le souhait d’une société uniforme porteuse d’un projet unique auquel tous les individus doivent adhérer. Pour cela, différentes techniques sont déployées : marginalisation voire élimination des opposants au régime, et parallèlement, différentes techniques d’endoctrinement se mettent en place : de l’embrigadement des jeunes au lavage de cerveau. Staline comme Hitler ne se contentent pas d’une apparente uniformité de la société mais souhaitent que chaque individu soutienne activement le régime et qu’il soit intimement convaincu du bien-fondé de ce soutient. Les régimes totalitaires utilisent les technologies modernes de communication pour infiltrer les esprits ; la propagande passe par la radio, les films, … La notion de totalitarisme, impliquant une violence extrême et généralement fondée sur le charisme d’un homme seul, ne peut désigner seulement des régimes de courte durée. L’Allemagne est en effet renversée par l’extérieur et l’URSS est transformée en régime autoritaire. 2. Les caractéristiques du totalitarisme. Il y a absence de clivages, de relations différenciées, ente l’Etat et la société. Celle-ci est absorbée par l’Etat : il est partout et s’infiltre même dans la sphère privée. Les régimes totalitaires nient le pluralisme politique et le pluralisme social : non seulement les individus ont une liberté d’expression étroitement contrôlée mais l’Etat intervient également sur leur liberté d’opinion (de penser). Le but de ces régimes est d’éliminer toute autonomie humaine. Pour cela les dirigeants organisent un terrorisme idéologique et politique sur la société par le biais de multiples centres de pouvoir qui se concurrencent. « La concurrence entre les services dont les fonctions non seulement interfèrent mais dont les tâches sont identiques, ne laisse aucune chance à l’opposition ou au sabotage de se traduire en actes. » H. ARENDT. Les systèmes totalitaires s‘appuient sur quatre éléments : • Le culte du chef. Les régimes totalitaires reposent toujours sur un homme investi d’un pouvoir absolu et qui a pour ambition de remodeler la société toute entière. Un homme charismatique qui se veut rassembleur (veut susciter l’adhésion) et qui sait séduire les masses ; il organise de grandes manifestations imposantes relayées par différents moyens de communication. De nombreux portraits et statues du chef sont omniprésents dans la société afin de rappeler ses vertus. • Le monopole idéologique. Les régimes totalitaires ne tolèrent qu’une conception de la Vérité qui n’admet aucune contradiction ni même aucune nuance. Cette idéologie rend légitime la destruction de toutes les institutions qui ne lui sont pas conformes (y compris les institutions socioculturelles) et autorise la lutte contre les doctrines autres que l’officielle. Elle vise souvent à combattre des ennemis constitués de toutes pièces par le chef (les juifs qui menaceraient la pureté du sang aryen), ce qui permet de persuader les individus de l’importance de la menace. L’endoctrinement, permet lui, de faire du chef un protecteur indispensable. Il renforce sa légitimité. • Le contrôle des moyens de pouvoir et de persuasion. Les régimes totalitaires suppriment les institutions qui ne sont pas porteuses de la doctrine officielle et éliminent les groupements opposés à cette doctrine. Il y a même une surveillance très étroite des institutions porteuses de la doctrine officielle. On observe la création de structures spécifiques (embrigadement de la jeunesse) ainsi que de machines de propagande afin de persuader que la doctrine officielle est la meilleure. • Un système policier et concentrationnaire. La police est omniprésente ; elle peut intervenir partout, à tout moment et pour n’importe quel motif. Paradoxalement, elle sème la terreur plus qu’elle ne protège. Il existe deux types de polices : la police en uniforme et une police beaucoup plus discrète, invisible, qui s’infiltre dans les institutions afin de les contrôler. Les réseaux policiers créent un climat de suspicion important qui peut glisser vers la paranoïa. En cas de non respect de la ligne de conduite imposée par le chef, nul n’est à l’abri d’une dénonciation. Le système policier s’accompagne d’un système concentrationnaire ; il existe des camps de concentration qui permettent soit d’enfermer (priver de liberté), soit d’éliminer en masse les individus suspects ou indésirables.
Posted on: Mon, 02 Dec 2013 15:40:46 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015